Rechercher
Rechercher

Moyen Orient et Monde - conflit

Syrie : des frappes tardives auront-elles toujours un sens ?

Alors que les Occidentaux tardent à prendre une décision, l’enjeu est de réaffirmer la détermination à sanctionner les attaques de Damas à l’arme chimique.

Une photo publiée par la Navy montrant le porte-avion USS Harry S. Truman. Danny Ray Nunez Jr./US Navy/MC3/AFP

Le flou continue d’être entretenu du côté occidental quant au plan d’action prévu en Syrie. Après avoir annoncé que le lancement de frappes militaires était imminent et sommant la Russie de « se tenir prête », le président américain Donald Trump s’est ravisé hier. « Jamais dit quand une attaque contre la Syrie pourrait avoir lieu. Cela pourrait être très bientôt ou pas si tôt que cela », a-t-il écrit sur son compte Twitter. Paris et Washington ont pourtant promis une « réponse forte et commune » lundi, appuyés par Londres, à l’attaque chimique présumée de samedi dernier du régime de Bachar el-Assad contre les habitants de la ville de Douma, dans la Ghouta orientale. L’horloge tourne et le délai fixé à mercredi soir par le locataire de la Maison-Blanche pour prendre une décision semble bien loin, mettant les Occidentaux en position de faiblesse sur le dossier.

Le président français, Emmanuel Macron, est également monté au créneau hier, affirmant que la France a « la preuve que la semaine dernière, il y a maintenant près de dix jours, des armes chimiques ont été utilisées, au moins du chlore, et qu’elles ont été utilisées par le régime de Bachar el-Assad ». « Nous aurons des décisions à prendre en temps voulu, quand nous le jugerons le plus utile et le plus efficace », a-t-il déclaré lors d’un entretien accordé à la chaîne de télévision TF1.

L’enjeu est de taille pour les Occidentaux qui n’ont cessé de menacer d’intervenir en Syrie en cas de recours à l’arme chimique par Damas. Il s’agit cette fois de ne pas répéter le scénario de 2013 dans lequel les Occidentaux n’avaient pas riposté aux attaques chimiques du régime de Bachar el-Assad dans la Ghouta orientale suite au retrait soudain de Barack Obama.

Entre impulsivité et retenue, « le flou occidental procède davantage d’hésitations réelles que d’une stratégie calculée », estime Frédéric Charillon, professeur à Sciences Po Paris, interrogé par L’Orient-Le Jour. Bien que l’effet de surprise soit désormais passé, l’enjeu réside dans « la volonté de montrer une détermination à mettre un coup d’arrêt à l’usage d’armes chimiques, resté jusque-là impuni », observe-t-il. « La reconstitution d’un front États-Unis, France, Grande-Bretagne aurait des avantages pour les trois alliés, qui se retrouveraient soudés dans la détermination pour la première fois depuis longtemps. Mais elle aurait l’inconvénient d’une image négative dans le Sud, où l’aventure libyenne, avec les mêmes partenaires, n’est toujours pas digérée », précise pour sa part M. Charillon.


(Lire aussi : Frappes occidentales en Syrie : Moscou est-il prêt à riposter?)


« Frappe symbolique »
Le fait de repousser la prise de décision quant à des frappes en Syrie pourrait cependant signifier le souhait « de laisser du temps aux parties concernées pour se préparer », note Emily Burchfield, assistante de programme à l’Atlantic Council, contactée par L’OLJ. Dans ce cas, « l’objectif des frappes ne serait que symbolique », poursuit-elle.

Mais l’efficacité de frappes retardées contre Damas et ses parrains « dépend de la séquence choisie », selon M. Charillon. « Une seule frappe symbolique, sans résultat immédiat ni suites possibles, pourrait confirmer l’impuissance occidentale », explique M. Charillon. En revanche, « une frappe longue, portant des coups réels au régime de Damas, changerait la donne jusqu’alors dominée par la Russie depuis son intervention. Mais elle serait lourde de risques de tension forte avec Moscou », nuance-t-il.

