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Liban - Biens-fonds maritimes

Les travaux toujours en cours à Ramlet el-Baïda, la polémique enfle

Le mohafez de Beyrouth indique à « L'OLJ » que le permis suspendu par le Conseil d'État a été « de fait » annulé par un permis plus récent. Les ONG réfutent cet argument et menacent de porter plainte.

Le projet en cours à Ramlet el-Baïda au centre d’une querelle de plus en plus enflammée.

« Les travaux n'ont pas cessé sur le chantier de Ramlet el-Baïda. Bien au contraire, en matinée, nous avons constaté qu'ils s'accéléraient ! » Nazih Rayess, directeur de l'ONG « Cedar for Care », livre à L'OLJ ses observations sur la plage de Ramlet el-Baïda, un jour après une décision du Conseil d'État qui suspend l'exécution du permis en vertu duquel le chantier du projet Eden Rock, sur un terrain de la plage, est en cours de construction. Cette décision, selon les ONG qui ont présenté ce recours en Conseil d'État, aurait dû mener sans délai à un arrêt pur et simple des travaux.
Ce chantier a démarré en septembre 2016 en vertu d'un permis accordé par le mohafez de Beyrouth, Ziad Chbib, sur base du fait que ces terrains sont privés et qu'on ne peut légalement empêcher leur propriétaire d'y construire.

Interrogé hier sur cette décision judiciaire, M. Chbib indique à L'OLJ que « le permis qui a fait l'objet de ce recours en Conseil d'État n'est pas le permis en vertu duquel les travaux sont menés actuellement sur ce terrain à Ramlet el-Baïda ». Il explique qu'il existe deux permis, le second, datant de janvier 2017, se fonde sur d'autres données et d'autres cartes que celui accordé à l'entrepreneur en septembre. Selon lui, « le permis plus récent annule de fait le permis antérieur ». Or, ce sont, dit-il, les données concernant le premier permis qui ont été communiquées au Conseil d'État et qui ont mené à cette décision, d'où le fait que le permis actuel, qui ne fait techniquement l'objet d'aucun recours, n'est pas soumis au « sursis à exécution de la décision administrative ayant donné lieu à ce permis, demandé par le Conseil d'État dans sa récente décision ». En d'autres termes, selon lui, la décision du Conseil d'État ne peut mener sur le terrain à l'arrêt des travaux. « Chacun peut souhaiter que de telles constructions sur le littoral n'aient pas lieu, dit-il. Mais c'est la loi qui doit changer pour que cela soit possible. »
Le texte de ce « nouveau permis » tel que le qualifie M. Chbib est daté du 19 janvier 2017 mais avec un effet qui commence à partir de la date du 1er septembre 2016, suivant le document que nous avons pu consulter.

 

(Pour mémoire : La justice annule le permis de construire d'un projet balnéaire à Ramlet el-Baïda)

 

« Ce n'est pas un nouveau permis ! »
Les ONG ne sont naturellement pas de cet avis, présentant des arguments selon lesquels cette modification de janvier ne peut être considérée comme un nouveau permis.

Le président de Green Line, Ali Darwiche, déplore, dans un entretien téléphonique avec L'OLJ, ce qu'il considère comme « une aberration ». Selon lui, « ce nouveau permis dont parle le mohafez n'est en réalité qu'une modification apportée en janvier 2017 au permis accordé à l'entrepreneur en septembre 2016 ». « Cela ne peut en aucun cas être considéré comme un nouveau permis puisque, dans ce cas, il aurait fallu recommencer toute la procédure administrative, faire une nouvelle étude d'impact environnemental, etc., poursuit-il. Or notre recours auprès du Conseil d'État a été présenté sur base du permis délivré en septembre 2016, qui ne peut être annulé en vertu d'une simple modification. »

Ali Darwiche fait remarquer que « cette modification de janvier 2017 a été apportée après le recours présenté par les ONG auprès du Conseil d'État et, qui plus est, bénéficie d'un effet rétroactif depuis septembre 2016, ce que nous avons pu vérifier auprès des documents publiés par la municipalité ». Selon lui, « il ne fait pas de doute que la décision du Conseil d'État doit être exécutée sans délai ». Il affirme que « les ONG prévoient de porter plainte si la décision du Conseil d'État n'est pas exécutée par le mohafez ».
Selon Lama Karamé, avocate au sein de l'Agenda légal, « la modification du permis ne peut être considérée comme un nouveau permis, et ce qui vaut pour la première vaut aussi pour le second ». Elle estime que « la décision doit être exécutée, et la balle est maintenant dans le camp du mohafez ». Elle précise par ailleurs que « ce procès auprès du Conseil d'État se poursuit, puisque le sursis d'exécution a été décidé mais l'annulation du permis doit toujours être examinée ».

