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Culture - Exposition

Ziad Abillama : Je suis plus Einstein qu’Oppenheimer

Fiction, entreprise scientifique et identité de l'homme de science : c'est ce rapport que s'attache à démontrer cet « artiste physicien » dans sa nouvelle exposition « The Twisted Wing of the Airplane King », à la galerie Saleh Barakat.

Les objets culturels de Ziad Abillama.

Depuis 1992, Ziad Abillama étudie le fantasme de la science occidentale pour l'Orient. « J'ai l'impression que l'Occident construit un imaginaire filmique et développe des guerres où les corps ne sont pas valorisés », affirme-t-il, en poursuivant : « Comme si l'on pouvait, pour les besoins de rendre la guerre acceptable, escamoter la question de la souffrance de la chair. Les gens ont l'impression que faire la guerre c'est comme un film où l'on en ressortirait grandi, victorieux, or ce n'est pas le cas. Les soldats qui reviennent de la guerre sont détruits. Mais c'est quelque chose que l'Occident ne veut pas dire. »

L'artiste s'intéresse particulièrement aux liens Orient-Occident depuis le XIXe siècle. « Flaubert parle de l'Orient comme d'une femme que l'on peut séduire, indique-t-il. Et par le biais de cette femme, il pense maîtriser cette culture qu'il ne connaît pas. Je crois que, même si l'on trouve les affirmations de Flaubert plutôt monstrueuses, c'est mieux que de prétendre que le corps n'existe pas, que ces gens que l'on tue sont en fait de pures abstractions. Flaubert rêve l'Orient à partir de sa propre libido. Et je ne parle pas uniquement en tant que personne orientale », se défend Ziad Abillama.

L'exposition s'inspire des formes aérodynamiques étudiées par Serge Dassault pour rendre ses avions plus performants. « J'ai voulu montrer comment cet imaginaire guerrier occidental se reproduisait dans des objets usuels, révèle l'artiste. Il me semble qu'il y a une esthétique de l'aérodynamique qui s'est emparée de toutes sortes d'objets de design. »

D'ailleurs, le trio d'œuvres qui accueillent le visiteur dès l'entrée sont ce que l'artiste appelle des « objets culturels ». « Ils sont faits pour piéger le spectateur, pour qu'il voit qu'il a été conditionné d'une certaine manière, qu'il trouve beau un certain format, un certain packaging de l'identité occidentale. La sculpture, illustrant le carton d'invitation, opère de la même manière. Quand on la voit, on a l'impression d'un avion furtif, une œuvre absolument symétrique. Le défi était de ne pas enlaidir le masculin, mais de se retrouver dans une logique désarmée. »

Ziad Abillama joue aussi avec les fragilités. « Certains objets sont en équilibre très précaire. Si on les bouge un peu, si l'on dégonfle la chambre à air, ils tombent, indique l'artiste. J'ai fait des études en sciences physiques, donc il y a des résonances dans mon travail. Je suis plus Einstein qu'Oppenheimer. Je préfère les belles histoires d'Einstein. Il y a une sorte de jubilation de quelque chose qui n'est pas du tout scientifique et qui est fait pour séduire. J'aime cette idée de quelque chose qui ne sert à rien, mais qui remet en question des idées établies. »

Jusqu'au 18 mars, à la galerie Saleh Barakat, rue Justinien. Horaires d'ouverture : du lundi au samedi, de 12h à 19h.

 

 

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