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Liban - Promotion 1994

Promotion 1994 : la querelle s’envenime entre les lieutenants de Aoun et de Berry

Ali Hassan Khalil se gausse des propos du ministre de la Justice sur le caractère définitif du point de vue du département de la législation et des consultations.

Un nouveau chapitre s'est ouvert hier dans l'épisode de la crise entre le chef de l'État, Michel Aoun, et le président du Parlement, Nabih Berry, autour du décret adopté le 19 décembre dernier par le Conseil des ministres sur l'octroi d'un an d'ancienneté à la promotion 1994 des officiers de l'École militaire. Le département de la législation et des consultations au sein du ministère de la Justice a émis récemment un avis selon lequel le ministre des Finances n'a pas qualité à signer ledit décret aux côtés du président de la République et du Premier ministre, confinant ainsi la nécessité du contreseing édictée par la Constitution au seul ministre de la Défense.

Bien que l'avis n'ait été annoncé qu'avant-hier, il convient de noter que le département de la législation et des consultations l'avait rendu il y a deux semaines, sur une requête présentée par le ministre de la Justice, Salim Jreissati, le 22 décembre dernier, soit seulement trois jours après la signature en Conseil des ministres du décret litigieux. La décision de l'instance vient corroborer l'avis du président Aoun selon lequel le décret ne nécessite pas la signature du ministre des Finances, puisqu'il n'engage pas de répercussions financières. Le chef du législatif affirme, au contraire, que ce décret doit impérativement comporter le contreseing de ce ministre.

Le département de la législation et des consultations, composé de sept magistrats et présidé par la juge Marie-Denise Méouchy, a adopté littéralement un arrêt rendu en 1991 par le Conseil d'État, en vertu duquel la juridiction administrative a considéré, dans un cas identique, que « le ministre des Finances ne peut participer à la signature » d'un tel décret, et qu'« il n'existe nulle part dans la Constitution ou dans les lois et règlements un texte qui fait du ministre des Finances un tuteur ou un contrôleur des actes des autres ministres ». « Chaque ministre est la première et dernière référence de son ministère, et le ministre des Finances ne participe pas à l'exercice de ses compétences pour que ses décisions soit légales et exécutoires », insiste l'arrêt.

 

(Lire aussi : L'enjeu caché de la bataille du décret d'ancienneté)

 

« Violation de la Constitution »
L'avis du département a aussitôt embrasé le conflit entre les camps berryiste et aouniste. De Téhéran où il se trouve pour la conférence des Parlements islamiques, le président de la Chambre a réagi en décrivant l'avis comme « une consultation sur demande ». Dans le même esprit, le ministre des Finances, Ali Hassan Khalil, a indiqué, dans un tweet, que « si, en 1991, l'arrêt du Conseil d'État a décrété la non-nécessité de la signature du ministre des Finances, il y a, à l'opposé, un autre jugement du Conseil d'État (1992) selon lequel ce ministre doit signer tous les décrets qui produisent de manière directe ou indirecte des conséquences financières ». Il a en outre estimé que « les prétextes pour couvrir la violation de la Constitution créent de nouvelles problématiques et accroissent l'embarras de ceux qui les recherchent », ajoutant : « Nous n'avons pas besoin de demande sur mesure. »

Ce à quoi le ministre de la Justice, Salim Jreissati, a répliqué en s'interrogeant, dès sa sortie de la réunion du bloc parlementaire du Changement et de la Réforme : « De quelle demande sur mesure parlons-nous ? Est-ce nous qui avions jugé, en 1991, que le ministre des Finances n'est pas un tuteur des autres ministères, en application de la Constitution ? » En réponse à l'allusion à la violation de la Constitution, M. Jreissati a jugé que « de tels propos sont dangereux », soulignant que « le président de la République a toujours été le protecteur de la Loi suprême ».

Revenant à la charge sur Twitter, le ministre des Finances a affirmé, en parlant de M. Jreissati, que « la dernière trouvaille d'un certain ministre est que la commission qu'il a consultée est la plus haute instance judiciaire ». « Que personne ne cherche à nous intimider. Il serait préférable que le ministre dise qu'il ne souhaite plus parler de la Constitution. Mais il ne peut pas prétendre faire taire les avis qui sont contraires à ses fatwas. »

 

(Lire aussi  : Le décret d'ancienneté pose le problème de l'application de Taëf...)

