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Culture - Festival de Baalbeck

Par-delà temps, océan et terre, Caracalla forever...

Les colonnes de Jupiter et le temple de Bacchus sont en émoi. Caracalla peaufine sa dernière création* pour son retour après six ans à la cité du Soleil. Hommage aux soixante ans du festival et avant-goût du cinquantenaire, dans deux ans, de la troupe... Coulisses des répétitions.

Abdel Halim et Alissar Caracalla au milieu du branle-bas des répétitions avec une jeunesse multinationale.

Branle-bas d'une jeunesse multinationale pour une machine à remonter le temps qui s'appelle Ibhar fil Zaman (littéralement, Navigation dans le temps). Pour une histoire de tolérance, de fraternité humaine, de découvertes de richesses culturelles où un explorateur omanais, loup des mers, appelé Ahmad ben Majed, est l'équivalent de Marco Polo...
Pour ce travail spectaculaire et aux scintillements féeriques, cent vingt danseurs, chanteurs, acteurs, musiciens, costumiers, techniciens, comparses. Rencontre sur les lieux des répétitions qui vont bon train au sein du triumvirat Caracalla père, fille et fils, c'est-à-dire Abdel Halim, Alissar et Yvan.

La route, sous un soleil de plomb, ruban d'asphalte gardé par une végétation (charmante nouveauté dans cet amas de poussière autrefois) – incluant lauriers, roses blanches et rouges ouvertes et arbustes «evergreen» au milieu de l'autoroute – ouvre tout grand le chemin qui mène droit à la pointe du cœur de la Békaa. Dans les ruines, dans un brouhaha festif, entre échafaudages des gradins et tremplin de la scène au pied des escaliers du temple de Bacchus, grouille un monde bariolé.

Les artistes des quatre points cardinaux sont comme échappés à une tour de Babel ou une arche de Noé où s'essayent à se mettre sur pattes des dromadaires apathiques... Sanglé dans un gilet en soie rose et bleu marine à l'ourlet argenté digne d'un mandarin, Abdel Halim, vieux lion de scène rugissant dans son micro qu'il porte en main comme une arme de combat. Les cheveux totalement en bataille (et il s'en fout !) il a le regard bleu turquoise de ces eaux que sa troupe et son imaginaire vont traverser.
Il est celui qui gère et dirige tout. L'âme et le corps de ce spectacle puisant au plus profond des racines orientales et alliant danse, théâtre, poésie, chant, merveilleux, costumes somptueux, musique intense, histoire captivante. Il apporte partout « sa touche magique », comme le soulignent Alissar et Yvan.

 

(Pour mémoire : Caracalla revisite fastueusement les contes d’Orient)

 

Et son bagout est celui d'un vrai «hakawati» : «Cette fois je suis dramaturge – et j'y ai pris goût – j'ai écrit moi-même le texte de bout en bout. Avec le souvenir de mon père le poète Abbas Caracalla. J'ai fouillé, de la Chine à l'Iran, en passant par l'Inde, pour trier plus de 7 500 mètres de diverses étoffes pour plus de 1 500 costumes qui sont sortis des ateliers. C'est un spectacle différent de tout ce que j'ai fait jusqu'à présent. Les racines orientales sont toujours là mais il y a aussi un pont entre Orient-Occident, entre passé et présent... ».
Pour le fondateur et l'éminence grise de la troupe Caracalla – lui qui a été félicité, entre autres, par le roi Hussein de Jordanie, le président algérien Abdel Aziz Bouteflika, la chahbanou Farah Pahlavi et le cheikh Mohammad ben Zayed al-Nahyan – le devoir appelle. Un détail par-ci, un détail par-là et voilà qu'il est déjà ailleurs, au milieu des danseurs et des techniciens qui s'agitent.

Casquette vissée sur le front, jeans et espadrilles sur une chemise blanche, le regard vif et attentif à tout ce qui bouge, Yvan Caracalla confie sa vision de la mise en scène : «C'est un nouveau défi pour la troupe de Caracalla. C'est un travail d'envergure car les paysages changent, de la Chine à l'Inde en passant par Oman et Venise. Il s'agit de l'apport d'une scénographie virtuelle. D'où l'importance des projections. Un voyage à travers le temps pour une leçon de respect des peuples. Dans des décors mobiles exécutés en Italie aux lieux mêmes des accessoires pour Franco Zeffirelli...»

