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Économie - Focus

Le hommos, marqueur de l’ouverture commerciale libanaise

Le hommos libanais est produit principalement à partir de pois chiches importés des Amériques, et l'industrie survit en grande majorité grâce à ses exportations vers l'étranger.

La grande majorité du hommos produit au Liban s’exporte à l’étranger, en particulier vers les États-Unis. Photo S. Ro

Que serait un mézé libanais sans son traditionnel plat de hommos ? Le Liban revendique, comme nombre de ses voisins, la paternité de la célèbre purée de pois chiches mélangée à la « tahini », et une guerre médiatique a même eu lieu au début des années 2010 contre Israël, qui a permis au Liban de décrocher le record Guinness de la plus grande assiette de hommos au monde (plus de 10 tonnes).

Pour autant, la production de ce symbole national dépend aujourd'hui entièrement de l'étranger. D'abord, en ce qui concerne son ingrédient principal. Le Liban importait ainsi en moyenne 14 000 tonnes de pois chiches par an entre 2012 et 2014, contre une production libanaise estimée à environ 3 500 tonnes en 2011, selon les dernières statistiques du ministère de l'Agriculture. « La production locale est faible à cause du coût de production élevé, d'un rendement faible et d'un manque de subventions publiques », explique Rabih Kabalan, chef du département des céréales et légumes à l'Institut de recherche agronomique libanais (Iral). Selon le ministère de l'Agriculture, la superficie de la culture du pois chiche au Liban en 2011 ne dépassait pas les 3 000 hectares, pour un rendement moyen de 1,2 tonne par hectare.

Depuis plusieurs décennies, ces pois chiches proviennent en grande majorité des Amériques : Mexique, États-Unis, Canada. « Nous achetons tous nos pois chiches aux États-Unis, chez un agriculteur en Idaho », indique Maya Rizk, directrice des ventes à l'exportation à Cortas Food, l'un des plus gros fabricants de boîtes de conserve au Liban, avec al-Rabih, Conserves Modernes Chtaura et al-Wadi el-Akhdar (qui a refusé de répondre à nos questions). Si Maya Rizk n'était pas en mesure de donner une estimation du prix, ni des quantités d'achat et de vente, le kilo de pois chiches mexicain coûtait, l'année dernière, entre 1 300 et 1 700 dollars la tonne, et a atteint 2 000 dollars cette année, selon les informations de l'importateur de pois chiches Joseph Ghobeira, directeur de Ftouh Mills. « Les prix ont augmenté à cause de la mauvaise saison du pois chiche au Mexique. Certains importateurs se sont donc tournés vers la Russie », explique-t-il. Il est toutefois normal que le prix du pois chiche fluctue, indiquent plusieurs spécialistes, et cette augmentation ne devrait pas avoir de répercussion à court terme sur le prix d'achat du hommos pour le consommateur.

Hommos au wasabi

Comme ses concurrents, Cortas exporte à plus de 80 % de sa production vers l'étranger, le marché libanais étant en effet limité. « Au Liban, le coût du kilo de hommos pour le consommateur est d'environ 1,5 dollar, et les ventes au niveau national se situent aux alentours de 1 500 tonnes par an », estime Abed Khoder, directeur de Conserves Modernes Chtaura. Selon ces chiffres, le marché du hommos atteindrait donc 2,2 millions de dollars annuellement. Le hommos libanais s'exporte surtout vers les États-Unis, où sa popularité s'explique par la présence d'une « forte communauté libanaise », qui a permis au plat de devenir « tout à fait ordinaire depuis au moins une décennie », observe Mounir Bsat, vice-président du syndicat des industries alimentaires. Les Américains sont également plus aventureux que les Libanais concernant le hommos, selon lui, et l'achètent assaisonné au pesto, au poivre piquant, au wasabi...

Pour Abed Khoder, si la popularité du hommos va augmenter à l'étranger, elle va aussi s'accroître au Liban. « Certains consommateurs se tournent de plus en plus vers le hommos comme une alternative à la protéine de viande. Ces deux dernières années, la consommation a augmenté de 25 % au Liban », dit-il. Autre explication, l'arrivée en masse de réfugiés syriens, juge plutôt Joseph Ghobeira.

Même si le hommos au wasabi tarde encore à se populariser au Liban, le hommos frais, lui, commence à apparaître dans les rayons des supermarchés, après s'être démocratisé à l'étranger. « Il coûte cher, et les Libanais préfèrent encore le faire chez eux. Mais c'est un marché qui vaut déjà des milliards de dollars aux États-Unis! » s'exclame une spécialiste du milieu. Abdallah Saba, directeur commercial à Naas Food Company, qui produit du hommos, du baba ghannouj et de la purée d'ail frais, affirme, de son côté, que le hommos frais est déjà bien ancré au Liban : « Les consommateurs n'ont plus le temps de le faire chez eux ; il faut faire tremper les pois chiches pendant une nuit entière, attendre qu'ils refroidissent, les mélanger, etc. » Naas a été lancé il y a huit ans par l'ancien ministre du Tourisme Fadi Abboud, qui, à l'époque, voulait affirmer la présence libanaise dans le secteur du hommos face aux entreprises israéliennes.
La vraie concurrence régionale réside toutefois ailleurs, selon Georges Nasraoui, directeur d'al-Rabih. « Actuellement, l'Europe et le Golfe importent surtout du Liban. Mais, aux États-Unis, cela fait plus de 5 ans qu'ils importent en majorité du hommos jordanien. La production a également débuté dans la dernière décennie au Koweït et à Dubaï », s'inquiète-t-il.




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commentaires (2)

Pourquoi lit-on (et entend-t-on) de plus en plus souvent "HOUMOUS" en France et en Europe, vous le savez sûrement.Je trouve celà un peu irritant, surtout quand on vous reprend: "ah! Vous voulez dire de l'houmousse!" SIC.

Neuschwander Joël

11 h 45, le 01 août 2016

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Commentaires (2)

  • Pourquoi lit-on (et entend-t-on) de plus en plus souvent "HOUMOUS" en France et en Europe, vous le savez sûrement.Je trouve celà un peu irritant, surtout quand on vous reprend: "ah! Vous voulez dire de l'houmousse!" SIC.

    Neuschwander Joël

    11 h 45, le 01 août 2016

  • Pour information, le mot entier du hommos au Liban est connu sous le nom de HOMMOS CHAMI. Aussi, le Foul Medammes est connu sous le nom FOUL MASRI.

    George Bitar

    02 h 27, le 01 août 2016

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