La tempête de protestations soulevée par la libération sous caution de l'ancien ministre libanais Michel Samaha ne faiblit pas. Vendredi, les milieux du 14 Mars et antisyriens, mais aussi les détenus islamistes à la prison de Roumieh, ont exprimé chacun à sa façon leur indignation.
En début de soirée, les jeunes partisans de l'alliance du 14 Mars et le Parti socialiste progressiste ont organisé un sit-in devant le domicile de M. Samaha, à Achrafieh, au milieu de mesures de sécurité renforcées. Les participants ont dénoncé la décision du tribunal militaire qui, selon eux, "légalise le crime".
"Achrafieh ne s'agenouille ni devant le Hezbollah ni devant quiconque", a martelé le député Nadim Gemayel lors du rassemblement. "Nous sommes venus dire non à la nomination du leader des Marada, Sleiman Frangié, et du chef du bloc parlementaire du Changement et de réforme, Michel Aoun, comme candidats à la présidentielle", a-t-il ensuite clamé. Il a en outre appelé à radier le nom de Michel Samaha de tous les registres du parti Kataëb dont M. Samaha avait été longtemps un membre actif.
Les jeunes partisans de l'alliance du 14 Mars ont enfin appelé à une manifestation lundi à 18h à Tripoli, au Liban-Nord.
Michel Samaha a été libéré sous caution jeudi par la Cour de cassation militaire après avoir purgé une peine de 4 ans et demi de prison (trois ans et demi de facto, l'année judiciaire étant de neuf mois) pour avoir transporté des explosifs en vue de perpétrer des attentats au Liban en 2012. Son procès doit reprendre le 21 janvier.
Estimant le jugement prononcé le 13 mai dernier 2015 trop clément, le procureur militaire s'était pourvu en cassation, poussant l'avocat de M. Samaha à faire de même. Face à ce double pourvoi, la cour de cassation, à l'unanimité de ses cinq membres, le président (civil) de la cour, Tani Lattouf et quatre autres militaires, semble avoir jugé que M. Samaha avait purgé la peine moyenne prévue par le code pénal pour le crime dont il a été reconnu coupable et qu'il pouvait bénéficier de la présomption d'innocence pour les nouveaux chefs d'accusation soulevés par le procureur, en attendant le jugement définitif de la Cour de cassation militaire.
(Lire aussi : Tollé dans les milieux du 14 Mars et antisyriens)
Cette libération a résonné dans les milieux des détenus islamistes, dont certains ont déjà passé plusieurs années en prison, dans l'attente de leur jugement. Certains auront notamment passé plus de temps en prison que ne le prévoit leur sentence. Ces délais sont souvent causés par la lenteur du système judiciaire et le manque logistique au niveau des tribunaux.
Pour contester la relaxe de Michel Samaha, plusieurs détenus islamistes à la prison de Roumieh se sont ainsi mis en grève de la faim. Dans la nuit de jeudi à vendredi, des prisonniers incarcérés à Roumieh ont commencé à cesser de manger, de boire, ou de prendre leurs médicaments, a rapporté l'Agence nationale d'information (Ani, officielle). Les grévistes ont également bloqué l'accès à la cafétéria de la prison. Ces détenus réclament leur libération.
"Nous réclamons d'être tous amnistiés, sinon, nous maintiendrons notre grève de la faim", a averti Ziad Alouki, un chef de bande islamiste radical incarcéré depuis plusieurs mois, lors d'un appel téléphonique avec la chaîne LBCI. Les Forces de l'ordre ont dépêché des ambulances à Roumieh afin de transporter d'éventuels cas urgents.
Parallèlement à la grève à Roumieh, les proches des détenus islamistes ont manifesté leur colère dans plusieurs rues de Tripoli, au Liban-Nord. "Nous réclamons l'incarcération à nouveau de Michel Samaha, et la libération des jeunes musulmans (...)", a martelé un porte-parole des familles des détenus. Et de mettre en garde : "Si nos demandes ne sont pas prises en considération, la situation se compliquera".
A Beyrouth, plusieurs artères ont été brièvement bloquées par des individus qui protestaient contre la relaxe de Michel Samaha.
Dans les milieux politiques, les protestations se poursuivaient également. Khaled Daher, député du Akkar, a affirmé qu'il allait porter plainte personnellement, devant les instances judiciaires civiles, contre Michel Samaha.
Le ministre de la Santé, Waël Bou Faour, a de son côté considéré que "la relaxe de l'ancien ministre est un coup porté à la justice", estimant que "cette décision encourage le meurtre". "Nous attendons une rectification de ce grand péché de la part du corps judiciaire", a-t-il ajouté.
Le Premier ministre Tammam Salam s'est pour sa part entretenu vendredi avec le procureur général près la Cour de Cassation, le juge Samir Hammoud afin d'obtenir des explications sur la relaxe de Michel Samaha. Le chef du gouvernement a réclamé "d'entreprendre les mesures nécessaires à l'accélération du procès" de l'ancien ministre, au vu du "caractère important et sensible de l'affaire (...)".
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commentaires (7)
BIZARRE... COMME IL Y A DES GENS FANATIQUES QUI FESTOIENT POUR LA LIBERATION DE QUELQU,UN DONT L,OBJECTIF ETAIT DE METTRE LE PAYS A FEU ET A SANG...
LA LIBRE EXPRESSION
14 h 19, le 16 janvier 2016