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Grozny 3

L’organisation Médecins sans frontières dénonçait au début du week-end dernier le bilan effroyable enregistré sous les coups du massacre – ou plutôt du crime contre l’humanité – perpétré par le régime Assad, avec l’appui actif de Vladimir Poutine, dans la Ghouta orientale, à la périphérie de Damas : plus de 500 tués et 2 500 blessés parmi la population civile en moins d’une semaine, sans compter le pilonnage systématique et ciblé de dix centres médicaux encadrés par l’association internationale. L’Organisation syrienne des droits de l’homme (OSDH) indique pour sa part que parmi les 500 victimes l’on déplore la mort tragique de plus de 120 enfants. En moins d’une semaine… L’émissaire spécial de l’ONU en Syrie, Staffan de Mistura, rapportait quant à lui il y a dix jours que pour la première semaine de février uniquement un millier de civils ont péri sous les bombardements en Syrie.

Comble de l’hypocrisie diplomatique, la résolution 2401 du Conseil de sécurité votée à l’unanimité samedi dernier stipule sans détour que le cessez-le-feu « réclamé » par l’ONU ne s’applique pas aux « terroristes » d’el-Qaëda et de Daech. Il ne faut évidemment pas être Machiavel pour en déduire que cette petite clause peut s’appliquer sans scrupule à toutes les catégories de combattants qui peuvent être tous qualifiés sans distinction de « terroristes » et de « jihadistes », fussent-ils les plus libéraux du monde. Rien d’étonnant de ce fait que le « cessez-le-feu » du Conseil de sécurité ait duré ce que durent les roses… l’espace d’un matin.

Nous sommes très loin des classiques dommages collatéraux provoqués inévitablement dans tout conflit armé. Nous assistons ici à la mise en œuvre, très froidement, d’une stratégie de la terre brûlée et à l’exécution abjecte d’une vaste opération de « nettoyage ethnique » visant à provoquer sans détour des bouleversements démographiques à caractère essentiellement confessionnel. Cette politique de la terre brûlée est devenue la règle en Syrie. Lors des premiers bombardements aériens sauvages menés par l’aviation du président Poutine contre les quartiers d’Alep en février 2016 (900 raids aériens en une semaine), nous déplorions dans ces mêmes colonnes un Grozny 2. Aujourd’hui dans la Ghouta, c’est un Grozny 3 qui vise des centaines de milliers de civils – près de 400 000, selon des sources concordantes.

Certains ont entrepris durant le week-end écoulé de poster sur les réseaux sociaux une interrogation lourde de conséquence : « Avons-nous perdu tout sentiment humain ? » Si nous assistons depuis bientôt sept ans en Syrie à des massacres et des « Grozny » en série, c’est, entre autres, parce que l’opinion publique et la classe politique en Occident – qui se posent en porte-étendards des valeurs humanistes et des droits de l’homme – font preuve d’une inqualifiable léthargie à l’égard des crimes successifs contre l’humanité auxquels se livre sans sourciller le régime Assad.

La négation de toute considération humaine a atteint son apogée dans ce conflit syrien. Les faits sur ce plan sont éloquents… Le clan Assad ne doit ainsi sa survie qu’à l’apport sur le terrain de la « chair à canon » fournie par les diverses milices pro-iraniennes étrangères à la Syrie, lesquelles permettent par ailleurs aux pasdaran de s’imposer sur la scène syrienne sans avoir à engager directement leurs forces dans les combats – hormis les conseillers militaires, en nombre retreint. Quant au président Poutine, il expérimente en Syrie de nouvelles armes (plus de 200 nouveaux types d’armes, selon un général russe cité par l’AFP) de même qu’il fait larguer des tapis de bombes par son aviation en prenant bien soin lui aussi – à l’instar des gardiens de la révolution iranienne – d’éviter d’impliquer ses troupes régulières. Mais il n’hésite pas, dans le même temps, à recourir à des mercenaires russes recrutés par l’entreprise paramilitaire privée Wagner, dont le patron est surnommé « le chef (cuisinier) de Poutine » !

En entraînant de la sorte son pays dans le jeu meurtrier des nations pour assurer la survie de son clan, Bachar el-Assad a transformé la Syrie en une gigantesque arène baignant dans le sang sur laquelle il n’a aucun contrôle et que se partagent – tels des charognards qui s’acharnent sur leur proie – des forces américaines, russes, iraniennes, turques, ainsi que les mercenaires russes et les diverses milices chiites dépêchées par Téhéran, sans compter l’aviation israélienne qui intervient lorsque bon lui semble. De cette tragédie syrienne, il ne peut résulter qu’un nouvel accroissement exponentiel du radicalisme islamiste, semant inéluctablement les germes d’un rebond du terrorisme un peu partout dans le monde et d’une aggravation de l’instabilité chronique dans la région.

Pratiquer une politique de laisser-faire/laissez-passer face aux massacres à répétition, aux destructions de villes entières et aux déplacements massifs de populations – ou pire encore, contribuer activement à ce drame humain – revient, à terme, à se tirer une balle dans le pied. Car avec les vagues successives d’immigration clandestine provoquées, entre autres, par le conflit syrien, c’est la stabilité durable de plusieurs régions du monde qui risque d’être plus que jamais sérieusement, et profondément, menacée.


Pour mémoire

Grozny 2

L’organisation Médecins sans frontières dénonçait au début du week-end dernier le bilan effroyable enregistré sous les coups du massacre – ou plutôt du crime contre l’humanité – perpétré par le régime Assad, avec l’appui actif de Vladimir Poutine, dans la Ghouta orientale, à la périphérie de Damas : plus de 500 tués et 2 500 blessés parmi la population civile...

commentaires (4)

Les bouchers ne sont pas uniquement les exécutants de ce terrible drame humanitaire, mais aussi et surtout leurs alliés, parrains, commanditaires et la communauté internationale dans son ensemble qui est entièrement impliquée dans cette spirale de la violence...! Il est temps à l'humanité de se mobiliser pour modifier les règles et les procèdures qui régissent l'ONU en lui donnant son autonomie et sa liberté d'action par rapport aux grands décideurs du monde...!

Salim Dahdah

10 h 19, le 27 février 2018

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Commentaires (4)

  • Les bouchers ne sont pas uniquement les exécutants de ce terrible drame humanitaire, mais aussi et surtout leurs alliés, parrains, commanditaires et la communauté internationale dans son ensemble qui est entièrement impliquée dans cette spirale de la violence...! Il est temps à l'humanité de se mobiliser pour modifier les règles et les procèdures qui régissent l'ONU en lui donnant son autonomie et sa liberté d'action par rapport aux grands décideurs du monde...!

    Salim Dahdah

    10 h 19, le 27 février 2018

  • Horreur..Horreur ...des bouchers assoiffes de sang...merci pour cet article qui met les points sur les "i" comme toujours...prions pour la Syrie martyr...

    Soeur Yvette

    09 h 20, le 27 février 2018

  • STALINE, HITLER ET LES AYATOLLAHS ET ACCESSOIRES DES BOUCHERS ASSOIFFES DE SANG !

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 46, le 27 février 2018

  • Tout à fait vrai !! Bravo .. surtout quand Israël voit des arabes se taper dessus le comble entre un même peuple !! Cela donnera des idées à d’autres car il y aura eu exemple

    Bery tus

    06 h 40, le 27 février 2018

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