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Moyen Orient et Monde - Reportage

Fuir Mossoul au péril de sa vie

La plupart des habitants de la ville ont choisi de rester chez eux ou n'ont pas pu partir.

Des déplacés venus de Mossoul dans le camp de Hassan Cham, le 31 décembre. Safin Hamed/AFP

Il faut de préférence attendre la nuit tombée. Franchir des ponts à moitié en ruine et puis se faufiler entre les lignes de front sans être vu des jihadistes du groupe État islamique. Quitter Mossoul se fait au péril de sa vie et requiert un peu de chance. La plupart des 116 000 personnes qui ont fui la grande ville du nord de l'Irak depuis l'offensive lancée à la mi-octobre pour la reprendre à Daech (acronyme arabe de l'EI) venaient du secteur oriental. Les forces gouvernementales et leurs alliés ont peu à peu pris le contrôle de ce secteur situé à l'est du Tigre, qui divise la ville en deux.
Mais désormais, de nombreux habitants de la partie ouest cherchent eux aussi à partir. « Uniquement ceux qui ont de la chance s'en sortent », raconte Jamal, qui a trouvé refuge avec sa femme et leurs trois enfants dans le camp de Hassan Cham, aménagé par les autorités pour accueillir les personnes déplacées. Selon lui, « si l'on ouvrait une route pour partir ne serait-ce qu'un quart d'heure, il ne resterait plus personne dans le secteur oriental » de Mossoul. Les combats n'y font pas rage, pas encore, mais la nourriture est rare. Les voies d'approvisionnement qu'empruntait l'EI au sud-ouest de la ville ont été coupées en novembre.
Avant le début de l'offensive pour reprendre Mossoul, les agences des Nations unies craignaient un exode de masse et des problèmes d'ordre humanitaire d'une rare ampleur. Ces craintes ne se sont pas matérialisées. La plupart des habitants – Mossoul en comptait alors environ 1,5 million – ont choisi de rester chez eux ou n'ont pas pu partir. Ce qui a profité aux jihadistes, les forces gouvernementales étant soucieuses de faire le moins de victimes civiles possible.

« Exécuter tout Mossoul »
La donne a changé lorsque les forces gouvernementales et leurs alliés ont fait une pause le mois dernier. Avant de l'interrompre la semaine dernière et de reprendre leur progression. « Quand l'offensive a stoppé, les gens ont commencé à dire, c'est fini, l'armée ne va pas venir nous libérer, ou ça va prendre un an ou deux », raconte Abou Mohsen, 20 ans, qui a traversé le Tigre à bord d'une barque d'un de ses amis pêcheurs.
Jusqu'il y a peu encore, les jihadistes de l'EI exécutaient tous ceux qui cherchaient à fuir. Mais le nombre croissant de gens voulant partir les a contraints de modérer la sévérité de leurs punitions. « Il faudrait qu'ils exécutent tous les habitants de Mossoul. Alors maintenant, ils les fouettent et les renvoient chez eux », dit Abou Abd, un jeune homme de 22 ans qui a pu s'enfuir en franchissant le Tigre il y a trois jours. Ce qui n'est guère facile car tous les bateaux qui y naviguent sont aux mains des jihadistes. Et dans la ville elle-même, il faut, rue par rue, se faufiler au gré de la ligne de front, qui peut changer d'heure en heure. « Quand on a vu les soldats de l'armée, on n'arrivait pas y croire », raconte Abou Abdallah, réfugié lui aussi à Hassan Cham. Il y est en sécurité mais la vie n'y est pas facile. Il y a interdiction de sortir du camp, pour des raisons de sécurité, et il n'y a aucun travail.
Tout le monde ne le supporte pas. Dimanche dernier, un homme s'est suicidé dans un coin toilettes en se tranchant la gorge.
Isabel COLES/Reuters

Il faut de préférence attendre la nuit tombée. Franchir des ponts à moitié en ruine et puis se faufiler entre les lignes de front sans être vu des jihadistes du groupe État islamique. Quitter Mossoul se fait au péril de sa vie et requiert un peu de chance. La plupart des 116 000 personnes qui ont fui la grande ville du nord de l'Irak depuis l'offensive lancée à la mi-octobre pour la...

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