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Liban - Urbanisme

Une campagne civile dénonce trois empiétements majeurs au Bois des Pins

La construction de l'hôpital de campagne a recommencé ; la mise en place d'un stade municipal est envisagée ; les abus par les scouts al-Rissala ont été régularisés...

Une vue du chantier qui a repris au Bois des Pins, avec des installations en béton. Photo tirée de la page Facebook de Nahnoo

Le public n'a pas eu le temps de se réjouir de l'ouverture (partielle) du plus grand espace vert de Beyrouth, le Bois des Pins, qu'il se soucie déjà de la perte de milliers de mètres carrés de ce poumon de la capitale en faveur d'autres projets. Les informations divulguées hier par l'association Nahnoo, dans une conférence de presse tenue avec d'autres mouvements de la société civile, sont alarmantes : trois empiétements majeurs sont prévus sur ce territoire de 30 hectares.

Mohammad Ayoub, président de Nahnoo, explique à L'OLJ que ces trois projets sont celui, déjà décrié, de l'hôpital de campagne, dont l'installation est prévue sur un espace de parking du bois, la construction d'un stade municipal, un projet aux contours encore flous, et une régularisation d'abus par les scouts al-Rissala, sur plus de 3 000 mètres carrés.

À la conférence de presse de la campagne « Le Bois des Pins est à tout le monde », tenue devant la porte principale du bois, étaient notamment présents des membres du conseil municipal mécontents de pareilles décisions, comme Imad Beydoun, d'anciens candidats aux municipales de la capitale, comme Ghada Yafi, et plusieurs mouvements de la société civile : outre Nahnoo, il y avait Beyrouth Madinati, le collectif « Nous demandons des comptes », le collectif « Pour la République », le Courant de la société civile, le Mouvement pour la citoyenneté et l'Union de la jeunesse démocratique.

Mohammad Ayoub déplore donc que la construction de l'hôpital de campagne ait recommencé. L'affaire liée à cet hôpital avait éclaté en juin dernier : cette structure itinérante avait été financée par l'Égypte à l'issue de la guerre israélienne contre le Liban en 2006. Elle avait opéré au Sud puis est passée de région en région, jusqu'à arriver à Beyrouth en 2014, mais aucun emplacement définitif ne lui avait été consacré, jusqu'à la proposition du Bois des Pins. À l'époque, les militants avaient noté l'absurdité de cette décision de consacrer une partie d'un espace vert si longtemps interdit aux Libanais à une structure qui, théoriquement, peut être installée ailleurs (à supposer qu'une capitale qui n'est pas en état de guerre ait besoin d'un hôpital de campagne).

Hier, Mohammad Ayoub déplorait « la reprise des travaux et l'installation de piliers en béton à cet endroit ». « Quand nous leur posons la question, ils assurent que la structure est amovible et que seules les bases sont en béton, dit-il. Cela paraît difficile à croire quand on voit les constructions sur place. Que veulent-ils dire par amovible : qu'ils peuvent en retirer le toit ? » L'hôpital s'étendra sur 1 550 mètres carrés.

Interrogé sur la question par L'OLJ, Imad Beydoun explique que la construction de cet « hôpital » (plus exactement un centre de distribution de médicaments gratuits), qui avait été décidée par l'ancien conseil municipal, avait temporairement été gelée par l'actuel (les structures étaient même démantelées). « C'est depuis quelques jours seulement que nous avons constaté la reprise des travaux, dit-il. Quand j'ai essayé de m'informer auprès du conseil, et que nous avons porté la question au mohafez Ziad Chbib, celui-ci a argué qu'il ne faisait qu'appliquer les décisions du conseil. Nous avons alors insisté pour une annulation en bonne et due forme de l'ancienne décision, mais le président du conseil, Jamal Itani, a demandé quelques jours pour consulter ses instances politiques de référence. » Il dit craindre que cela ne soit « que des atermoiements », et prône la vigilance.

