Rechercher
Rechercher

Moyen Orient et Monde - Ramadan

À Kaboul, les fruits de la fête du Fitr pour oublier la guerre

Selon les chiffres de l'Onu, 11 000 civils ont été tués ou blessés l'an dernier.

À Kaboul, les habitants se préparent à célébrer la fête du Fitr. Omar Sobhani/Reuters

Des montagnes de fruits secs et de gâteaux, des vêtements neufs et du thé. Malgré 40 ans de conflits et de tourments, l'Afghanistan s'apprête à fêter la fin du ramadan sans rien céder à ses traditions. La fête du Fitr, qui marque la fin du jeûne et constitue l'une des plus grandes fêtes du calendrier musulman, aura lieu demain, selon les autorités religieuses d'Arabie saoudite.
Depuis trois jours, la foule se presse dans les allées asphyxiées du plus grand bazar de Kaboul, Manday, pour y faire le plein de noix et de raisins secs, et surtout de « simian », ces petits vermicelles jaunes au safran, croustillants et légèrement épicés, qu'on croque en cette occasion. Des marchands de pistaches, d'amandes, de noix, de cajou, de pois grillés et de toutes les sortes possibles de graines et de fruits secs, dont l'Afghanistan est un grand producteur, sont apparus aux carrefours du centre-ville moderne de Kaboul : la fébrilité s'est emparée de la capitale et devrait être suivie de trois jours d'apathie dès les festivités ouvertes.
Pourtant, les temps sont durs : les talibans multiplient les opérations dans l'Est, le Sud et le Nord, infligeant de lourdes pertes aux troupes afghanes que la force internationale (Isaf) a laissées en première ligne, en évacuant fin 2014.
Près de 10 000 Américains continuent, sous la bannière de l'Otan, d'apporter formation et soutien aérien mais sans participer aux combats au sol. Et les attentats des insurgés islamistes visent prioritairement les employés du gouvernement, à commencer par les militaires et les policiers.
Une double attaque-suicide contre des cadets de la police tout juste diplômés, à l'entrée de Kaboul fin juin, a ainsi fait 32 morts et 78 blessés. Les civils ne sont pas épargnés : selon l'Onu, 11 000 ont été tués ou blessés l'an dernier. Cette insécurité entrave toute reprise économique, et le chômage, s'alarme la Banque mondiale, atteint désormais 40 % de la population active. « C'est très beau tout ça, mais c'est trop cher pour moi », dit en souriant une institutrice portant la robe olive des enseignants, devant les étals de noix rangés sous de grands parasols.

Des prix en fête aussi
Nasrattulah Nasrat, un fonctionnaire d'une quarantaine d'années, ne se pose en revanche pas de questions en empilant lundi cinq boîtes de nougats et huit kilos d'amandes, de pistaches, de mûres et de raisins secs sur le comptoir du magasin Ahmadina Dry Fruits, boutique spécialisée dans Wazir Akhbar Khan, le quartier résidentiel de la capitale. « Entre la famille, les amis et tous ceux qu'on n'attend pas, ça fera sans doute plusieurs centaines de personnes qui viendront à la maison souhaiter un "Aïd Moubarak" », dit-il. Pour ce père de cinq enfants, il serait impensable de ne pas tendre aux visiteurs ces coupes de fruits et de sucreries, arrosées de thé. Même s'il déplore l'augmentation des prix en cette période de fêtes.
Selon lui, le kilo de raisins blonds vaut deux fois plus cher, 600 afghanis (environ neuf dollars). Les amandes sont passées de 900 à 1 100 afghanis (15 dollars).
Et, pourtant, il n'est pas question de se priver, affirme Mohammad Sabir, patron du distributeur Matmaen Dry Fruits. « La coutume a traversé la guerre, les gens y sont attachés. Ils empruntent pour l'Aïd et on verra après », dit-il.
La fête impose aussi de porter ce jour-là quelque chose de neuf. Là encore, les échoppes de tailleurs débordent de chalands qui prennent livraison de leurs « shalwar kamees », les longues chemises droites des hommes.
« Les femmes sortent tous leurs bijoux pour l'occasion... Toute coquetterie est permise et c'est l'occasion pour les plus riches de montrer leurs nouvelles tenues, explique Chékéba, une quadragénaire. Ma mère nous emmenait toujours chez la couturière avant l'Aïd pour nous refaire une garde-robe. »
Chez Violet, la pâtisserie chic du quartier, Negin confie en emportant une grande boîte de feuilletés au sucre que sa nouvelle robe est bleue. Pour quelques jours, la jeune fille coiffée d'une casquette au lieu du voile ne veut plus penser à la guerre.

Anne CHAON/AFP

Des montagnes de fruits secs et de gâteaux, des vêtements neufs et du thé. Malgré 40 ans de conflits et de tourments, l'Afghanistan s'apprête à fêter la fin du ramadan sans rien céder à ses traditions. La fête du Fitr, qui marque la fin du jeûne et constitue l'une des plus grandes fêtes du calendrier musulman, aura lieu demain, selon les autorités religieuses d'Arabie saoudite.Depuis...
commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut