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Économie - Liban - Finance

Prudence des banques libanaises en Irak

Sept des dix établissements implantés en Irak sont présents aussi bien à Bagdad qu'au Kurdistan irakien, objet de tensions récurrentes avec le pouvoir central.

Les banques libanaises en Irak sont en contact permanent avec la Banque centrale irakienne pour ne pas être prises au dépourvu. Bassim Shati Reuters

Alors que le Fonds monétaire international (FMI) a estimé en janvier que la croissance irakienne pourrait renouer avec une croissance à deux chiffres (10,6 %) en 2016, les velléités de sécession kurdes préoccupent les banques libanaises qui ont commencé à s'y installer ces 10 dernières années. « Le différend entre Bagdad et Erbil est strictement politique et les banques sont en contact permanent avec la Banque centrale irakienne (BCI) pour pouvoir en anticiper les conséquences possibles » affirme à L'Orient-Le Jour Samir Tawilé, directeur central de IBL Bank, implantée à Erbil depuis 2006 et à Bagdad depuis 2008. Le Kurdistan exporte via la Turquie le pétrole des provinces qu'elle contrôle depuis l'échec en 2015 d'un accord avec le gouvernement qui exporte, lui, le pétrole des autres régions. En février, les autorités de la région autonome s'étaient dit prêtes à stopper les exportations pétrolières si Bagdad acceptait en contrepartie de payer les fonctionnaires de la région autonome.

Les dix banques répertoriées par l'Association des banques du Liban (ABL) en Irak représentent près de la moitié des sociétés étrangères d'un secteur encore dominé par les établissements publics, qui absorbent environ 90 % des actifs consolidés en 2015, selon l'Union des banques arabes (UBA). Sept de ces établissements possèdent des branches aussi bien à Bagdad qu'à Erbil ; tandis que trois sont implantées à Bassora (sud de l'Irak) et une possède une agence à Suleimaniyé (la deuxième ville du Kurdistan irakien). Une répartition qui permet à ces établissements d'avoir un pied sur chaque rive mais qui augmente aussi le risque de s'exposer aux répercussions des turbulences locales.

« La stratégie des banques est beaucoup plus prudente depuis 2014, malgré les perspectives de développement qui peuvent se confirmer en cas de paix durable dans la région », indique Nagi Andraos, directeur du département international à Fransabank, qui a ouvert deux agences à Bagdad et Erbil il y a deux ans. La décision de Bank Audi de retarder l'inauguration de sa première branche en Irak alors que la banque a obtenu les autorisations pour en ouvrir 7 en 2013 contraste de son côté avec l'enthousiasme ambiant du secteur d'il y a quelques années. Contactée par L'Orient-Le Jour, la direction de Bank Audi n'a pas souhaité faire de commentaires.

Danger écarté ?

Si « aucune banque libanaise n'est présente dans les régions contrôlées par le groupe État islamique (EI) », comme le soutient le secrétaire général de l'ABL, Makram Sader, « les dissensions entre Erbil et Bagdad ont poussé la BCI à ne plus reconnaître ses liens avec ses branches dans le Kurdistan irakien – Erbil et Suleimaniyé – et par conséquent les capitaux déposés par les banques libanaises. Une situation inédite sur le plan juridique survenue fin 2015 et qui a surpris ces dernières jusqu'à ce que la BCI reconsidère sa position ces dernières semaines. « Les discussions entre la BCI et les banques centrales des pays concernés ont permis d'écarter le danger », confie le secrétaire général de l'UBA, Wissam Fattouh.

Les instances représentatives des banques libanaises ont également dû négocier afin que la BCI assouplisse les modalités d'application de sa décision de novembre 2014 qui impose aux établissements bancaires étrangers présents en Irak d'augmenter leurs capitaux respectifs de 7 millions à 70 millions de dollars, indépendamment du nombre d'agences qu'elles possèdent dans le pays. Une décision « dont les motifs n'ont pas été bien compris par tous les acteurs et qui pourrait devenir vraiment problématique si les tensions entre Bagdad et Erbil atteignaient un point de non-retour », souligne une source bancaire. » Les partenaires de la BCI ont finalement réussi à la convaincre de baisser ce montant à 50 millions de dollars », indique M. Fattouh, avant de préciser que cette mesure doit en principe entrer en vigueur début juin et sera échelonnée sur deux ans, « à moins que la BCI ne consente à décaler son application d'un an comme le demandent certains de ses partenaires ».

Mais ces difficultés ne devraient pas fortement ébranler les perspectives de développement sur un marché en pleine croissance où l'offre de services bancaires est loin d'être saturée. Selon l'UBA, le secteur bancaire irakien a en effet représenté 9,4 % des parts de marché dans les pays arabes en 2015, contre 6,3 % en 2014. « Les perspectives de développement au niveau régional se confirmeront en Irak, mais aussi en Syrie, dès que la phase de reconstruction aura démarré », souligne M. Andraos.




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