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Liban - Bois des pins

La municipalité de Beyrouth entendra-t-elle les protestations de la société civile ?

Lors d'un sit-in samedi, les associations ont critiqué la mauvaise communication, ainsi que le projet de construction de l'hôpital de campagne controversé sur un terrain du bois.

Le président de Nahnoo, Mohammad Ayoub, s’adressant aux médias.

Le compositeur Zaki Nassif, du temps de la reconstruction après la guerre, chantait la venue « d'un Liban plus vert ». Toutefois, la tendance inverse s'est imposée, comme le prouve l'exemple du Bois des pins. Le conseil municipal de Beyrouth, présidé par Jamal Itani, a pris jeudi la décision de fermer à nouveau le « poumon vert » de Beyrouth suite à la perte de 500 arbres en raison des ravages causés par un insecte qui s'attaque à la pinède.

Seulement voilà, la municipalité n'a pas communiqué sur le sujet jusqu'à ce que l'organisation Nahnoo, présidée par Mohammad Ayoub, ne relaye la nouvelle dans une déclaration à la presse. Un « manque de transparence », a dénoncé Jessica Chemali, militante à Nahnoo, ajoutant que cette affaire fait suite à une série de controverses au sujet de projets de construction au sein du parc.

Un petit comité composé d'activistes de Nahnoo et de Beyrouth Madinati s'est rassemblé devant le siège de la municipalité samedi, pour renouveler leur refus des chantiers qu'ils qualifient d'« illégaux ». De même, ont-ils dénoncé, la décision de fermer le parc a été prise rapidement, avant même la publication du rapport final du Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Des raisons politiques pourraient en outre expliquer ce dialogue de sourds qui semble régner entre la société civile et l'équipe du conseil municipal.

(Pour mémoire : Bois des Pins : quel avenir pour le poumon vert de Beyrouth ?)

 

Fermeture controversée

Contacté par L'Orient-Le Jour, Hagop Terzian, membre du conseil municipal, refuse le ton polémique revendiqué par les associations concernant la fermeture du parc, invoquant la « recommandation du CNRS ». Le problème devrait être traité d'ici à juin, poursuit-il, et va faire l'objet d'une collaboration avec des experts français et italiens. M. Terzian affirme son entier soutien à la cause de la société civile en ce qui concerne l'urgence de la réouverture du site. « Il faut évidemment rappeler au public que le bois n'a pas été ouvert pour être fermé à nouveau », dit-il.

Néanmoins, les membres de Nahnoo ne l'entendent pas de cette oreille. Jessica Chemali affirme que l'association a découvert récemment « que la décision de fermeture n'est pas basée sur les recommandations du CNRS, comme l'a proclamé la municipalité ». L'activiste se base sur un entretien avec Mouïne Hamzé, secrétaire général du CNRS, lequel assure que ses « propos ont été déformés ». En réalité, seul un rapport préliminaire a été publié dans lequel les experts ont éventuellement envisagé la possibilité de fermer le parc, sans avoir toutefois complété le rapport final.

Autre décision vivement critiquée par Nahnoo, le manque de communication sur la fermeture : « Le parc a été fermé sans que la municipalité n'en informe le public ! C'est l'organisation Nahnoo dans une déclaration de presse qui a informé le public, ce qui a embarrassé la municipalité qui a communiqué ensuite sur la fermeture », a expliqué Jessica Chemali.

(Pour mémoire : Le Bois des pins fermé « pour le traitement d'arbres malades »)

Ingérences politiques

La nouvelle fermeture du parc n'est pas la seule raison des protestations. Depuis plusieurs mois, la construction d'un hôpital de campagne sur un lot du terrain fait débat. Cet hôpital était une installation militaire fournie par l'Égypte lors de la guerre de 2006, mais gardée depuis à l'Université arabe de Beyrouth pour la distribution de médicaments. Dans une décision très controversée, l'ancien conseil municipal a décidé de le placer sur un terrain de parking du bois.

Mona Fawaz, membre de Beyrouth Madinati, a précisé quant à elle certains faits juridiques à ce propos : « L'ensemble du Horch tombe dans la région n° 9. Cette région est dite non aedificandi, une locution latine signifiant qu'aucun nouvel édifice ne peut y être construit. Seule opportunité pour la municipalité de forcer la main : changer le zonage, ce qui serait très dangereux étant donné qu'il ne reste pas beaucoup d'espaces protégés dans la ville. »

Mais selon les officiels, le projet de l'hôpital est une nécessité d'ordre social pour pallier le mauvais accès aux soins des populations pauvres de la zone. « C'est une question d'équilibre entre l'humanité et le vert », a déclaré Hagop Terzian. « La municipalité est à la recherche d'un autre espace plus convenable pour placer ce qui n'est pas à proprement parler un hôpital », a-t-il soutenu.

Pour sa part, Mona Fawaz ne fait pas assumer la responsabilité de tous ces problèmes aux élus municipaux. « Ils sont d'accord avec nous et je pense qu'ils sont compétents, dit-elle. Le problème c'est qu'ils sont élus par le biais de partis et qu'ils doivent suivre leurs dirigeants. » Ce discours est confirmé par Jessica Chemali : elle rapporte que Nahnoo a constaté « plusieurs ingérences du ministre de l'Intérieur Nouhad Machnouk, également député du courant du Futur, auprès des élus de la municipalité concernant le Horch ». « Le conseil municipal devrait être autonome, administrativement et financièrement », a-t-elle insisté.

Au sujet de l'hôpital, Mona Fawaz a estimé que « ces ingérences prennent la forme de pratiques clientélistes ». « Il s'agit surtout d'intérêts électoraux et non pas financiers, on cherche à coopter une population qui devrait avoir droit à la couverture santé universelle, dénonce-t-elle. Au lieu de cela, des combines sont mises en place, comme la création d'un hôpital décentralisé. »

 

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