Rechercher
Rechercher

Nos Lecteurs ont la Parole - Nos lecteurs ont la parole

Au nom de toutes les femmes maronites...

Photo d'illustration bigstock

Lettre ouverte à Mgr Béchara Raï, patriarche maronite d’Antioche et de tout l’Orient


Éminence,
Je vous écris au nom de toutes les femmes maronites libanaises qui se sont retrouvées devant les tribunaux religieux, dans le but d’attirer votre attention sur les injustices et aberrations flagrantes qui s’y passent. On m’avait portant prévenue que rien n’était plus injuste et plus abusif que ces lieux. J’ai refusé d’y croire en espérant y trouver le réconfort et la justice nécessaires pour compenser des années d’abus en tout genre que j’ai dû subir en silence afin d’essayer, contre vents et marées, et au prix d’énormes sacrifices, de sauvegarder ma famille et de protéger mes enfants. Il ne m’a pas fallu longtemps pour réaliser à quel point ces tribunaux étaient abusifs à l’égard des femmes, et qu’ils émettent des jugements aussi injustes qu’iniques.


La femme se retrouve donc méprisée, maltraitée, obligée de subir la violence d’un système judiciaire d’autant plus cruel qu’il est sournois et intouchable.


Les droits des femmes dans un système sont révélateurs de la nature de ce système et de sa capacité à devenir plus humain et plus noble. Or, basée sur mon expérience et sur les témoignages que j’ai recueillis, une conclusion s’impose : abandonnée par son mari, la femme se trouve obligée d’affronter toute seule un système judiciaire discriminatoire, qui, au lieu de rendre justice, lui fait subir des souffrances morale et financière supplémentaires. Au meilleur des cas, le tribunal ecclésiastique lui octroie une indemnisation financière insuffisante pour continuer de survivre tant bien que mal dans la dignité.


Quelles que soient les raisons avancées, les femmes sont toujours lésées, et les hommes toujours avantagés, même lorsqu’ils contournent les lois et font fi des tribunaux religieux, après avoir tourné le dos à leurs enfants, leur famille, leur religion, ainsi qu’à leur engagement sacré au mariage. Ces hommes trouvent un support inconditionnel auprès des juges, qui ignorent les éléments essentiels des dossiers, tout en faisant comprendre à la femme qu’il faut qu’elle accepte des situations d’abus, de violence morale, d’adultère, de remariage, et même de reconversion à l’islam…
Ne tenant même pas compte, au moment de statuer sur la pension, des moyens financiers des hommes (parfois considérables), et réduisant de manière drastique cette pension à un montant absurde, ils permettent ainsi à l’époux d’exercer sur sa femme et ses enfants toutes sortes de pressions afin de les humilier et de pouvoir arriver à ses fins.


À la lumière de ce qui précède, de nombreuses femmes, dont moi-même, avons légitimement perdu toute confiance dans ce système. Je vous le demande : pour quelles raisons la très grande majorité des femmes ne trouve-t-elle pas justice auprès de vos tribunaux ? Un tribunal n’est-il pas le lieu par excellence où la justice est censée être rendue en toute équité et impartialité ? N’est-ce pas le cas, a fortiori, s’agissant d’un tribunal ecclésiastique, substantiellement lié à ces valeurs ?
Pour toutes ces raisons, je vous conjure de bien vouloir faire le nécessaire afin que justice soit vraiment rendue au sein de vos tribunaux, qui devraient, dans leurs agissements, refléter les enseignements du Christ.
Une réforme et un grand ménage s’imposent. Il est temps de changer et de rendre justice aux femmes lésées. Vous tenez vraiment à protéger les valeurs sacrées, telles que le mariage ou la famille ? Mettez donc un terme à l’hypocrisie et la misogynie ambiantes dans ces lieux. Recommandez à vos juges de savoir faire la différence entre un homme abusif et une femme abusée ; de ne pas céder aux abus de tout genre. Rendez à la femme ses droits ; qu’elle soit jugée sans complaisance lorsqu’elle est dans la faute, mais qu’elle soit par ailleurs dédommagée moralement et financièrement lorsqu’elle est la victime. Et si tout cela s’avérait impossible, alors abandonnez cette compétence aux tribunaux civils.
Respectueusement,

