Rechercher
Rechercher

Économie - Focus

L’envers social de la prospérité britannique

« Un nombre record de personnes ont fréquenté les banques alimentaires l’an dernier » au Royaume-Uni, explique Wanda Wyporska, directrice générale de la fondation Equality Trust. Archives AFP

Le Royaume-Uni bénéficie d'une économie en bonne santé à l'approche des élections, mais cette image flatteuse masque un pays encore inégalitaire après des années d'austérité et qui laisse beaucoup de Britanniques au bord de la route.

Les inégalités dans l'un des pays les plus riches au monde sont au cœur de la campagne des élections législatives, après avoir joué un rôle prépondérant dans le vote pour le Brexit l'an dernier, souvent présenté comme le reflet d'une fracture sociale. Le Parti conservateur de la Première ministre Theresa May n'a de cesse de marteler qu'elle veut promouvoir une société qui marche pour chacun, mais n'entend pas pour autant s'affranchir d'une certaine austérité peu propice aux dépenses sociales. Face à elle, son concurrent travailliste Jeremy Corbyn insiste sur le fossé qui sépare riches et pauvres, faisant de l'aide aux plus démunis une de ses priorités.

Les statistiques économiques officielles suggèrent pourtant que les voyants sont au vert, avec un taux de chômage à 4,6 % et au plus bas depuis 40 ans. Le revenu médian des ménages s'est établi à 26 300 livres (33 657 dollars) au cours de l'année budgétaire achevée fin mars 2016. Ce revenu est désormais au-dessus de son niveau de 2007-2008, mais il cache des disparités criantes : les retraités profitent de meilleures pensions, mais les travailleurs n'ont, eux, pas encore récupéré leur niveau de vie d'il y a dix ans.

 

(Lire aussi : Premier signe d'essoufflement post-Brexit pour l'économie britannique)

 

Bond de 30 ans en arrière
Le centre de recherche The Resolution Foundation estime même que la baisse du niveau de vie des plus pauvres risque de porter les inégalités au niveau de celles de l'époque de Margaret Thatcher, soit un bond de trente ans en arrière. Et, prises ensemble, les 1 000 personnes les plus fortunées du pays seront cette année plus riches que les 40 % des ménages les plus pauvres, a calculé la fondation Equality Trust.
« C'est une économie qui marche pour quelques-uns, non pour le plus grand nombre », prévenait début mai sa directrice générale Wanda Wyporska. « Un nombre record de personnes ont fréquenté les banques alimentaires l'an dernier, des millions sont privés d'un logement décent et deux tiers des enfants pauvres sont dans une famille qui a un travail », explique-t-elle.

Le taux de pauvreté s'établissait à 6,5 % de la population, soit 3,9 millions de personnes, selon des chiffres de 2014 de l'ONS, les derniers disponibles. Pour survivre, nombre de Britanniques, en particulier les plus jeunes, sont contraints d'avoir plusieurs emplois mal payés et souvent peu qualifiés en même temps, un phénomène nommé la « gig economy » (gig signifiant boulot en argot). Plusieurs millions de personnes seraient concernées par cette « économie des petits boulots » et aux contours assez flous, parfois assimilée à une « ubérisation » du marché du travail.

Dans le même temps, le nombre des contrats dits « zéro heure » bat des records à 900 000 emplois. Ils ne garantissent aucun horaire et donc aucune rémunération fixe à l'employé. Conséquence directe, le syndicat TUC a calculé dans une étude que les salaires réels ont reculé durant les sept dernières années, du jamais-vu depuis les années 1860 et 1870, payant le prix de la crise financière et désormais de l'inflation. Selon la secrétaire générale de la TUC, Frances O'Grady, « les travailleurs britanniques ont subi la plus longue période de baisse des salaires depuis l'époque victorienne » et « davantage de souffrance est à prévoir ».

La poussée actuelle de l'inflation est un défi de taille, comprimant surtout le pouvoir d'achat des plus modestes qui ont du mal à boucler les fins de mois, alors même que les conséquences sociales du Brexit sont incertaines.

 

Lire aussi

Le ton se durcit entre Bruxelles et Londres sur la facture du Brexit

Le Royaume-Uni bénéficie d'une économie en bonne santé à l'approche des élections, mais cette image flatteuse masque un pays encore inégalitaire après des années d'austérité et qui laisse beaucoup de Britanniques au bord de la route.
Les inégalités dans l'un des pays les plus riches au monde sont au cœur de la campagne des élections législatives, après avoir joué un rôle...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut