Une nouvelle fois, le député Nehmetallah Abi Nasr monte au créneau, fustigeant la non-application par le ministre de l'Intérieur, Nouhad Machnouk, de la décision du Conseil d'État de retirer la nationalité libanaise aux personnes l'ayant obtenue par décret en 1994, mais « qui ne la méritent pas ». Dans un communiqué qu'il a publié hier, M. Abi Nasr estime que « cette obstination du ministre de l'Intérieur » à ne pas appliquer la décision prise en 2003 par le Conseil d'État traduit « une perpétuation de la politique de manipulation de la démographie du pays et de l'équilibre confessionnel, au profit d'une confession ou d'une communauté religieuse, mais au détriment des autres communautés ».
Le décret de naturalisation de 1994 avait accordé la nationalité libanaise « à près d'un quart de million d'étrangers, dont moins de 20 % étaient de confession chrétienne », affirme le député du CPL à L'Orient-Le Jour. « Sous couvert d'un statut de sans-papiers ou de statut en cours d'étude, non moins de 75 000 Palestiniens ont été naturalisés à l'instar de ressortissants de 104 pays, parmi lesquels des criminels et des détenus. C'est de l'implantation en bonne et due forme. Un véritable scandale ! », dénonce-t-il, insistant sur le caractère anticonstitutionnel de cette naturalisation massive, jamais soumise en Conseil des ministres mais prononcée par décret. « Aucune naturalisation ne peut pourtant se faire sans un projet de loi dans ce sens », martèle le député.
Vu le manque de réactivité dans ce dossier, le député Abi Nasr, qui est également avocat de la Ligue maronite, promet d'interpeller le gouvernement dans les prochains jours, « vendredi ou samedi probablement, aussitôt après l'étude du budget », et d'adresser une question au ministre de l'Intérieur, Nouhad Machnouk, par le biais du président de la Chambre, Nabih Berry.
(Pour mémoire : Aoun à l'ONU : Non à la naturalisation des réfugiés et des déplacés au Liban)
« Appliquez la décision ou démissionnez ! »
Rappelant les différentes étapes de la procédure, Nehmetallah Abi Nasr explique que le recours en invalidation a été présenté par la Ligue maronite en juin 1994, juste après l'adoption du décret de naturalisation par le gouvernement du Premier ministre assassiné Rafic Hariri. Neuf ans plus tard, le Conseil d'État prononce l'arrêté en faveur duquel le décret de naturalisation doit être épuré. Près de 56 000 dossiers sont alors transférés à une commission formée de juges à la retraite et d'officiers. Mais rien ne se passe. Aucun retrait de naturalisation. « Qu'ont fait les sept ministres successifs de l'Intérieur de la décision du Conseil d'État, à part créer de nouvelles commissions ? » demande M. Abi Nasr. La question adressée par le député au Premier ministre, Saad Hariri, en 2010, ne change rien à cet immobilisme.
Les choses ont semblé bouger quelque peu en 2011, lorsque l'ancien chef de l'État, Michel Sleiman, a signé un décret de retrait de la nationalité à quelque 200 personnes. Après avoir suscité de l'espoir, les choses en restent là. Plus de 6 000 dossiers de naturalisation étaient pourtant entachés d'irrégularités et devaient être annulés. « Si l'État continue de ne pas obéir au Conseil d'État après 23 ans, la Ligue maronite envisage de demander des dommages et intérêts », assure l'avocat, estimant « inadmissible que le ministre de l'Intérieur n'applique pas la décision de la plus haute autorité de l'État ». Dans un message à Nouhad Machnouk, il conclut : « Appliquez donc l'arrêté du Conseil d'État ou démissionnez ! »
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16 h 48, le 18 octobre 2017