 Carole Marie KHOURY

Lettre ouverte à Mgr Béchara Raï, patriarche maronite d’Antioche et de tout l’Orient Éminence, Je vous écris au nom de toutes les femmes maronites libanaises qui se sont retrouvées devant les tribunaux religieux, dans le but d’attirer votre attention sur les injustices et aberrations flagrantes qui s’y passent. On m’avait portant prévenue que rien n’était plus...

commentaires (8)

Insupportable ...on a l'impression que l'on redécouvre une situation que pourtant on pensait le connaitre. Une lettre ouverte, un constat, qui éveille les consciences.

Sarkis Serge Tateossian

13 h 42, le 26 janvier 2018

Tous les commentaires

Commentaires (8)

  • Insupportable ...on a l'impression que l'on redécouvre une situation que pourtant on pensait le connaitre. Une lettre ouverte, un constat, qui éveille les consciences.

    Sarkis Serge Tateossian

    13 h 42, le 26 janvier 2018

  • Depuis des millénaires la femme a été soumise même dans la démocratie grecque, en Europe ça a changé mais dans les pays arabes ils ont besoin encore quelques siècles mais le Liban je m'attendais pas à ça.

    Eleni Caridopoulou

    13 h 09, le 22 janvier 2018

  • Dommage que cet article fut ecrit au nom des femmes maronites. Ce fleau attaque toutes les femmes quelle que soit leur religion. Les femmes libanaises sont piegees dans un systeme religieux archaique obsolete machiste et aveugle. quelle tristesse que meme nos revendications se font au nom de la religion.

    ayda ka

    11 h 14, le 22 janvier 2018

  • La seule solution réaliste : Le mariage civil.

    Remy Martin

    23 h 09, le 21 janvier 2018

  • Les tribunaux ecclésiastiques sont composés de juges uniquement de sexe masculins! Et vous espérez que ces hommes s’associent aux misères des femmes? En réalité, ils usent de leur autorité judiciaire pour se remplir les poches et se fichent du droit et de la justice! Vous désirez y échapper, mariez-vous civilement!

    Dounia Mansour Abdelnour

    18 h 37, le 21 janvier 2018

  • Notre société libanaise, qu'elle soit maronite, sunnite, chiite ou druze est basée sur l'importance accordée aux hommes: pères, fils, frères et époux. Cela commence dès la naissance du garçon. Nos responsables religieux de toutes les communautés ont grandi dans cette atmosphère et en sont imprégnés. Une fois terminées leurs études religieuses, devenus évêques, patriarches, cheikhs, juges etc., ils appliquent ce même système car il leur donne le pouvoir, surtout sur les femmes, malheureusement. Dans leurs demeures bien loin des soucis matériels...que connaissent-ils de la vie quotidienne d'une mère, d'une épouse...d'une femme ? Espérer qu'ils abandonnent leurs "compétences" aux tribunaux civils... mais alors ils perdraient tous les bénéfices financiers qu'ils tirent justement des malheurs des femmes et parfois aussi des hommes ! Irène Saïd

    Irene Said

    17 h 00, le 21 janvier 2018

  • PARTOUT ET EN TOUT MA BTE7KE ELLA EL LATTA !

    LA LIBRE EXPRESSION

    11 h 03, le 20 janvier 2018

  • PARCE QUE LE CLERGE EST LUI AUSSI MASCULIN ! REPONSE AUSSI SIMPLE QUE REELLE. ceci dit- faudra REVOIR la politique clericale a ce sujet , dans son ensemble , sans omettre une autre verite, celle ci a l'avantage de l'homme(masculin ) : en effet combien d'epouses refusent le divorce a moins d'avoir quasiment "denude" financierement leur ex , ou de l'avoir esquinte moralement sans autre raison autre que le depit ????

    Gaby SIOUFI

    10 h 45, le 20 janvier 2018

Retour en haut