La Russie s’est faite particulièrement virulente ces derniers jours à l’égard de Washington et ses alliés. La porte-parole de la diplomatie russe a notamment appelé hier « tous les membres de la communauté internationale à réfléchir sérieusement aux conséquences possibles de telles accusations, menaces et actions planifiées » contre le gouvernement syrien. M. Macron a pour sa part souligné plus tôt dans la journée qu’« en aucun cas la France ne laissera une escalade se faire ou quoi que ce soit qui puisse endommager la stabilité de la région ».

Dans le même temps, hier, l’agence de presse russe Interfax a rapporté que des navires de guerre russes ont quitté leur base navale située à Tartous « comme il est normal » en temps de menace, a précisé Vladimir Chamanov, le président de la commission de la Défense à la Douma. Selon Mme Burchfield, les actions des Occidentaux « sont peut-être également une manœuvre pour ramener les Russes à la table des négociations et éviter une confrontation » dont personne ne veut. L’ambassadeur russe aux Nations unies, Vassily Nebenzia, a notamment déclaré hier que « la priorité est d’éviter le danger d’une guerre », suite à une réunion sur la Syrie à huis clos du Conseil de sécurité. Répondant à une question sur une potentielle guerre entre les États-Unis et la Russie, ce dernier a estimé que les Russes « ne peuvent exclure aucune possibilité ».



Lire aussi

Les enjeux d’une frappe occidentale en Syrie sans l’aval de l’ONU

Frappes contre la Syrie : quelles cibles, quels risques, quels moyens ?

La présence militaire russe et son arsenal en Syrie

Le piège de la ligne rouge : frapper quoi et pour quels objectifs ?

Bruno Tertrais : Emmanuel Macron s’est engagé assez loin, il ne peut pas ne pas réagir contre Damas

Attaques chimiques contre Douma : comment peuvent réagir Washington et Paris

Les principaux raids israéliens en Syrie depuis 2013

Raid israélien en Syrie : un tournant dans les relations avec la Russie ?

Attaques chimiques en Syrie : le piège des lignes rouges

Attaques chimiques en Syrie : Washington au pied du mur ?

Le flou continue d’être entretenu du côté occidental quant au plan d’action prévu en Syrie. Après avoir annoncé que le lancement de frappes militaires était imminent et sommant la Russie de « se tenir prête », le président américain Donald Trump s’est ravisé hier. « Jamais dit quand une attaque contre la Syrie pourrait avoir lieu. Cela pourrait être très...

commentaires (3)

Déclencher un conflit qui va embraser tout le moyen orient, sans la moindre preuve, seulement quelques images furtives signées par des "casques blancs" serait irresponsable. La Russie après avoir vaincu Daech n'a certainement pas l'intention de se laisser voler sa victoire. Dans cette affaire l'Occident a joué une très mauvaise carte et il a perdu.

Rocchesani Marcel

12 h 56, le 13 avril 2018

Tous les commentaires

Commentaires (3)

  • Déclencher un conflit qui va embraser tout le moyen orient, sans la moindre preuve, seulement quelques images furtives signées par des "casques blancs" serait irresponsable. La Russie après avoir vaincu Daech n'a certainement pas l'intention de se laisser voler sa victoire. Dans cette affaire l'Occident a joué une très mauvaise carte et il a perdu.

    Rocchesani Marcel

    12 h 56, le 13 avril 2018

  • LES OCCIDENTAUX SE SONT DEGONFLES COMME TOUJOURS DEPUIS LA CRISE SYRIENNE ET PUIS CELLE DU YEMEN LAISSANT LE CHAMP LIBRE A LA RUSSIE ET A SES ACCESSOIRES ! UNE ERREUR IMPARDONNABLE QUI LEUR COUTERA CHER... IL PARAIT QUE TRUMP EST PIRE QUE OBAMA... RIEN QUE DES PAROLES, DES TERGIVERSATIONS ET DES GAFFES !!!

    LA LIBRE EXPRESSION, CENSUREE PARTI PRIS/ INTERET

    12 h 05, le 13 avril 2018

  • TARDIVES LES FRAPPES PERDRAIENT BEAUCOUP DE LEURS EFFETS ET POSERAIENT TROP DE QUESTIONS !

    LA LIBRE EXPRESSION, CENSUREE PARTI PRIS/ INTERET

    09 h 30, le 13 avril 2018

Retour en haut