Il y avait foule hier soir au Zoukak Studio, dans le quartier de la Quarantaine, pour le lancement non officiel de la nouvelle plateforme politique « Li Baladi » (Pour mon pays). Une foule jeune et mixte, à l’image des fondateurs du regroupement, 30 à 40 ans environ, mus par le désir de changer les choses avec méthode toutefois, de porter la voix du peuple au Parlement, afin que ce dernier se penche en retour sur les causes citoyennes et les problèmes des Libanais.
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Égalité des genres
C’est en prévision des prochaines législatives, prévues le 6 mai prochain, que « Li Baladi » a pris son départ, ce 17 janvier 2018. Et présenté à ses nombreux invités et amis son plan d’action, ses objectifs, sa raison d’être et quelques-uns de ses fondateurs. Issus principalement du mouvement Beyrouth Madinati (qui a décidé de ne pas se présenter aux législatives), mais aussi de la société civile, ses membres, « une cinquantaine » déjà selon un de ses fondateurs, Marc Geara, préparent depuis des mois l’échéance électorale. La proportionnelle les y invite. Et ils comptent bien désormais faire pencher la balance. En tant que listes, non pas en tant qu’individus, formées à égalité d’hommes et de femmes ayant les capacités nécessaires. À Beyrouth essentiellement, dans ses deux circonscriptions.
Mais comme une grande partie des Libanais sont déçus de leur classe dirigeante, « Li Baladi » a décidé d’œuvrer activement au sein d’une coalition nationale, qui présentera des listes de candidats à travers le pays. Formée déjà d’une dizaine d’associations, et ce n’est visiblement pas fini, elle sera lancée demain vendredi, à l’espace de travail partagé Antwork, quartier Spears.
Après avoir montré dans une vidéo les déceptions et les attentes de citoyens, l’un des fondateurs du mouvement, Gilbert Doumit, présente « Li Baladi », ses ambitions de résoudre les problèmes des citoyens, de lutter contre le chômage, d’encourager les jeunes à rester au pays... « Si ce n’est pas nous, qui le fera ? » demande-t-il à une assistance enthousiaste. « Si nous voulons bâtir un État, nous devons participer à la vie politique et arriver au Parlement », martèle-t-il.
À son tour, Nayla Geagea se lance. Elle montre, chiffres à l’appui, fournis par le Centre libanais pour les études politiques, les échecs à répétition du Parlement actuel qui s’est autoprorogé deux fois depuis 2009. « Redonner au citoyen sa dignité, assurer la stabilité de la société et conduire des réformes économiques et sociales sont les trois principes de base du projet du mouvement », explique-t-elle. La militante insiste sur la nécessité de développer les infrastructures, de trouver des solutions aux « trois factures » payées par les citoyens, pour l’eau et l’électricité, plus particulièrement. « On n’en peut plus d’entendre la classe politique se lancer des accusations de corruption, sans réagir », poursuit-elle. La jeune femme n’hésite pas à qualifier de « farce » l’adoption de la grille des salaires à différents secteurs, sans oublier les taxes adoptées par le Parlement « à la va-vite, sans aucune étude préalable ». À notre niveau, « une stratégie de travail sera adoptée, de même qu’une politique d’impôts saine et transparente », promet-elle. « Nous allons surtout prendre les besoins en considération. »
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Chaque voix fait la différence
Les interventions sont courtes et claires. Pas question d’ennuyer le public. Mais plutôt de l’interpeller, de le pousser à la réflexion. « La loi électorale n’est pas idéale, elle représente en revanche une chance pour nous, non seulement de percer, mais d’opérer un changement de l’équation politique », souligne ensuite Tarek Ammar. « Chaque voix compte et fait la différence », insiste-t-il, certain que la proportionnelle poussera les électeurs à voter. « Nos listes sont des projets, des causes », poursuit-il, rappelant que Li Baladi, « ce sont des listes, alors que ses adversaires ne sont que des individus ». Il annonce au passage qu’en mai prochain, 650 000 électeurs voteront pour la première fois. « Nous avons confiance dans la jeunesse. Nous connaissons ses choix », assure-t-il.
Le mouvement semble avoir appris des erreurs passées de la crise des déchets. Le cofondateur évoque les rumeurs qui avaient alors sali la société civile. « Ils ont dit que nous ne nous entendions pas. Mais nous sommes tous là, aujourd’hui, pour travailler ensemble. Nous avons gagné en expérience, en programme, en stratégie », affirme-t-il. Parmi les fondateurs de Li Baladi, on dénombre en effet, outre les personnes déjà citées, Nada Sehnaoui, Ihab Hammoud, Walid Alami, notamment. Quant aux membres de la coalition présents, on compte le cinéaste Lucien Bourjeily et l’intellectuel Youssef Mortada, parmi tant d’autres. Également présente, Joëlle Abou Farhat Rizkallah, représentant Women in Front, accompagnée de candidates aux élections.
C’est à Yorgui Teyrouz, fondateur de l’association Donner sang compter, qu’est revenu le mot de la fin. « Li Baladi » a besoin de bénévoles, de chercheurs, d’experts juridiques, de spécialistes en communication, d’équipes logistiques… avant, pendant et après les législatives, lance le militant. Car le mouvement est parti pour durer, promet chacun.
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Inchallah khair!
17 h 07, le 18 janvier 2018