Le ministre démissionnaire libanais de la Justice, Achraf Rifi, a affirmé mercredi qu'il aurait tendance à accuser le Hezbollah de l'attentat à la bombe qui a frappé le siège de la Blom Bank à la rue de Verdun, dimanche.
"Il y a beaucoup de similitudes entre l'attentat qui a coûté la vie à l'ancien Premier ministre Rafic Hariri et celui qui s'est produit à Verdun", a estimé M. Rifi, dans des messages publiés sur sa page Twitter. "J'aurais tendance à accuser le Hezbollah", a ajouté le ministre, avant de dénoncer "l'absence de condamnation de l'attentat" de la part du parti chiite. "Qui bénéficie de l'attaque et qui est capable de la mener ?", s'est-il interrogé.
L'attentat contre la Blom est intervenu dans un contexte particulier. Depuis l'adoption du "Hezbollah International Financing Prevention Act of 2015" (Hifpa 2015), voté fin décembre par le Congrès américain, les banques libanaises sont sous pression. L'application des sanctions américaines contre le parti chiite et ses soutiens financiers implique en effet la fermeture des comptes liés au Hezbollah. Une centaine de comptes ont jusqu'ici été clôturés.
Concernant l'assassinat de Rafic Hariri, le Tribunal spécial pour le Liban, qui juge les assassins de l'ancien Premier ministre, avait délivré des mandats d'arrêt contre Moustapha Badreddine, tué en Syrie en mai dernier, et qualifié par le TSL de "cerveau" de la planification de l'attentat, et quatre autres membres du Hezbollah. Le parti, qui a rejeté toute paternité de l'attentat, avait à plusieurs reprises exclu la remise des suspects.
(Lire aussi : Attentat de Verdun : deux hypothèses et une certitude, le décryptage de Scarlett Haddad)
"Le 7 mai a échoué"
"Le secteur bancaire est une ligne rouge, et le Hezbollah doit en prendre conscience, sinon, tout le monde se retournera contre lui", a également prévenu Achraf Rifi. Il a affirmé que "le 7 mai (2008, en allusion à l'invasion de Beyrouth ce jour-là par des combattants du Hezbollah, ndlr) a échoué et s'est répercuté négativement sur le Hezbollah qui en a payé le prix. Il en sera de même concernant l'attentat de Verdun". Le ministre démissionnaire de la Justice a également pris la défense du gouverneur de la Banque du Liban, Riad Salamé, affirmant que celui-ci "ne fait qu'appliquer les lois américaines", en référence à la Hifpa 2015.
Toutefois, le ministre a affirmé que les contacts avec le Hezbollah sont une "nécessité nationale", mais il a fait savoir que son "public refuse le dialogue" national qui rassemble les principales composantes du pays afin de débattre des principaux dossiers politiques.
De manière plus générale, Achraf Rifi a estimé qu'il n'y a "pas de craintes d'une déflagration sécuritaire générale au Liban". "La situation est sous contrôle, hormis quelques incidents isolés".
Sur un autre plan, il a réaffirmé que sa démission, le 21 février, était définitive : "Je ne participerai à aucune réunion routinière du Conseil des ministres. En cas de nécessité nationale, j'y participerai à titre exceptionnel", a-t-il déclaré. Il a dans ce cadre félicité le président du parti Kataëb, Samy Gemayel, qui a annoncé la veille la démission des ministres de son parti. "Leur démission est une démarche positive", a jugé Achraf Rifi.
Pour mémoire
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commentaires (10)
Et dire qu'ils se considèrent plus "évolués" que les "autres arabes" comme eux !
ANTOINE-SERGE KARAMAOUN
16 h 31, le 16 juin 2016