L'amoncellement des déchets dans les rues de Beyrouth ne devrait pas se produire dans un avenir immédiat. C'est ce qu'a assuré hier le mohafez de Beyrouth Ziad Chbib à L'Orient-Le Jour, en réponse aux craintes selon lesquelles Sukleen pourrait ne plus collecter les ordures de la capitale dans un avenir proche, vu l'état de saturation de l'aire de stockage de La Quarantaine.
« Quand nous avons reçu cette lettre de l'opérateur sur la saturation prochaine du site, nous avons contacté le Conseil du développement et de la reconstruction (CDR), qui traite directement avec la compagnie, explique M. Chbib. Nous sommes convenus d'une manière de stocker les ballots de déchets de manière à ce que le site puisse en accueillir jusqu'au maximum de sa capacité. Le CDR devra en notifier la compagnie incessamment. »
La crise des déchets, qui a découlé de la fermeture de la décharge de Naamé (qui desservait Beyrouth et le Mont-Liban), dure depuis le 17 juillet. Les ordures de Beyrouth (administratif), qui se sont amoncelées dans les rues les premiers temps de la crise, ont été ensuite stockées (de manière temporaire, en principe) sur ce site de La Quarantaine, près du port.
Il y a quelques jours, Sukomi (qui gère les sites de tri et de traitement à La Quarantaine, Sukleen étant chargée de la collecte) avait envoyé des messages au CDR et aux autorités concernées pour les prévenir du fait que le terrain utilisé pour le stockage des déchets serait saturé à partir du 24 février. Pascale Nassar, chargée de communication à Sukleen, confirmait hier encore que le terrain de La Quarantaine sera saturé dès aujourd'hui, mais précisait à L'Orient-Le Jour que la collecte des ordures du Beyrouth administratif se poursuivra comme d'habitude. « Nous continuerons à collecter les ordures de Beyrouth en les stockant dans nos centres à La Quarantaine et à Amroussiyé, dit-elle. Ces centres ont cependant une capacité de stockage limitée. »
Pascale Nassar précise que ces mises en garde ne datent pas d'hier : selon elle, Sukomi a envoyé une première lettre au CDR et au ministère de l'Intérieur et des Municipalités le 4 février, pour les prévenir que le stockage dans ce site ne pourrait plus dépasser les 20 jours. Le 15 février, la compagnie envoyait une autre lettre au mohafez de Beyrouth pour lui transmettre le même message. « Nous n'avons toujours pas reçu de réponse sur un nouveau terrain de stockage de la part du CDR, explique-t-elle. C'est de cet organisme que nous attendons les directives sur la conduite future. »
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Mais pour M. Chbib, cette réponse ne fait pas de doute, le site continuera d'accueillir les déchets pour le moment. Il ne donne cependant pas de plus amples explications sur cette « nouvelle manière de stocker » (qui a été proposée par le CDR, selon lui). Pourquoi cette question de saturation du site a-t-elle été soulevée aujourd'hui s'il y a un moyen de stocker davantage de déchets ? « Le site sera effectivement saturé si des mesures pareilles ne sont pas prises », explique-t-il. Cherche-t-il un nouveau terrain pour éviter de tels problèmes à l'avenir? « Absolument pas, répond-il. Nous attendons avec impatience que l'État trouve une solution. Il faut que ces déchets soient transportés dans une décharge. En fin de compte, que ce soit sur ce terrain ou sur un autre à Beyrouth, il ne s'agit que d'aires de stockage temporaires et non pas d'une décharge permanente. »
Interrogé sur d'éventuels efforts pour instaurer un système de tri à la source dans la capitale, le mohafez affirme que le tri sera très bientôt imposé dans tous les bâtiments relevant de la municipalité, puis peu à peu élargi aux quartiers. « Mais il ne faut pas oublier que c'est la capitale, une ville densément peuplée, ajoute-t-il. Généraliser le tri à domicile prendra beaucoup de temps. »
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« Naamé a encore des capacités de stockage »
Est-ce une coïncidence si cette question de saturation de l'aire de stockage pour Beyrouth, dont la solution semble avoir été facile à trouver, a été soulevée en même temps que de nouveaux appels à la réouverture de la décharge de Naamé ? Il ne fait plus de doute que la commission ministérielle chargée du dossier des déchets, dont la première réunion a été ajournée à aujourd'hui (les ministres prennent décidément leur temps), devrait discuter d'une ouverture de décharges. Les mêmes noms circulent : Naamé, Srar, Costa Brava, potentiellement une réouverture du dépotoir de Bourj Hammoud, fermé depuis 1997.
Hier, c'est peu avant de prendre l'avion pour New York que le ministre de l'Environnement Mohammad Machnouk a de nouveau abordé ce sujet. Il a réaffirmé que le Liban « devait traiter ses déchets sur son territoire ». « La décharge de Naamé peut accueillir plus de déchets, ce qui aiderait à régler la crise pour l'instant, a-t-il ajouté. Mais sur le long terme, nous avons besoin d'une décharge où seront enfouies les ordures après traitement, à condition que le système de traitement soit valable. Toutefois, dans l'immédiat, il faut mettre un terme à cet empilement terrifiant de déchets et à la multiplication des décharges sauvages. »
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commentaires (4)
Hier, c'est peu avant de prendre l'avion pour New York que notre SUPERMINISTRE DE L'ENVIRONNEMENT a de nouveau "abordé" le sujet des déchets... Vous vous rendez compte...il a "abordé" le sujet !!! En attendant...lui se promène à New York, et nous nous promenons au millieu des amoncellements de déchets qui se multiplient partout...grâce à son immense savoir-faire dans le traitement de cette catastrophe...lui, le soi-disant et inamovible Ministre de l'Environnement... Irène Saïd
Irene Said
14 h 24, le 24 février 2016