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À La Une - Reportage

En Dominique, les habitants restent stoïques dans le chaos le plus total après Maria

"Ici, c'est chacun pour soi, personne ne vient nous aider. C'est de la survie".

Une femme inspecte sa maison complètement ravagée par l'ouragan à Roseau. Lionel CHAMOISEAU/AFP

Un peu moins d'une semaine après le passage de l'ouragan Maria, le chaos le plus total persiste sur l'île de la Dominique, entre routes coupées, destructions et ruptures d'approvisionnement, des conditions extrêmes pour les habitants qui gardent malgré tout leur calme.
Les montagnes de cette île indépendante anglophone, surnommée "l'île nature" dont les flancs d'ordinaire vert émeraude attirent les amoureux de paysages luxuriants, sont comme pelées et ont bruni sous le souffle de Maria. L'oeil de l'ouragan est passé sur l'île quand il était au plus fort, en catégorie 5, avec des vents à 260 km/heure, faisant au moins 15 morts.

Un temps totalement coupée du monde, la Dominique a repris vendredi les rotations maritimes avec la Guadeloupe et la Martinique, départements français séparés de ses côtes par la mer des Caraïbes.
Sur le bateau parti de Pointe-à-Pitre, les passagers se pressent sur le pont pour évaluer les dégâts: un toit envolé, un pan de colline effondré sous la violence de la pluie...

Jean-Luc Royer est venu avec son casque d'élagueur, une bâche et des pastilles pour stériliser l'eau afin d'aider sa famille qui l'a contacté par radio. Au port commercial de Roseau, seul opérationnel dans l'île, quelques personnes attendent, l'air las, de pouvoir quitter la Dominique et s'enquièrent de la situation des îles voisines.
Les nombreux taxis qui d'habitude hèlent les arrivants ont disparu: la circulation est presque impossible avec des routes encombrées d'amas de fils électriques, de tôles et de bois, voire effondrées, et l'essence se raréfie. Des files de piétons charrient des sacs de vivres ou de l'eau puisée dans l'une des nombreuses sources insulaires.

Dans le ciel, des hélicoptères de toutes tailles survolent le territoire. Au sol, on croise des soldats néerlandais, saint-luciens, l'équipe des Nations Unies, des secouristes vénézuéliens, des pompiers martiniquais...

Il n'y a plus d'eau, plus d'électricité, presque plus de réseau télécom, le stade est un héliport et l'hôpital est partiellement détruit. Un couvre-feu est instauré de 16H00 à 08H00 du matin. Une équipe de Médecins sans Frontières est venue d'Haïti évaluer les besoins : de nombreuses chambres ont été détruites tout comme l'unité de soins intensifs. Des blessés de Maria, amenés par des militaires, sont soignés dans les couloirs, intacts.

(Lire aussi : "Rasée, rasée, rasée. Ma maison, complètement rasée")

Malgré la confusion quasi-totale, aucun habitant croisé par l'AFP ne se plaint: "La Dominique est forte, nous nous relèverons !", lance Christina Morancy, une habitante de Newtown, commune défavorisée proche de Roseau.
"Le pays a été entièrement détruit. Les gens sont encore en état de choc, le changement de vie est si soudain", estime le vice-Premier ministre John Collin McIntyre. "90% des bâtiments sont abimés, nous avons beaucoup d'eau mais elle est partiellement polluée et nous avons également besoin de nourriture car notre agriculture a été complètement détruite", énumère-t-il.

'Personne ne vient nous aider'

"C'est cent fois pire qu'Erika (30 morts en 2015, ndlr). Erika était localisée, là, c'est partout. Tout est désorganisé. Des réserves envoyées à la Croix Rouge ont été pillées, les supermarchés ont été pillés... J'ai peur qu'on manque vite de vivres et d'eau", raconte Schnyler Esprit, responsable de la logistique à l'université Dominica State College, une crainte partagée par de nombreux habitants.

A l'entrée de Roseau, un grand entrepôt de matériaux de construction est éventré: des dizaines de personnes se servent en poutres, sacs de ciment et tôles pour tenter d'aller reconstruire ce qui peut l'être.
Contrairement à la Française Saint-Martin, cette île anglophone de 72.000 habitants, indépendante depuis près de 40 ans, est très pauvre et il y a peu de magasins à piller.
"Ici, c'est chacun pour soi, personne ne vient nous aider. C'est de la survie", raconte George Elyzee, 86 ans, dont la maison a été inondée mais a gardé son toit.
"C'est comme si on était en Syrie", se désole Casimir Augustus, président de l'Association des Dominicains de la Guadeloupe, qui découvre les dégâts sur son île. Il est venu voir si sa tante, qui vit à Grand Bay, commune coupée du monde, "est toujours vivante". Malgré les circonstances, il reste optimiste : "il faut revenir dans six mois, vous verrez".

 

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