Une centaine de proches et amis de la famille Zamata, ainsi que des partisans des Forces libanaises ont manifesté leur colère hier soir, à Achrafieh, après l'assassinat mardi de Marcelino Zamata, 26 ans. Bougies en main, les participants ont tenu à rendre hommage au jeune homme et exprimer leur soutien aux siens.
Marcelino a été poignardé, place Sassine, par un Libanais, Hassan Ibrahim Fakih, et un Palestinien, Ahmad Mounir Saad, alors qu'il se trouvait avec sa fiancée. Le crime a eu lieu non loin d'un bureau des Forces libanaises. Alertés par le bruit, des membres du parti se sont précipités afin d'aider le jeune homme. Ce serait ces mêmes membres des FL qui auraient capturé les assassins présumés, selon des amis de la famille, et non une patrouille des Forces de sécurité intérieure. L'histoire de Marcelino Zamata, comme celle de Georges Rif, assassiné en juillet 2015 à Achrafieh pour une question de « priorité de passage », prouve qu'un regard échangé et une parole mal interprétée peuvent tout faire basculer dans un pays où les armes sont à portée de tous et où l'insécurité bat son plein.
(Pour mémoire : Entouré de zones d’ombre, le meurtre de l’officier Kahil pose en filigrane le problème de l’autosécurité)
« Que les assassins soient exécutés à Achrafieh »
Dans la foule amassée hier sur les lieux du crime, un homme confiait à son ami que les assassins de Marcelino « auraient dû être égorgés sur place ». Quant à la famille du défunt, elle a demandé qu'ils soient « exécutés à Achrafieh, sur les lieux même de leur crime ». Réparer la violence par la violence.
Le père, la sœur et la fiancée du jeune homme étaient absents de la manifestation. Selon la chaîne MTV, ils se trouvaient hier soir, au moment du sit-in, à l'hôpital Rizk pour voir la dépouille mortelle de la victime.
Prenant la parole lors de ce rassemblement, Imad Wakim, coordinateur des FL à Beyrouth, a estimé que « Marcelino Zamata est tombé en martyr à cause de l'insécurité et de la faiblesse de l'État libanais ». Il a dénoncé la menace qui pèse sur la sécurité de la population, notamment celle d'Achrafieh, et demandé que la police municipale soit plus efficace. « Nous demandons à l'État d'étendre son autorité sur l'ensemble du territoire et de réactiver le rôle de la police municipale à Beyrouth car cette situation est inadmissible. Les habitants d'Achrafieh et les enfants du pays ne l'acceptent pas », a-t-il dit. « Les habitants d'Achrafieh réclament l'uniforme kaki (des FL) et l'"autosécurité". Que l'État assume ses responsabilités et assure notre sécurité ou nous l'assurerons nous-mêmes. Nous savons comment interdire les armes illégales dans nos quartiers », a-t-il ajouté.
Jad Demian, président du comité étudiant des FL, a également demandé à l'État de veiller à la sécurité des citoyens. « Les ministères de l'Intérieur et de la Défense doivent assumer leurs responsabilités. Ils sont tenus d'assurer la sécurité de la population, sinon on fera le nécessaire », a-t-il dit.
L'ancien ministre Nicolas Sehnaoui, venu manifester son soutien, a fait remarquer que ce n'était pas la première fois que ce genre d'incidents arrivait à Achrafieh. Il a remercié les FL pour leur intervention et demandé à l'État de protéger les citoyens.
Il va sans dire, dans un pays où le feu couve sous la cendre, que l'identité de la victime et des criminels ainsi que leurs appartenances religieuses ont donné lieu à toutes sortes de commentaires haineux et racistes, notamment sur les réseaux sociaux. Le crime a pris une tournure communautaire alarmante, certains allant même jusqu'à appeler les chrétiens sur Facebook à s'armer en permanence. Aucun discours d'apaisement n'a été adressé à la famille, dévastée par la mort de leur fils et demandant justice, ni aux habitants révoltés. L'évocation de l'« autosécurité » comme solution face à la déliquescence sécuritaire n'est pas sans rappeler la guerre civile et raviver les craintes de retomber dans le scénario cauchemardesque des luttes intestines dont le pays paie toujours le prix. Les réactions à ce crime renvoient, une fois de plus, à l'importance d'effectuer un réel travail sur la mémoire de la guerre civile et une vraie réconciliation nationale, non pas seulement entre les politiques, mais au sein de la population.
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« Justice sera rendue », promet Rifi
Dans un communiqué publié tard en soirée, le ministre de la Justice, Achraf Rifi, a promis aux parents de Marcelino Zamata, tué mardi soir à Achrafieh, qu'il « fera subir aux criminels des sanctions à la mesure du crime odieux qu'ils ont commis », rappelant ce qu'il avait dit à l'épouse de Georges Rif, poignardé également l'an dernier dans les rues d'Achrafieh. « En tant que parent qui ressent les souffrances de ceux qui perdent des fils, assassinés par traîtrise et injustement par des criminels et des vandales, parce que je suis chargé de veiller au bon déroulement de la justice, et parce que je suis responsable et que le devoir juridique, moral et national m'incite à le faire, je leur promets que justice leur sera rendue, même si rien ne pourra compenser leur perte », a-t-il ajouté.
Pour mémoire
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commentaires (10)
Au Liban le meurtre sert de justice... Le ministre de la justice ? Juste bon a toucher sa solde !!!!
FAKHOURI
11 h 37, le 19 février 2016