Rechercher
Rechercher

Liban - La psychanalyse, ni ange ni démon

La crise de l’adolescent, ni enfant ni adulte (suite)

Les dialogues qui suivent proviennent de la consultation de mon équipe à l'hôpital Mont-Liban. Dans l'ensemble, ils indiquent les difficultés relationnelles de l'adolescent et de ses parents, le plus souvent la mère. La plupart indiquent le temps de la séparation.

1) – « Maman, je peux savoir pourquoi tu m'attends encore à 4h00 du matin ? »
– « Je veux m'assurer que tu n'as rien pris » (une jeune fille héroïnomane et sa mère).

2) – « Mais Maman tu m'appelles mille fois par jour à mon travail... »
- « Docteur, je dois la surveiller 24h/24, elle ne sait pas distinguer le bien du mal » (la patiente est une journaliste de renom, alcoolique).

3) – « Mon corps est la seule chose qui m'appartient à moi seule, tout le reste appartient à mes parents aussi ?
(une jeune anorexique qui s'automutile).

4) – « Qu'est-ce qu'elle a pris ? » nous demande la mère qui déboule dans mon bureau.
– « Madame, votre fille vient à l'instant d'essayer de se tuer. »
– « Oui, mais quelle drogue a-t-elle prise ? » (échange avec la mère d'une patiente droguée en cure de désintoxication et qui venait de faire une très grave tentative de suicide).

5) – « Après la mort de ma fille... heu de ma sœur, je n'avais plus de cœur pour donner de l'affection à ma fille. »
– La fille répond : « De l'affection, elle n'en a que pour ma sœur morte heu... pour sa sœur morte... depuis que sa sœur est morte, j'avais alors 8 mois, je n'ai plus de place entre elle et sa sœur » (échange entre la mère et sa jeune fille anorexique en présence de l'équipe).

6) – « Je prends de l'héroïne depuis 17 ans, mais pour la première fois dans ma vie, quelqu'un me fait confiance... Alors j'arrête » (un héroïnomane hospitalisé qui revenait de permission et qui refusait de se faire fouiller, selon la règle. Le médecin-chef accepte qu'on ne le fouille pas.)

7) – « Papa, tu en fais toujours trop. »
– « Mais c'est pour toi que je le fais. »
– « Non, c'est pour toi que tu le fais » (dialogue entre un père et son fils héroïnomane).

8) – « Maman, je veux quitter la maison et vivre seule. »
– « Tu veux me laisser seule, tant pis, j'ai mes plantes, elles me suffiront » (dialogue entre une jeune anorexique qui quitte l'hôpital après de longs mois et sa mère).

9) – « De toute façon tu me reviendras car aucun homme ne voudra t'épouser » (la même mère à la même patiente dans la même séance).

10) – La mère : « Je voudrais te donner ma tête, ma façon de penser afin de te guérir définitivement de la drogue. »
– La fille : « Vous vous rendez compte, elle m'oblige à l'écouter du matin au soir et du soir au matin... un jour, elle m'a dit qu'elle était enceinte et qu'elle voulait avorter. Je lui ai dit de le faire. Je n'aurais pas dû car j'aurais eu un frère ou une sœur et je n'aurais pas été seule à la subir » (dialogue entre une jeune droguée et sa mère).

11) – « Je cherche un goût que je ne trouve pas... Je mélange le sucré et le salé et je n'arrive pas à trouver le goût... » (une patiente boulimique/vomisseuse en séance).

12) – « Ma boulimie, c'est moi, je ne peux m'en passer... mon sang manque de quelque chose, c'est comme une drogue... je rentre dans un autre monde, je me recroqueville sur moi-même, je ne supporte plus qu'on me parle » (la même patiente en séance).

13) – « Cela ne sert à rien que tu me surveilles maman, si je veux en prendre, j'en prendrai, que tu me surveilles ou non... si tu continues de me surveiller, je préfère en prendre, comme ça, tu ne me surveilleras plus et tu seras soulagée de ton inquiétude » (un jeune cocaïnomane, sevré depuis longtemps, à sa mère).

14) – « Tu aurais eu 15 ans si tu avais vécu », dit une mère à sa fille. Elle voulait lui dire : « Ta sœur aurait eu 15 ans si elle avait vécu. »

15) – « Va à la cave chercher cet alcool précieux à ton beau-frère qui est notre invité d'honneur ce soir, il l'apprécie beaucoup », dit une mère à son fils alcoolique qui venait de sortir d'une cure de désintoxication, le soir même, le patient rechute.

16) – « Pourquoi tu m'as fait ça à moi, pourquoi tu me fais tant de mal ? »
– « Mais maman, avant de te le faire à toi, je me le suis fait à moi, ce mal » (cet échange est une constante entre les parents et leurs enfants).

17) – « Docteur, il nous tue, il nous use, nous ne pouvons plus supporter cela. »
– « Qui nous ? » répond le médecin.
– « Toute la famille, notre famille, son père, son frère, sa sœur et moi. »
– « Ceux-là sont nous, mais il, c'est qui ? »
– « Lui », dit la mère en désignant son fils.
(Dans le dialogue un toxicomane et sa famille, le « nous » et le « il » sont fréquemment retrouvés).

18) – « Mets ton pull avant de sortir. »
– « Mais maman j'ai chaud. »
– « Non, tu n'as pas chaud. »

Ces morceaux de dialogue entre parents et adolescents sont très fréquents, ils montrent l'incompréhension, l'inquiétude et le rejet, ce qui complique encore plus les soins médicaux et psychologiques.
Dans le prochain article, nous analyserons ces dialogues. Nous y verrons la nuisance du rejet du patient par ses parents et le « nous » et « il » qui en témoignent. De même, nous verrons pourquoi il vaut mieux accompagner le jeune plutôt que de le surveiller.

 

 

Pour mémoire

La crise de l'adolescent, ni enfant ni adulte (suite)

La crise de l'adolescent, ni enfant ni adulte

 

Les dialogues qui suivent proviennent de la consultation de mon équipe à l'hôpital Mont-Liban. Dans l'ensemble, ils indiquent les difficultés relationnelles de l'adolescent et de ses parents, le plus souvent la mère. La plupart indiquent le temps de la séparation.
1) – « Maman, je peux savoir pourquoi tu m'attends encore à 4h00 du matin ? »– « Je veux m'assurer que tu n'as rien...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut