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Culture - Édition

Lorsque Flaubert, Lamartine ou Twain racontent leur Beyrouth

Des extraits de trente récits de voyage réalisés par des observateurs qui ont raconté la ville du temps des Romains, des croisés, des Ottomans... Jusqu'à la première moitié du XXe siècle.

Aller sur les traces des anciens voyageurs, accomplir un périple à travers les terres et les livres ; se rappeler Nerval, Flaubert, Twain, Bell ; en un mot faire œuvre de poète, d'historien, d'ethnologue dans la ville de toutes les fascinations : Beyrouth. C'est ce que propose d'accomplir ce minuscule opus de 150 pages à l'aspect délicieusement suranné. Compilé par l'écrivain et traducteur anglais T.J. Gorton A Beirut anthology : travel writings through the centuries, publié aux éditions de l'Université américaine du Caire, présente des extraits de trente récits de voyage réalisés par des observateurs qui ont raconté le Beyrouth du temps des Romains, des croisés, des Ottomans jusqu'à la première moitié du XXe siècle.

Hormis quelques Américains, un Perse et un Anglais, la plupart des auteurs venaient d'Europe. C'étaient des savants, des prêtres, des écrivains et des diplomates. Échoués sur les rives orientales de la Méditerranée, ils sont nombreux à avoir retranscrit sur papier la saga de leurs pérégrinations.
Journal de voyage ou récit de rêve, reportage ethnographique ou exploration de l'imaginaire ? Sans doute l'un et/ou l'autre. Mais il est certain que c'est avec un sens aigu de l'observation que ces voyageurs enquêtent sur les coutumes, les mœurs, les croyances, les rites d'une mosaïque rassemblée dans une ville cosmopolite nommée Beyrouth.
« Cette ville était une de celles qui doivent vivre ou revivre quand même : les conquérants passent et la cité renaît derrière eux », disait le plus grand géographe du XIXe siècle, Élisée Réclus, en parlant de cette ville qu'il nomme « Beïrt, jadis Beeroth ou les Fontaines, la Béryte des Grecs » dans son ouvrage L'homme et la terre. « Le rivage heureux où fut divinisée la volupté », disait-il encore.

Beyrouth la cosmopolite. Un lieu de contrastes que cet ouvrage entend rappeler comme tel. De rêveries poétiques pour certains alors que d'autres plus perspicaces y décèlent déjà les prémices de tensions et de dissensions confessionnelles.
« Cette ville a été envahie par de nombreuses armées. Des empires s'y sont succédé. Mais le véritable héritage que l'on retient de ce long passé n'est pas tant cette faculté à rebondir et à ressusciter. Ce serait plutôt la quintessence et la pérennité de cet esprit levantin qui habite ses gens », estime Gorton qui a étudié à l'AUB. Avec son épouse libanaise, l'archéologue Andrée Feghali Gorton, il a par ailleurs signé Lebanon through writers' eyes. (Le Liban à travers les yeux d'écrivains). Il a également à son actif une biographie de l'émir Fakhreddine ainsi que des recueils de poésie arabe traduits vers l'anglais.

Commerce, lois et soieries
Mais retour vers Beyrouth. Un hub commercial depuis le temps des Phéniciens, la ville était un lieu de savoir au temps des Romains, son école de droit lui octroyant le titre de « mère des lois ». Pendant que certains voyageurs s'extasient sur la beauté du mont Sannine, d'autres ne tarissent pas d'éloges sur les forêts de pins plantées par l'émir Fakhreddine au XVIIe siècle ou sur les végétations luxuriantes d'oliviers, de figuiers, d'orangers et de grenadiers.
L'admiration de Gérard de Nerval est suscitée par les costumes et les soieries qui drapent les élégantes de la ville. Dans un esprit tout à fait fidèle à ses sorties humoristiques, Mark Twain ne manque pas de remarquer ces « voiles noirs qui cachent le visage des femmes, mais dénude leur poitrine ». Et pendant qu'Alphonse de Lamartine assiste à un mariage chrétien en 1832, Gérard de Nerval raconte les funérailles d'un musulman en 1851.

Cela dit, tous les témoignages ne sont pas dithyrambiques. En 1697, Henry Maundrell affirme plutôt péremptoirement, « mais au-delà des avantages de sa situation géographique, elle (NDRL : Beyrouth) ne possède, à présent, rien d'autre de quoi pavaner ». Après avoir admiré ses monuments, ses citadelles et ses maisons, de nombreux voyageurs se plaignent (jusqu'à la fin des années 1800) des rues étroites, sales ou tout simplement non existantes. « En dépit de son accoutrement moderne, Beyrouth reste une cité du Moyen Âge », écrivait Gabriel Charmes en 1878, critiquant le système confessionnel et féodal qui sclérose le système.
Autant de visions d'une ville qui a divisé – et divise toujours – ses visiteurs comme ses habitants. Aimée ou détestée, Beyrouth garde secrètement un lieu qui remporte l'unanimité de tous : les hammams...

 

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