Au cœur de la logistique et au plus près des tueries, Salah Abdeslam est un personnage clef des attentats les plus meurtriers jamais commis en France. Son arrestation ouvre de nouvelles perspectives pour l'enquête menée au pôle antiterroriste de Paris et un éventuel procès.
QUAND SERA-T-IL REMIS A LA FRANCE ?
Inculpé samedi en Belgique pour "meurtres terroristes et participation aux activités d'un groupe terroriste", le petit caïd radicalisé de Molenbeek, de nationalité française, est visé par un mandat d'arrêt des juges français. Ce mandat d'arrêt européen, plus simple que l'extradition, lui a été notifié samedi à 16h15 et son avocat a indiqué qu'Abdeslam refusait d'être remis à la France. Ce refus va rallonger la procédure mais ne la paralyse pas. Les textes prévoient un maximum de 90 jours avant la remise effective.
Le tueur présumé du musée juif de Bruxelles, Mehdi Nemmouche, avait été arrêté à Marseille le 30 mai 2014. Il avait été remis à la Belgique fin juillet.
QUEL A ÉTÉ SON RÔLE AU SOIR DU 13 NOVEMBRE?
Son frère Brahim, membre du "commando des terrasses", s'est fait exploser devant une brasserie du boulevard Voltaire. Mais quel était le rôle exact de Salah? Celui d'un logisticien, sans aucun doute. Il a loué des véhicules et des planques en région parisienne, acheté des déclencheurs à distance dans un magasin de pyrotechnie et 15 litres d'eau oxygénée, un composant du TATP.
Prévoyait-il aussi un attentat suicide ? Lors de ses premières déclarations samedi, "qu'il faut prendre avec précaution", il a affirmé qu'il "voulait se faire exploser au stade de France" avec les trois autres kamikazes, avant de faire "machine arrière", a expliqué le procureur de la République de Paris, François Molins. S'il a très probablement convoyé les trois kamikazes sur place, l'enquête devra confirmer ses déclarations sur ses intentions. En effet, Salah Abdeslam a déposé la Clio qu'il conduisait dans le XVIIIe arrondissement de Paris, un lieu épargné et pourtant cité le lendemain comme une cible dans la revendication de l'EI. Son téléphone est localisé ensuite au sud de Paris, où une ceinture d'explosifs est retrouvée, à Montrouge.
LES MOIS PRÉCÉDANT LES ATTENTATS
Le procureur de Paris a attribué à Salah Abdeslam "un rôle central dans la constitution des commandos, en ce qu'il a participé à l'arrivée d'un certain nombre de terroristes en Europe". De fait, il a multiplié les voyages sur le continent, à bord de véhicules de location.
Début août, il est contrôlé lors d'une traversée entre l'Italie et la Grèce dans les deux sens, avec Ahmed Dahmani, un Belge arrêté peu après les attentats en Turquie.
Le 9 septembre, il est contrôlé à la frontière austro-hongroise, avec les faux Soufiane Kayal et Samir Bouzid. Le second est "plus que vraisemblablement", selon le parquet belge, Mohamed Belkaïd, l'homme qui a été tué mardi lors d'une opération policière à Forest, près de Bruxelles. Il s'agit d'un autre homme clé, qui a supervisé le repli du jihadiste Abdelhamid Abaaoud en région parisienne au lendemain des attaques. Selon une hypothèse des enquêteurs, c'est aussi vers un téléphone renvoyant au faux Bouzid qu'un kamikaze du Bataclan a envoyé un SMS juste avant d'entrer dans la salle de concert: "on est parti, on commence".
Le 3 octobre, Salah Abdeslam est aussi contrôlé en Allemagne, à Ulm, avec un complice arrêté vendredi à Molenbeek. Ce suspect avait utilisé ces derniers mois de faux papiers syrien et belge, au nom de Mounir Ahmed Alaaj et d'Amine Choukri. Cet homme avait été repéré en septembre sur l'île de Leros en Grèce, point d'arrivée des migrants fuyant la guerre syrienne. C'est aussi sur cette île qu'ont été enregistrés les deux kamikazes du Stade de France non encore identifiés et que l'EI présente comme des irakiens.
(Lire aussi : Les jihadistes nourrissent une haine spécifique envers la France)
UN DOSSIER QUI CHANGE D'ENVERGURE
Proche d'Abdelhamid Abaaoud, organisateur présumé et tueur des terrasses, Salah Abdeslam est un personnage emblématique des attentats du 13 novembre. Il y a joué les premiers rôles et en détient encore des secrets. Sa présence éloigne le spectre d'un procès où ne comparaîtraient que des seconds couteaux après la mort des neuf assaillants. A ce stade, deux hommes ont été mis en examen à Paris, dont Jawad Bendaoud, soupçonnés d'avoir aidé à fournir la planque où a été tué Abaaoud.
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13 h 50, le 20 mars 2016