À l’heure où États-Unis, France et Royaume-Uni continuent de se concerter sur quand et comment frapper le régime de Bachar el-Assad en Syrie, et pendant que la Russie multiplie menaces et mises en garde, les dirigeants arabes ont rendez-vous demain dimanche à l’occasion du 29e sommet de la Ligue dans la ville de Dhahran, en Arabie saoudite. Les travaux préparatoires ont débuté jeudi en présence des ministres des Affaires étrangères des pays membres pour examiner les projets de résolution qui seront présentés. Parmi les vingt-deux membres de l’organisation va figurer comme depuis plusieurs années un grand absent : la Syrie. Faisant partie des pays fondateurs en 1945, sa participation est suspendue depuis 2011. En dépit du débat portant sur une possible présence du président syrien Bachar el-Assad aux réunions, les efforts de plusieurs pays tels que l’Égypte et l’Algérie pour tenter de ramener Damas dans le giron de la Ligue semblent avoir échoué. Ces derniers ont cédé aux pressions des pays du Golfe, menés par le poids lourd saoudien opposé au régime syrien.
Les leaders arabes doivent traiter de l’épineux dossier de « l’évolution de la crise syrienne » qui exacerbe les différentes approches au sein de l’institution quant au comportement à adopter envers le régime de Bachar el-Assad. Le mois dernier, le prince hériter saoudien, Mohammad ben Salmane, déclarait au Time que « Bachar va rester. Mais je crois que Bachar a intérêt à ne pas laisser les Iraniens faire ce qu’ils veulent » en Syrie. En ce sens, l’autre question fondamentale inscrite à l’ordre du jour de demain porte sur « les interventions iraniennes dans les affaires internes arabes ».
Riyad et ses alliés cherchent à les contrecarrer à tout prix, et cette réunion devrait donc être l’occasion de tenter de rallier un front uni face à Téhéran, parrain de Damas aux côtés de Moscou. « Ce sommet devrait servir de tribune pour Riyad pour exposer ses craintes quant à l’Iran et obtenir une caution de la part des dirigeants arabes », explique à L’Orient-Le Jour Hasni Abidi, directeur du Centre d’études et de recherches sur le monde arabe et méditerranéen, à Genève (Cermam) et auteur de Moyen-Orient: le temps des incertitudes (éd. Erick Bonnier, Paris).
Dans le but d’éviter les points de divergence entre les frères du Golfe en ce sens, la crise entre l’Arabie saoudite et le Qatar, déclenchée par un blocus contre l’émirat par le royaume wahhabite et ses alliés en juin dernier, ne devrait pas être évoquée lors du sommet. L’émir du Qatar, cheikh Tamim ben Hamad, devrait d’ailleurs être présent à Dhahran. Mais le mystère persiste quant au nombre effectif de dirigeants qui assisteront au sommet, signe de solidarité en réponse à l’invitation de Riyad, selon M. Abidi.
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« Centralité de la cause palestinienne »
L’autre dossier brûlant dans la région, la guerre au Yémen, doit également être abordé. L’Arabie saoudite et ses alliés y sont enlisés depuis 2015 aux côtés du président Abd Rabbo Mansour Hadi face aux rebelles houthis soutenus par Téhéran. La communauté internationale ne cesse de tirer la sonnette d’alarme appelant à mettre un terme à ce désastre humanitaire qui a déjà fait 10 000 morts. Le choix du lieu du sommet situé à l’est du royaume saoudien aurait par ailleurs été influencé par le conflit alors que des sources rapportaient que les Saoudiens craignent de nouveaux tirs de missiles houthis en direction de la capitale. Un missile balistique en direction de Riyad a de nouveau été intercepté par les autorités saoudiennes mercredi.
Les dirigeants arabes devront également se pencher sur le dossier du conflit israélo-palestinien tandis que les troubles grandissent entre les deux camps depuis ces dernières semaines dans le cadre de la « marche du retour » lancée le 30 mars. L’annonce en décembre dernier de la reconnaissance de Jérusalem en tant que capitale de l’État hébreu par les États-Unis et de la volonté d’y déménager l’ambassade américaine avait par ailleurs amené la Ligue à se réunir en urgence au Caire pour demander aux Américains d’annuler leur décision. Le rapprochement affiché entre Washington et Riyad et la déclaration de MBS quant au « droit » des Israéliens à « leur propre terre » au début du mois ont agrandi les inquiétudes préexistantes à ce sujet. Dans ce contexte, le but de la Ligue devrait être de rester fidèle à sa position traditionnelle sur ce dossier et « d’insister sur la centralité de la cause palestinienne », note M. Abidi. « Ceci ne veut pas pour autant dire qu’un plan B sera présenté » comme alternative au plan de l’administration américaine, ajoute-t-il.
Le poids et la marge de manœuvre de la Ligue arabe restent bien limités. Si les pays membres devraient pouvoir trouver des terrains d’entente sur ces dossiers, peu d’actions concrètes sont attendues.
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12 h 03, le 14 avril 2018