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Lifestyle - La mode

Hiver 2017, la tendance sans mains

Dominée par l'esthétique des années 80 avec ses larges épaules et ses lavallières qui soulignaient, sous le règne de Thatcher, la prise du pouvoir par les femmes, la mode de cet hiver sera aussi marquée par une longueur insolite des manches.

Marc Jacobs automne-hiver 2016-2017.

On se souvient de ce clip publicitaire pour autocuiseur, dans lequel une mère demande à son adolescente de l'aider à fermer l'engin (qui, en l'occurrence, se ferme d'une simple pression). «J'ai pas d'mains » répond la jeune fille qui fait sa rebelle à trois sous, en tirant sur ses manches. Et la mère réplique: «Y a pas besoin!» Treize ans plus tard, la mode confirme: y a pas besoin.
La tendance s'est annoncée il y a six mois, lors des semaines du prêt-à-porter automne-hiver 2016-2017. Chez des créateurs conceptuels comme Maison Margiela ou Rick Owens, on a toujours trouvé normal que les manches traînent à terre et jouent les camisoles. Mais là, de défilé en défilé, force était de constater que presque toutes les griffes de mode, même les plus classiques, avaient décidé de concert, en plus de rejouer la manie XXL des années 80, buste gonflé et épaules surdimensionnées, de faire disparaître les mains dans de longs tunnels sous les manches. Quand on sait que six mois avant le 11 septembre 2001, la mode avait atteint des sommets en matière de références guerrières, on fait confiance à son intuition et on se pose des questions sur l'avenir des mains. Les créateurs sont après tout des gens connus pour flairer l'air du temps avant le commun des mortels. Cette longueur de manches insolite qui débarque déjà dans les vitrines prévoit-elle pour l'humanité un hiver de manchots ?

Le rôle de la technologie
«Sans les mains!» Qui n'a pas essayé de le faire, dès 6, 7 ans, lâcher le guidon du vélo, se casser les dents et puis recommencer. Sans les mains, l'exploit ultime, l'équilibre parfait, le détachement de la matière. Le 3e millénaire est ainsi: sans les mains. Il n'y a qu'à voir la nostalgie avec laquelle les concepteurs d'objets, comme Karen Chekerdjian pour ne citer qu'elle, anoblissent ces instruments du passé, équerres, marteaux et clous. Le travail de la main, c'est la patience de l'artisan dans les coulisses du luxe, mais c'est aussi ce contact avec la matière que notre époque a rendu obsolète. Quelle fierté d'appartenir à l'ère digitale! Sauf que dans «digital», il y a «doigts». Encore faut-il que les doigts puissent trouver la sortie de ces manches interminables auxquels on les contraint. La question qui se pose, en 2017, est de savoir si la réalité virtuelle va en plus nous faire abandonner nos doigts.
C'est un fait, plus la technologie avance, plus on perd de fonctions biologiques. Au début des années 2000, des créateurs comme Marc Jacobs essayaient de faire rêver avec des icônes imaginaires qui ne feraient rien d'autre dans la vie que s'occuper de leur beauté et acheter des vêtements. À une époque où le women empowerment se traduisait par une surcharge de travail pour les femmes, cette technique fascinait. Le désir de mode se cristallisait dans ce rêve impossible : être cette fille qui se résume à son apparence et à l'arrogance de son lifestyle inaccessible. Ne rien faire, c'est une autre manière de ne pas se servir de ses mains. Sans les mains, donc.

Cuirasses ou gaspillage?
Est-ce la raison pour laquelle nous porterons ce manteau Céline ou Marc Jacobs, ou ce pull Isabel Marant ou Joseph dont les manches touchent les genoux ? Une autre explication serait notre besoin croissant de protection. Le vêtement, de plus en plus enveloppant, jouerait les cuirasses. Contre les intempéries, les environnements professionnels hostiles, ou simplement la drague intempestive dans les transports ou dans la rue. Ultime option : la démesure du luxe. Comme au début de l'ère industrielle, plus on gaspille de tissus, plus on affiche sa richesse. Les douze jupons qu'on empilait sur la crinoline au XIXe siècle avaient peut-être plus de gueule dans leur absurdité que nos manches qui traînent, mais à chaque époque sa frime.

On se souvient de ce clip publicitaire pour autocuiseur, dans lequel une mère demande à son adolescente de l'aider à fermer l'engin (qui, en l'occurrence, se ferme d'une simple pression). «J'ai pas d'mains » répond la jeune fille qui fait sa rebelle à trois sous, en tirant sur ses manches. Et la mère réplique: «Y a pas besoin!» Treize ans plus tard, la mode confirme: y a pas besoin.La...
commentaires (1)

J'aime beaucoup "ses larges épaules qui soulignaient, sous le règne de Thatcher, la prise du pouvoir par les femmes"! Le reste de la mode de cet hiver me semble basé sur le fait que la femme suit la mode quelle soit esthétique ou non... Trop c'est trop!! Mais j'ai lu votre article Fifi, jusqu'au dernier mot!! Un pur divertissement! Merci!

Zaarour Beatriz

22 h 40, le 07 septembre 2016

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Commentaires (1)

  • J'aime beaucoup "ses larges épaules qui soulignaient, sous le règne de Thatcher, la prise du pouvoir par les femmes"! Le reste de la mode de cet hiver me semble basé sur le fait que la femme suit la mode quelle soit esthétique ou non... Trop c'est trop!! Mais j'ai lu votre article Fifi, jusqu'au dernier mot!! Un pur divertissement! Merci!

    Zaarour Beatriz

    22 h 40, le 07 septembre 2016

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