Tous ceux qui suivent de près la course électorale dans la capitale, plus précisément dans la circonscription de Beyrouth II, en conviennent : la bataille y sera rude, tant par le nombre de candidats et de listes qui devront s’affronter, que par le paysage politique qui s’annonce plus que jamais bigarré. Longtemps considérée comme une chasse gardée du courant du Futur, cette circonscription pourrait connaître des changements lors des législatives du 6 mai.
Et pour cause : la loi a changé avec l’introduction de la proportionnelle ouvrant des possibilités réelles à d’autres courants et mouvances. D’autre part, à en croire les milieux non haririens, l’humeur de la rue sunnite ne serait plus la même. Enfin des liens gouvernementaux se sont récemment tissés, notamment entre le courant du Futur et le tandem chiite après l’affaire de la démission du Premier ministre, Saad Hariri, à Riyad, en novembre dernier.
Autre facteur de changement qui pourrait peser dans la balance, l’émergence, en 2016, d’une nouvelle tendance incarnée par Beyrouth Madinati lors des élections municipales, introduisant une dynamique de confrontation inédite entre société civile et partis traditionnels.
Tablant sur cette expérience et sur un certain « ras-le-bol » ressenti dans une ville qui n’a connu aucun développement depuis des années, plusieurs « forces nouvelles » dites du changement vont tenter, lors de cette échéance, de reprendre le flambeau contre les partis conventionnels du pouvoir, même si elles ne se placent pas toutes sous la bannière de la société civile.
À ce jour, ce sont au moins deux listes qui aspirent à être entières qui devront affronter la liste du courant du Futur. Tout d’abord, celle parrainée par l’homme d’affaires Fouad Makhzoumi, qui concocte actuellement une liste en comptant sur de longues années de prestations sociales et caritatives dans la capitale.
M. Makhzoumi mise également sur le fait que pour la première fois, la liste du Futur « ne pourra prétendre qu’à la moitié des sièges seulement », comme l’affirme un analyste proche de la campagne de M. Makhzoumi. Pour de nombreux analystes du même bord, Saad Hariri, en dépit de son retour momentanément « triomphal » de Riyad, a bel et bien perdu du terrain en termes de popularité dans la capitale.
Une thèse que seules les urnes pourront confirmer mais qui n’en reste pas moins source d’espoir pour tous ses adversaires électoraux, nombreux à vouloir s’engouffrer dans la brèche pour lui arracher quelques sièges.
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Le ras-le-bol
Outre la liste présidée par M. Makhzoumi, une autre liste regroupant des « familles beyrouthines éminentes », dont notre collègue du Liwa’, Salah Salam, brigue également les 11 sièges que comprend la circonscription (6 sunnites, deux chiites, un druze, un grec-orthodoxe, un protestant).
La liste devrait regrouper « des personnalités traditionnelles qui ont leur poids et qui se sont souvent trouvées écartées du jeu politique, ainsi que des candidats issus de la société civile », comme le précise une source proche de la liste. Même si l’on refuse à ce jour à révéler les noms de certains candidats pressentis, on avance de plusieurs sources le nom d’Ibrahim Mneimné, ancien chef de file de Beyrouth Madinati.
Les membres de la liste, qui se réclament « plutôt de la ligne de Rafic Hariri que de celle de son fils, Saad », affichent clairement « leur opposition à l’état de négligence et de laxisme dont souffre la capitale, depuis pratiquement la disparition de Rafic Hariri ». Placé sous le slogan du « ras-le-bol », la campagne des « familles beyrouthines » sera également axée sur le refus de voir d’autres forces, « qui proviennent de l’extérieur de la capitale, venir briguer les sièges que n’aura pas réussi à rafler le courant du Futur », précise un porte-parole de la liste. Comprendre : le Hezbollah et Amal, ainsi que leur alliés, comme le CPL et le PSNS.
À ce jour, le tandem chiite, qui, comme à son habitude, observe une discrétion légendaire en matière de stratégie électorale, concocte une liste qui ne sera toutefois pas complète, avec trois sunnites uniquement et, pour l’instant du moins, deux chiites, sauf changement de dernière minute. En réduisant le nombre de candidats sunnites, le tandem chiite entendrait ainsi éviter la dispersion des voix.
De source informée, on apprend que la réunion qui s’est tenue lundi entre le chef du Parlement, Nabih Berry, et Saad Hariri, n’a pas abouti à un compromis au niveau des sièges chiites, M. Berry ayant insisté pour présenter deux candidats de sa confession ( l’un d’eux serait Amine Cherri) rendant ainsi la bataille encore plus corsée si M. Hariri devait également présenter deux candidats chiites.
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La liste Hezbollah-Amal comprend également trois candidats sunnites dont le journaliste Salem Zahran (Amal) et un autre issu des Ahbache (Adnan Traboulsi probablement), islamistes prosyriens. Le candidat au siège réservé aux protestants serait issu quant à lui du PSNS (Farès Saad).
Encore incomplète, la liste parrainée par le courant du Futur compte, à ce jour, outre M. Hariri, l’ancien Premier ministre, Tammam Salam, le ministre de l’Intérieur, Nouhad Machnouk, un homme d’affaires, Nazih Najem, pour les sièges sunnites. Une incertitude plane toutefois autour du siège protestant qui devrait aller, soit à l’actuel député Bassem Chab, comme le souhaiterait M. Hariri, soit à Edgar Traboulsi, candidat du CPL, si le chef du courant du Futur décide au final de s’allier avec les aounistes pour pourvoir à ce siège.
Le tableau semble donc encombré avec une multitude de candidatures et de listes et les incertitudes restent nombreuses, même si certaines grandes tendances commencent à se préciser. Comme par exemple la volonté désormais affichée de l’ancien chef de gouvernement, Nagib Mikati, de soutenir « la liste qui comprendra des personnalités authentiquement beyrouthines aux côtés de candidats représentant du sang neuf et des indépendants ».
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commentaires (6)
YALLAH ! PLUS ON EST NOMBREUX PLUS ON EST DES FOUS & PLUS WALI FAKIH S'EN AMUSE !
Gaby SIOUFI
11 h 49, le 14 février 2018