 

 

« Débat clos »
Contacté par L'Orient-Le Jour, M. Jreissati a souligné que pour lui, en tant que ministre de la Justice, ainsi que pour le bloc du Changement et de la Réforme dont il fait partie, « le débat constitutionnel et juridique est définitivement clos ». « L'avis du département de la législation et des consultations est parfaitement circonstancié et motivé », a-t-il ajouté, indiquant qu'« il s'appuie sur une jurisprudence bien établie ».

Une source judiciaire, consultée par L'OLJ, indique, pour sa part, que l'avis de l'organe juridique au sein du ministère de la Justice n'est pas contraignant, mais il constitue une base de référence importante pour de nombreux organismes publics qui, devant un problème déterminé, y recourent. Cette source ajoute toutefois que si la partie requérante ne veut pas s'y conformer, elle devra assortir son refus de motifs.

À présent que pour le ministre de la Justice, « la messe est dite », selon ses propres termes, y aurait-il une autre possibilité de recours contre le décret d'ancienneté ? M. Jreissati répond à L'OLJ par l'affirmative. « Toute personne qui se considère lésée par le décret peut le contester en introduisant une requête en ce sens auprès du Conseil d'État. »

Sur un plan politique, il estime que si l'autre camp veut trouver une solution, « il ne reste au ministre des Finances qu'à signer le décret de promotion, celui-ci nécessitant son contreseing ». Et de préciser : « Il y a quelques jours, ce décret a été envoyé à M. Khalil mais il l'a renvoyé au secrétariat général du Conseil des ministres sans le signer. Nous l'exhortons donc à le récupérer en vue de le faire. »

Or jeudi dernier, M. Berry avait transmis au chef du gouvernement, Saad Hariri, un message qui, selon certaines informations, propose une autre solution à savoir la fusion, dans un seul texte, des deux décrets de l'ancienneté et de la promotion de militaires, ce qui renverrait de facto les deux textes chez le ministre des Finances. Selon des sources informées, sachant que le président de la République rejetterait une telle proposition, ce document serait resté entre les mains de M. Hariri, qui, pourtant, fournit de gros efforts pour remédier à la crise.

 

 

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commentaires (5)

LES LIEUTENANTS DES GENERAUX COQ ET GOUPIL !!!

LA LIBRE EXPRESSION

19 h 14, le 17 janvier 2018

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Commentaires (5)

  • LES LIEUTENANTS DES GENERAUX COQ ET GOUPIL !!!

    LA LIBRE EXPRESSION

    19 h 14, le 17 janvier 2018

  • a le voir-pas a l'ecouter - jreissati fait penser a un des chefs indiens d'amerique qui, pr clore un sujet disait : J'AI DIT ! sur sur qu'il sait etre applaudi par cette horde de sympathisants. Grand Bien leur fasse !

    Gaby SIOUFI

    10 h 30, le 17 janvier 2018

  • Deux soi-disant "ministres de..." qui trouvent le temps de s'invectiver chaque jour pour une affaire datant de 1994...!...par tweets interposés, alors que tant de problèmes urgents attendent des solutions, c'est ainsi qu'ils envisagent leurs fonctions ? Et les deux "présidents de..." qui sont à l'origine de cette mascarade avant tout pour une question de fierté personnelle, ne se rendent-ils plus compte combien tout cela est vain et ridicule ? Et après cela on s'étonne que la communauté internationale se détourne du Liban et se fasse tirer l'oreille pour nous aider ? Irène Saïd

    Irene Said

    08 h 46, le 17 janvier 2018

  • je ne suis pas dupe, ils ne s'entretuent pas. Juste un peu de testosterone pour montrer que chacun defend la justice, le droit, l'equité, etc....bla bla bla bla.... pendant ce temps, les poches se remplissent et les tiroirs s'ouvrent devant vous pour que vous y versez votre dîme... je voterais, c'est sur, et surement pas pour eux

    George Khoury

    08 h 05, le 17 janvier 2018

  • GOUPIL VEUT S,INSTITUER CHEF SPIRITUEL SUPREME ET NON SEULEMENT... CAD UNE SORTE DE FAKIH PAR PROCURATION ... SUR TOUS LES CHOIX, DECISIONS ET ACTES DE LA REPUBLIQUE LIBANAISE ! REFUSÉ !

    LA LIBRE EXPRESSION

    07 h 56, le 17 janvier 2018

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