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À La Une - Grande-Bretagne

Jeremy Corbyn réélu à la tête d'un Labour plus divisé que jamais

Son triomphe solde définitivement l'héritage de Tony Blair.

 

Le radical Jeremy Corbyn a été largement réélu samedi à la tête du Labour, laissant entière la fracture entre la base et l'appareil du parti travailliste et compromettant ses chances de revenir rapidement au pouvoir. AFP / OLI SCARFF

Le radical Jeremy Corbyn a été largement réélu samedi à la tête du Labour, laissant entière la fracture entre la base et l'appareil du parti travailliste et compromettant ses chances de revenir rapidement au pouvoir.

Visé par un putsch de ses députés après le vote pour le Brexit fin juin, Jeremy Corbyn est non seulement toujours aux commandes de l'opposition, mais le vétéran radical sort renforcé après un été meurtrier pour la politique britannique et potentiellement fatal pour le Labour, vieux de 116 ans.

Réélu avec 61,8% des voix, le militant anti-austérité et pro-immigration de 67 ans a augmenté de plus de 2 points son score de l'an dernier, loin devant son unique rival, le député gallois Owen Smith.
Sous un tonnerre d'applaudissements, Jeremy Corbyn a immédiatement appelé le parti à serrer les rangs et lancé à ses opposants devant le congrès du parti réuni à Liverpool: "Travaillons ensemble pour un vrai changement" et "faisons table rase du passé".

Son triomphe solde définitivement l'héritage de Tony Blair, l'ancien Premier ministre travailliste dont le virage centriste et la décision d'intervenir en Irak en 2003 avaient détourné des milliers d'adhérents du parti.
Jeremy Corbyn doit une grande partie de sa victoire aux nouveaux membres. Ils sont 300.000 à avoir pris leur carte depuis l'année dernière pour pratiquement doubler les effectifs du Labour, devenu le plus grand parti d'Europe.
Beaucoup ont été séduits par le projet de "révolution démocratique" et les idées très à gauche de "camarade Corbyn", alimentant les accusations d'infiltrations du parti par des militants trotskistes et écologistes.

 

'Comme Podemos ou Syriza'
"Partout en Europe, on a vu émerger des partis construits sur une base activiste comme Podemos en Espagne, le mouvement Cinq étoiles en Italie ou Syriza en Grèce. Avec Jeremy Corbyn, le Labour se rapproche de cette tendance", souligne Patrick Dunleavy, professeur à la London School of Economics.

Les modérés, sondages à l'appui, estiment que cette stratégie condamne le parti à plusieurs années, voire des décennies, dans l'opposition. "La première conséquence de la réélection de Jeremy Corbyn est que le Labour ne retrouvera pas le pouvoir de sitôt", tranche Anand Menon, professeur en sciences politiques au King's College de Londres.

Pour les analystes, les prochaines législatives prévues en 2020 sont déjà promises aux conservateurs au pouvoir, considérés comme les vrais vainqueurs du week-end. Jeremy Corbyn n'est évidemment pas du tout d'accord. "On va se battre pour remporter la prochaine élection en 2020", a-t-il martelé. Avant même sa prévisible réélection, il avait annoncé qu'il allait "tendre une branche d'olivier" à tous les députés qui se sont désolidarisés cet été.

Selon l'entourage de Corbyn, plusieurs rebelles sont déjà prêts à rentrer dans les rangs. Mais les insultes et les menaces échangées pendant la campagne risquent de laisser des traces profondes. Et même une réconciliation ne règlerait pas le problème en apparence insoluble d'un leader indésirable aux yeux du sérail mais plébiscité par les militants.

 

'Astéroïde'
Les positions des deux camps paraissent à ce point irréconciliables que certains craignent aujourd'hui pour la survie du parti. Persuadés que la présence de Jeremy Corbyn empêche tout retour au pouvoir, les députés modérés pourraient ainsi être tentés de faire scission pour créer un nouveau parti de centre-gauche.

La plupart des analystes n'envisagent pas un tel scénario, au moins à court terme. Tony Travers, de la London School of Economics, rappelle que le précédent, qui a conduit à la création du parti social-démocratique en 1981, s'est soldé par un fiasco pour ceux qui ont choisi cette voie. "Certains vont rentrer dans les rangs, d'autres vont continuer à se rebeller. Le Labour va ressembler à une famille malheureuse qui tente de cohabiter", souligne l'expert.

Une déroute électorale pourrait faire bouger les lignes, sachant que même un camouflet n'offrirait aucune garantie quant à un départ de Jeremy Corbyn et de ses fidèles, tout à leur cause de transformer le parti.
"L'idée est de construire un mouvement social et ses partisans sont prêts à accepter que cela prenne du temps. Il s'agit de transformer le parti d'abord avant de s'occuper des élections", souligne Anand Menon.
"C'est une occasion en or, ils ne vont pas la lâcher", estime Steven Fielding, professeur à l'Université de Nottingham qui ajoute: "La guerre des tranchées va continuer et il faudrait qu'un astéroïde frappe la Terre pour que cela change".

 

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