La bataille d'épuration du jurd de Ersal continue de diviser profondément la classe politique libanaise sur la question du rôle du Hezbollah et de sa propension à faire cavalier seul, sans égard pour l'autorité et la souveraineté de l'État.
Cette question s'est trouvée hier au cœur d'une réunion entre le chef du Parti national libéral (PNL), le député Dory Chamoun, le chef du parti Kataëb, le député Samy Gemayel, et l'ancien ministre Achraf Rifi, au siège du PNL à Sodeco.
Les trois hommes ont dénoncé d'une seule voix l'atteinte à la souveraineté de l'État. « Nous souhaitions voir l'armée libanaise mener cette bataille d'épuration de la région, mais le Hezbollah a été faire une démonstration de force dans le jurd, une mesure applaudie par plusieurs forces politiques », a affirmé M. Chamoun à l'issue de la rencontre.
« Nous voulions que le parti chiite laisse à l'armée libanaise la tâche de mener cette bataille, mais nous avons bien compris que ceux qui dirigeaient les combats ne sont pas libanais », a poursuivi le député du Chouf.
Mais le cadre de la réunion dépasse celui d'une simple discussion autour des derniers développements politiques, militaires et sécuritaires.
Une source bien informée confie ainsi à L'Orient-Le Jour que « les forces d'opposition présentes à cette réunion planchent sur l'élaboration, avec d'autres formations et personnalités indépendantes, d'un plan d'opposition structurée fondé sur deux principes : la souveraineté de l'État, d'une part, et la lutte contre la corruption, d'autre part ».
C'est d'ailleurs le thème de la souveraineté que Samy Gemayel a choisi de développer, lors d'une cérémonie organisée hier à Saïfi à la mémoire de William Hawi, ancien chef du conseil militaire du parti Kataëb, tué en 1976 durant la bataille de Tall el-Zaatar. « Il n'y a pas de substitut à la légalité, à l'autorité étatique et à l'armée libanaise, a affirmé M. Gemayel. À chaque fois que nous avons estimé que nous pouvions abandonner une part de notre souveraineté, nous nous sommes rendu compte que nous avions perdu le pays dans son ensemble, a-t-il souligné. Tout comme nous avons le devoir de défendre le Liban, son indépendance et le monopole de la violence légitime, nous avons également le devoir de protéger le citoyen et l'individu libanais, qui sont au centre de l'idéologie des Kataëb », a-t-il conclu.
(Lire aussi : Au Liban, le vieux clivage sur le monopole de la violence a la peau dure)
« Une mainmise absolue »
À L'OLJ, le conseiller de presse d'Achraf Rifi, Assaad Béchara, souligne la pleine capacité de l'armée libanaise à lutter, seule, contre le terrorisme. Il en veut pour preuve la bataille de Nahr el-Bared de 2007 contre le Fateh el-Islam, rappelant que le secrétaire général du parti, Hassan Nasrallah, avait pourtant posé des « lignes rouges » à la troupe pour la dissuader de nettoyer le camp. « Pourtant, le gouvernement Siniora avait donné l'ordre à l'armée libanaise et aux forces de sécurité de purifier le camp des terroristes, rappelle-t-il. L'armée libanaise, qui n'avait pourtant pas les moyens et les équipements dont elle dispose maintenant, a très bien réussi sa bataille », ajoute-t-il.
Pour Assaad Béchara, c'est le gouvernement « démissionnaire de son rôle » qui assume la responsabilité de « s'être désisté de la souveraineté libanaise » et d'« avoir délaissé son devoir de libération du territoire ». « Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas pris la décision à la place du Hezbollah, au lieu de permettre au parti chiite de faire de la surenchère sur l'armée libanaise ? » s'interroge-t-il.
« Il existe deux armées sur le territoire libanais, une première propre au Hezbollah et qui s'arroge le pouvoir de décision en matière de guerre et de paix, et une seconde qui n'est autre que l'armée libanaise, victime d'une classe politique démissionnaire de son rôle, dénonce M. Béchara. L'élection de Michel Aoun, principal allié du Hezbollah, à la tête de la magistrature suprême était une étape fondamentale dans la domination iranienne
sur le pays, selon lui. Avec la bataille menée par le Hezbollah dans le jurd de Ersal, la mainmise de l'Iran sur notre pays est aujourd'hui absolue », conclut-il.
Pour mémoire
Le tandem Gemayel-Rifi dénonce un « désistement de souveraineté libanaise »
Cette question s'est trouvée hier au cœur d'une réunion entre le chef du Parti national libéral (PNL), le député Dory Chamoun, le chef du parti...
commentaires (4)
LA MAINMISE EST EN FAIT ABSOLUE... LORSQU,ON SE DESISTE DE SON ROLE D,AUTRES OCCUPENT LES LIEUX DESERTES...
LA LIBRE EXPRESSION
18 h 55, le 27 juillet 2017