 

Un stade municipal dans le bois
L'hôpital de campagne, dont l'emplacement n'a pas été modifié malgré la controverse, n'est pas le seul empiétement prévu sur le territoire du Bois des Pins. Le conseil municipal de la capitale, élu en mai dernier, envisage aussi de construire un stade municipal, sacrifiant ainsi des milliers de mètres carrés (la superficie exacte n'est pas encore connue), selon Mohammad Ayoub. « Quand nous avons voulu protester contre cette décision, les responsables municipaux ont tout simplement... proposé d'organiser une rencontre avec les sociétés en charge de la conception du projet, dit-il. Ils essaient de gagner du temps, c'est visible. » Or, selon le militant, le conseil municipal n'a tout simplement pas le droit de toucher à ce site. « Le Bois des Pins est classé site naturel en vertu d'une loi de 1939, affirme-t-il. Du fait que le classement a été fait en vertu d'une loi qui interdit tout aménagement sur ce territoire, une entorse à ce règlement nécessite une intervention du Parlement, ce qui n'a pas été le cas. »

Qu'en est-il de ce stade ? M. Beydoun en retrace l'historique un peu compliqué : au temps d'un ancien conseil municipal, présidé par Abdel Menhem Ariss, un terrain de football avait été asphalté dans le bois pour accueillir les joueurs. Un peu plus loin, à Tarik Jdidé, un stade municipal était pratiquement délaissé. L'ancien président du conseil municipal Bilal Hamad a pris la décision de déplacer ce stade municipal à l'intérieur du bois, à la place du terrain déjà existant, tout en transformant l'ancienne structure de Tarik Jdidé en espace vert.
« Le projet a du bon, puisque ce quartier profitera de cet espace vert et que le terrain existe déjà dans le bois, souligne M. Beydoun. Ce à quoi nous nous opposons, c'est que le projet de Hamad inclut des constructions en plein bois, qui n'ont pas lieu d'exister. On doit revenir à l'installation d'un simple terrain sans autre structure. C'est ce pour quoi nous nous battons. »

Troisième empiétement en vue : un changement de zoning sur une parcelle de 3 365 mètres carrés... au profit des scouts al-Rissala. Le président de Nahnoo explique que cette organisation avait, durant les années de guerre (1975-1990), occupé illégalement une partie du bois pour y mener ses activités. « Au lieu de mettre fin à ces irrégularités, le conseil municipal décide aujourd'hui de les consacrer, au détriment du Bois des Pins », déplore-t-il. Le conseil municipal a classé cette zone type 4, « en d'autres termes, on peut même y bâtir des tours ! » selon lui. Imad Beydoun précise que « cette décision a été prise en catimini il y a deux semaines, et c'est dommage ».
Face à des perspectives aussi sombres, la société civile ne compte pas rester les mains croisées, assure Mohammad Ayoub. « Si le conseil municipal ne revient pas sur ces décisions, nous descendrons dans la rue », dit-il.

Le Bois des Pins est ce qui reste des pinèdes qui recouvraient jadis une grande partie de Beyrouth. D'une superficie de 30 hectares, cet espace vert, le principal dans le périmètre de la capitale, avait été presque entièrement décimé en 1982, lors de l'invasion israélienne. À partir de 1992, un programme lancé à l'initiative du conseil régional d'Île-de-France réussit à réhabiliter le bois et à le transformer en espace vert urbain. Étant donné le fait que Beyrouth est particulièrement pauvre en jardins de toutes sortes, les décisions du conseil municipal sont d'autant plus surprenantes et inacceptables.

 

 

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Il manque un quatrième empiétement, une piste pour les voitures des fils des nouveaux riches qui ne trouvent pas une piste digne de leurs voitures Rools Royce, Bugatii, Lamborghini, Ferr

Un Libanais

18 h 42, le 21 janvier 2017

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Commentaires (1)

  • Il manque un quatrième empiétement, une piste pour les voitures des fils des nouveaux riches qui ne trouvent pas une piste digne de leurs voitures Rools Royce, Bugatii, Lamborghini, Ferr

    Un Libanais

    18 h 42, le 21 janvier 2017

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