Un fait pas si divers...
Une nouvelle menace pèse désormais sur les Libanais et elle n'est pas liée aux dangers sécuritaires, ni aux problèmes sociaux, et encore moins à la situation régionale et aux risques d'une nouvelle agression israélienne. Non, il s'agit de ces contraventions qui apparaissent soudain dans nos vies et dont le montant va de 100 000 LL à un million de livres et plus. Cela commence par un appel du commissariat où un préposé affirme qu'il y a une contravention qui fait l'objet d'une décision judiciaire. Par conséquent, il faut la régler dans un délai d'une semaine. Inutile de chercher à discuter, le malheureux préposé n'a qu'une phrase à la bouche qu'il répète sans se lasser : « Il faut venir au commissariat, sinon c'est le tribunal pénal. » Inutile aussi de chercher à avoir des explications convaincantes. Il s'agit généralement d'anciennes contraventions qui remontent à un minimum de 5 ans et peuvent parfois avoir 15 ans d'âge. Elles n'apparaissent pas lorsque vous réglez la taxe mécanique, mais par contre elles dépendent de la bonne volonté du préposé qui en a un tas devant lui et décide soudain de commencer à contacter ceux qui les ont reçues. Vous pouvez avoir entre-temps changé de voiture ou même être mort, la loi c'est la loi, et la direction de la circulation au ministère de l'Intérieur et aux FSI a une mémoire d'éléphant pour ce qui concerne ces contraventions. On peut effacer de votre casier judiciaire un crime, adopter une loi d'amnistie générale pour les attentats les plus horribles, ou même obtenir une grâce présidentielle pour une infraction grave, mais les contraventions de circulation, elles, survivent à tous les régimes et toutes les lois. Elles ne sont même pas passibles de prescription, comme les crimes de droit commun. Vous avez beau contester, crier ou tenter de vous y opposer, rien n'y fait. Il faut passer à la caisse, sinon, si vous essayez de voyager, vous serez arrêté à l'aéroport. Bien entendu, vous n'êtes pas Chadi Mawlaoui pour pouvoir passer les frontières sans être inquiété, et vous êtes sans doute plus dangereux aux yeux des autorités libanaises... qui visiblement se soucient avant tout de remplir leurs caisses.
Vous n'avez donc pas d'autre choix que d'aller au commissariat. Et là, c'est un nouveau choc qui vous attend. D'abord, ils sont à plusieurs dans une petite salle, avec un téléphone qui n'arrête pas de sonner, quelques Syriens qui discutent pour que leurs papiers leur soient rendus et une télé qui hurle toute seule. Un jeune homme désarmant finit par s'intéresser à vous. Il sort sa liasse de convocations et l'air complètement dépassé avoue qu'il ne fait qu'exécuter la mission. Impossible de chercher à discuter ou d'obtenir des détails. « La contravention date de 2009. Il s'agit d'un stationnement interdit, dit-il laconiquement », avant d'ajouter : « Estimez-vous heureuse, j'ai des contraventions qui datent de 2002. » Comment une contravention a-t-elle pu rester dans les tiroirs de l'État pendant toutes ces années, sans que vous ayez reçu une notification et sans qu'elle apparaisse au cours des formalités de la taxe mécanique ?
Toutes ces questions n'intéressent pas le préposé qui se contente de vous conseiller de payer l'amende et de protester après. Si vous en avez le courage. Car la procédure de protestation risque elle aussi de prendre des années et les possibilités de remboursement sont minimes. Comme par hasard, les contraventions sont toutes anciennes pour que votre mémoire vous trahisse, et, même si le préposé n'a aucune preuve à vous avancer, vous devez vous taire et exécuter. C'est apparemment le nouveau moyen trouvé par l'État pour arnaquer ses citoyens. L'idée est géniale, surtout que vous croyez en avoir fini, mais, deux mois plus tard, une autre ancienne contravention peut apparaître et ainsi de suite. C'est une source intarissable de fonds, d'autant que, par lassitude et dégoût, les citoyens finissent par payer... Comme toujours.
commentaires (7)
J'habitais à Montréal en 1992 et je suis retourné au Liban avec 2 voitures achetées... À mon retour au Canada en 2002, achat nouvelles autos, et, quelle ne fut ma surprise d'être arrêté par la police (ils scannent au hasard votre No d'immatriculation) et de saisir mon auto, car il y avait 2 contraventions pour parking interdit datant de 92, de 50 $ chaque impayées où il y avait avis de poursuites après 2 ans et dont le montant à payer, avec intérêt, pénalités et frais de cour s'élevaient à 1500 $, à payer tout de suite, sinon 3 jours de prison et auto saisie indéfiniment... Aucun autre recours possible... La loi est la loi... Au moins, au Liban, vous n'avez pas les intérêts et autres ennuis ( ha,ha) Mais, en fait, que compare-t-on?
Saliba Nouhad
18 h 28, le 28 octobre 2017