Au fait que la modification du permis ne peut être considérée comme un nouveau permis, le militant Raja Noujaim ajoute plusieurs autres arguments. Selon lui, « le numéro du dossier octroyé par le service de génie de la municipalité de Beyrouth est le même pour l'ancien document et pour le plus récent, le numéro 5452, tout comme la date de démarrage des six ans de viabilité du permis qui n'a pas changé (1er septembre), et qui aurait dû l'être si le permis était nouveau ». « Or la date du premier permis est le 1er septembre, et le travail a commencé à partir de cette date, poursuit-il. Cela veut-il dire que si le premier permis est considéré comme annulé, tout ce travail exécuté depuis début septembre est illégal ? Or cela fait cinq mois que le collectif "Nous demandons des comptes", Green Line et la Coalition civile envoient des courriers montrant les infractions journalières au domaine public perpétrées par l'entrepreneur au cours de la construction, sans jamais obtenir de réponse ni même de réaction de la part du mohafez. »

 

Une conférence de presse aujourd'hui
Un autre indice présenté par Raja Noujaim a rapport avec les frais payés par l'entrepreneur après la modification de janvier (environ 657 millions de livres, soit près de 438 000 dollars, comme nous avons pu le vérifier). « On constate qu'alors que le permis initial (de septembre) accorde à l'entrepreneur une superficie globale de construction d'environ 15 500 mètres carrés, cette superficie, dans le texte modifié, est désormais de quelque 20 800 mètres carrés, dit-il. Un simple calcul suffit à prouver que les frais payés en janvier ne sont que la différence de superficie exploitable, et non les frais d'un nouveau permis, qui auraient été bien supérieurs. »

Dans tous les cas, le militant remarque que « la décision du Conseil d'État est immédiatement exécutoire » et considère que « les infractions ont lieu depuis la date de présentation du recours au moins, puisque la décision d'arrêt des travaux est mentionnée en premier dans le texte de la décision ». Pour lui, « si le mohafez n'exécute pas l'arrêt des travaux, il s'agit d'un délit pénal ».
Il ajoute : « Il est décevant que le mohafez, qui est un ancien juge du Conseil d'État, n'ait pas vu que le jugement n'est pas fondé sur les détails du permis, mais sur les circonstances globales dans lesquelles se passe la construction. D'où le fait que l'esprit même du jugement, c'est que ce permis n'aurait jamais dû être accordé à la base. »

Aujourd'hui, une conférence de presse doit être tenue à la mi-journée par l'Agenda légal, Green Line, la Campagne civile pour la préservation de Dalyeh-Raouché et la Campagne civile pour la protection de la plage de Mina. Une conférence de presse au titre évocateur : « Ramlet el-Baïda pour tous, par décision judiciaire ».

 

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commentaires (4)

Si la mafia gagne sur la loi ..reste au gouvernement de démissionner, "car son projet anti-corruption" est caduc de facto...

M.V.

19 h 27, le 24 février 2017

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Commentaires (4)

  • Si la mafia gagne sur la loi ..reste au gouvernement de démissionner, "car son projet anti-corruption" est caduc de facto...

    M.V.

    19 h 27, le 24 février 2017

  • ET LE PROJET VA ETRE EXECUTE... C,EST CA LE LIBAN ! DU NORD JUSQU,AU SUD LE LITTORAL FUT ACCAPARE ET L,ETAT A PERDU DES MILLIARDS DE DOLLARS DE RENTREES... QU,IL FAUT COLLECTER POUR SOUTENIR LES BUDGETS... ET NON AUTREMENT !

    LA LIBRE EXPRESSION

    13 h 08, le 24 février 2017

  • Le sursis d'exécution et l'annulation beau jeu de mots pour prouver que le Droit dans notre pays ronfle toujours .

    Antoine Sabbagha

    11 h 00, le 24 février 2017

  • Vraiment ridicule cette excuse de permi. On peut continuer a emettre alors des permis chaque 6 mois, en changeant tres legerement le plan du projet (28 parasols au lieu de 30 par exemple), et le tour est joue. Ca vous donne une idee du niveau de corruption au sein meme des institutions. Et pendant ce temps, on se chamaille sur dimona et amonia....on ne merite pas ce pays, yalla amenez encore plus de syriens et palestiniens et donnont leur la nationalite comme en 96

    George Khoury

    09 h 48, le 24 février 2017

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