Cheveux longs lisses au vent, charmant minois pour des yeux pétillants, pull-over noué autour des hanches sur un jeans moulant, alerte comme un cabri, Alissar Caracalla est une boule de nerf. «La chorégraphie ici est une approche nouvelle, souligne-t-elle. D'où la participation des gens du métier chinois et indien. Je devais aussi garder intacte la notion de beauté des costumes. Un compromis entre un certain défilé et une exigence certaine de la danse. Et puis, il y a ce carnaval de Venise, un vrai moment pour une danse du XVe siècle... Cela va des touristes flânant dans les ruines de Baalbeck, pour remonter dans le temps par le biais d'une traversée de plusieurs pays. La Chine et son faste, l'Inde et ses couleurs, l'Iran et sa poésie (bonjour Omar Khayyam, Hafez, Chiraz) et Oman et ses tours portugaises au haut des montagnes...

Tout cela à travers l'éloquence du geste et des corps. Avec une large plage de liberté pour une large palette d'expression. En plus, il est vrai, du verbe, des dialogues, du poème, de la musique... Après ce vaste tour d'horizon, retour à la scène finale, apothéose visuelle de ce spectacle, où tout s'harmonise et on retrouve dans le tableau final l'essence du folklore libanais entre Dal'ouna, Dalmani, Ghzayel... Et il y aura toujours, en clôture, les bonds d'Omar (il traînait en coulisses avec lunettes noires, cigare éteint entre les doigts et badine à la main) fendant l'air avec son chapelet passe-temps...»

À peine rentrée de l'Opéra de Pékin où elle a remporté un vif succès, la troupe de Caracalla s'est attelée à Ibhar fil Zaman pour l'ouverture du Festival de Baalbeck 2016, ce vendredi 22 juillet, à 20h précises sur les marches du temple de Bacchus (fraîchement rénové). Un spectacle déjà sollicité et ciblé, à nouveau, par l'Opéra de Pékin, mais aussi l'Opéra d'Oman et le London Coliseum. Affaire à suivre de près. Mais commençons par la Cité des dieux !

*Ibhar fil Zaman, par la troupe Caracalla, vendredi 22 et samedi 23 juillet, à 20h précises, sur les marches du temple de Bacchus. Billets (prix réduit pour étudiants) chez Virgin Ticketing et transport assuré par bus à partir de Virgin, place des Martyrs.

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Fiche technique



Texte, costumes et grand ordonnancement : Abdel Halim Caracalla.
Metteur en scène : Yvan Caracalla.
Chorégraphes : Alissar Caracalla, Astha Dixit, Li Yu Xi.
Acteurs : Rifaat Tarabey, Hoda Haddad, Joseph Azar, Alecco Daoud, Élie Choueiri, Gabriel Yammine, Simon Obeid, Hadi el-Khalil, Ali el-Zein, Nabil Karam, et Hicham el-Meghrich, deux fois prix d'interprétation masculine en Algérie, dans le rôle du nain (comme dans Game of Thrones !).
Conseiller pour la musique, Mohammad Ali Gholi, avec la participation du chanteur Hamid Naderian et des musiciens Yasmine Hajj Nasser et Said Ansari.
Éclairage : Vinicio Cheli.
Projectionniste : Sergio Metalli.
Scénographie : Juliano Spinelli.

 

Pour mémoire
« Il était une fois »... Et il est toujours, d’une étincelante féerie, Caracalla !

Une opérette « baladi » dansée, de Caracalla

En coulisses avec Ivan et Alissar Caracalla

Branle-bas d'une jeunesse multinationale pour une machine à remonter le temps qui s'appelle Ibhar fil Zaman (littéralement, Navigation dans le temps). Pour une histoire de tolérance, de fraternité humaine, de découvertes de richesses culturelles où un explorateur omanais, loup des mers, appelé Ahmad ben Majed, est l'équivalent de Marco Polo...Pour ce travail spectaculaire et aux...

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