Les mouvements militaires dans la région d'al-Iss dans le rif sud d'Alep attirent désormais les regards. En dépit de la trêve décrétée depuis plus d'un mois, les groupes armés de l'opposition ont lancé une vaste offensive pour reprendre cette localité et la colline stratégique qui la surplombe. Selon des sources proches du terrain syrien, cette offensive a été soigneusement préparée à partir de la Turquie avec un appui discret turco-saoudien en réponse à la reprise par le régime syrien et ses alliés de la ville de Palmyre. Des milliers de combattants ont été mobilisés pour la mener et l'objectif de l'opération était d'atteindre Alep, puis de se diriger vers les deux localités chiites de Foua et de Kfaria, pour prendre en otage leurs populations ou les tuer, portant ainsi un coup dur à l'armée syrienne et à son environnement populaire. Les soldats syriens et les combattants du Hezbollah qui se trouvaient sur place ont réussi à repousser la première offensive, mais les éléments armés sont arrivés par vagues successives, avec les kamikazes habituels, prêts à se faire exploser au sein de la population civile, et d'autres d'un genre nouveau qui doivent infiltrer les lignes ennemies et se faire exploser à ce moment-là, faisant le maximum de morts parmi les soldats et les combattants.
De plus, l'avancée massive des éléments armés vers les lignes tenues par l'armée syrienne et ses alliés a paralysé l'aviation qui ne pouvait plus mener des raids aériens pour ne pas risquer d'atteindre les soldats. Face au véritable flot d'éléments armés, les soldats et leurs alliés ont dû se retirer. Le Hezbollah a perdu dans cette offensive dix de ses combattants. Il a réussi à récupérer trois dépouilles mortelles, laissant les 7 autres sur le terrain. Du côté des assaillants, les pertes sont encore plus grandes puisqu'on parle de plusieurs centaines de morts.
Si cette opération a permis aux combattants de l'opposition de sentir qu'ils reprennent l'initiative sur le terrain après la perte de Palmyre, elle a surtout ouvert la voie à une riposte à grande échelle de l'armée syrienne et de ses alliés. Les autorités russes ont ainsi parlé d'une grave violation du cessez-le feu qui ne peut pas rester sans réponse. Sur le terrain, une chambre d'opérations commune a été installée dans le rif d'Alep comprenant des représentants russes, syriens, iraniens et du Hezbollah. Des sources proches de ce parti affirment que la décision est désormais prise d'encercler totalement la ville d'Alep. Le plan avait été établi avant l'annonce de la trêve, mais il a été arrêté depuis. Désormais, il sera exécuté dans le cadre d'une vaste offensive destinée à pacifier la grande agglomération que constitue Alep et ses environs.
Il faut rappeler que 30 % de cette ville sont aux mains des forces de l'opposition. Le régime et ses alliés avaient annoncé à plusieurs reprises une décision pour reprendre le contrôle de la totalité de la ville, mais elle a toujours été stoppée par des considérations politiques, les enjeux de la bataille d'Alep étant essentiellement régionaux et internationaux. Selon les sources proches du Hezbollah, à cause de l'importante violation du cessez-le-feu par les combattants de l'opposition et leurs appuis régionaux, il n'y aurait désormais plus d'obstacles face au lancement d'une vaste offensive pour la reprise d'Alep, qui constituerait une réponse adéquate à l'attaque qui avait visé le rif sud d'Alep. Les préparatifs militaires vont donc bon train et les Iraniens ont envoyé des renforts sur place.
En même temps, le processus politique se poursuit et les négociations devraient reprendre la semaine prochaine à Genève. L'émissaire de l'Onu, Staffan de Mistura, a déclaré à ce sujet qu'il espère que des progrès seront enregistrés au cours du prochain round de pourparlers. Le scénario est désormais connu : il faudra s'entendre sur la formation d'un gouvernement d'union nationale pour le régime, de transition pour l'opposition, avec des prérogatives bien définies. Le régime demande que les membres de ce gouvernement fassent partie de l'opposition dite de l'intérieur, parce que, selon lui, on ne peut pas être ministre et résider à l'extérieur de la Syrie. Ce gouvernement aura pour mission d'adopter des amendements constitutionnels et d'organiser ensuite des élections législatives, puis présidentielle, au bout de dix-huit mois à partir de sa formation. Selon des sources proches du régime, le départ du président syrien n'est pas envisagé avant l'élection présidentielle, dans laquelle il aura le droit de présenter sa candidature. Les mêmes sources précisent qu'il a déjà été convenu que les déplacés syriens ne participeront pas au scrutin législatif, pour des raisons logistiques. Par contre leur participation au scrutin présidentiel ne fait pas encore l'objet d'un accord.
C'est dire que même si la guerre est encore longue, le cadre de la solution se précise de plus en plus. Les développements militaires ne sont plus qu'un moyen de renforcer les positions des négociateurs, sous le parapluie de l'accord américano-russe.
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C'est bien de prendre see souhaits pour des réalités !! Lool
19 h 00, le 09 avril 2016