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Liban - La psychanalyse, ni ange ni démon

L’addiction est la maladie de la séparation avec la mère (suite)

Nous poursuivons l'analyse de la séparation mère-enfant. Cette séparation conditionne l'état de santé des deux protagonistes. Si elle se fait dans de bonnes conditions, l'équilibre psychique et somatique, autant celui de l'enfant que celui de la mère, est préservé. À l'inverse, si la séparation se fait mal, autant l'enfant que la mère en payeront le prix. Ce que nous avons vu comme dialogues dans L'Orient-Le Jour du 18 février en témoigne.

La psychanalyse nous apprend que la séparation entre la mère et l'enfant se fait très tôt. De l'accouchement au sevrage, à la marche, au langage, à l'apprentissage de la propreté, à la découverte de la différence des sexes, à la résolution du Complexe d'Œdipe et enfin au dépassement de la crise de l'adolescence, toute l'évolution de l'enfant et de l'adolescent se fait par une série de ruptures qui amènent l'enfant à l'indépendance et à la liberté. Dès les premiers pas de l'enfant, il court pour échapper à la mère qui joue à le poursuivre. Et dès les premières syllabes apprises, l'enfant va fabriquer des jeux qui lui permettent d'échapper à l'emprise de la mère. Ainsi en est il de ce fameux jeu observé par Freud chez son petit-fils d'un an et demi, le jeu de la bobine ou le jeu du Fort/Da, devenu célèbre dans le monde psychanalytique pour signifier comment l'enfant va pouvoir se séparer de la mère.
Le petit-fils de Freud jouait avec une bobine attachée à une ficelle. Il faisait disparaître la bobine en disant Fort (une syllabe en allemand qui signifie partie) puis la faisait réapparaître en disant Da (qui signifie voilà). Le geste se répétait et l'enfant scandait la séquence apparition/disparition en répétant Fort/Da. Freud comprit que son petit-fils mettait en scène une autre séquence, réelle, celle de l'absence/présence de sa mère. Par le langage auquel il venait d'accéder, l'enfant pouvait remplacer la mère par la bobine et par les signifiants Fort/Da. Grâce à l'objet substitutif (la bobine) et au langage (Fort/Da), l'enfant pouvait symboliser l'absence et la présence de la mère sans l'attendre passivement comme il le faisait auparavant.

La jubilation de l'enfant indique la grande satisfaction qu'il éprouve. Il vient de dépasser sa dépendance vis-à-vis de la mère. Il vient de jouir du sens en renonçant à la Jouissance Autre. Il passe de la « Jouissance Autre », la jouissance fusionnelle, incestueuse avec la mère, à la « joui-sens », la jouissance du langage, du sens que permet le langage. Avant cet âge, l'enfant était dans une fusion presque totale avec la mère. Presque totale ? En effet, quoique ne percevant pas encore directement la présence du père, le nourrisson est marqué par la séquence absence/présence de la mère. La mère s'absente, régulièrement et à la même fréquence. Elle vient, s'en va, revient puis s'en va, et revient vers le nourrisson. Elle l'allaite ou lui donne le biberon, le nettoie, le change, le berce... Mais elle ne reste pas tout le temps avec lui. Incapable de donner sens à ce manège, le nourrisson enregistre que sa mère s'absente. Cette séquence se répète un nombre incalculable de fois. Le nourrisson ne lui donnera sens qu'après-coup. Une fois acquis les prémices du langage, il réalise que sa mère s'absente pour être aux côtés du père. Le père ou plus exactement la fonction du père est révélée à l'enfant par la séquence absence/présence de la mère. Lorsque l'enfant commence à parler, qu'il nomme « papa », « maman », il renonce à la présence réelle de la mère et, comme on l'a vu la dernière fois, il en fait une image et une fonction internes, une image rassurante et présente à l'intérieur de sa psyché. Grâce à cette image interne et rassurante de la mère, l'enfant apprend progressivement à supporter ses propres angoisses, en faisant appel à cette image interne de la mère, et sans faire nécessairement appel à sa mère réelle.

Tout cela se fait grâce au langage. Le langage donne à l'enfant la possibilité de nommer les choses et, par là, de les maîtriser. « Le mot est le meurtre de la Chose », avancée philosophique, linguistique et analytique qui permet de comprendre que le langage est l'outil principal qui donne naissance à l'humain. Le langage permet à l'enfant de réaliser les différentes séparations qu'on a vues plus haut. À condition que le père remplisse sa fonction d'agent séparateur, parce que représentant du langage. C'est-à-dire à intervenir aux différentes phases de la séparation, pour signifier tant à l'enfant qu'à la mère que leur fusion ne peut plus être, que l'enfant, dès sa naissance, est devenu un être social portant un nom et un prénom. Qu'il n'est plus la possession de sa mère.

 

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