Rechercher
Rechercher

Culture - Portrait

Comment écrire un best-seller, selon Michel Bussi

À l'occasion de son premier passage à Beyrouth, l'un des plus populaires écrivains français actuels revient sur son parcours à succès. Et sa recette miracle ?

Jusqu’à ses 40 ans, Michel Bussi se considérait comme un écrivain frustré qui ne serait jamais publié. Photo Michel Sayegh

Celui qui pourrait franchir le million d'exemplaires vendus en l'espace d'un an reste encore un inconnu. À l'étranger comme en France. Pas de Goncourt, de Renaudot ou de Femina sur sa cheminée, simplement de modestes prix régionaux, mais l'auteur n'a pas besoin de « trophées » pour vendre ses livres. Près de 500 000 ouvrages écoulés en 2013, 843 000 en 2014... Chaque année, de plus en plus de lecteurs et de lectrices découvrent les intrigues ficelées par Michel Bussi. Que ce soit la forme de son visage, son implantation de cheveux ou sa barbe hérissée de trois jours, sa ressemblance physique avec Marc Lévy – l'autre superstar des ventes de romans – est troublante.

En attendant son tour
Son nom n'a pas (encore) la renommée d'un Guillaume Musso ou d'une Katherine Pancol. Mais, peu à peu, le bouche-à-oreille trace sa trajectoire vers les têtes de gondole. Ses livres bénéficient d'une seconde vie grâce aux rééditions en version poche. Ainsi, ses ouvrages sont disponibles dans les librairies comme dans les supermarchés, les points de vente en gare ou dans les aéroports. Mais avant de devenir un écrivain populaire grâce au succès phénoménal de Un avion sans elle (2011, Presses de la cité), le chemin n'a pas été des plus aisés. Pendant quinze ans, entre 1990 et 2005, ses manuscrits sont ignorés et finissent dans la poubelle des éditeurs. Jusqu'à ses 40 ans, il se considère comme un écrivain frustré qui ne sera jamais publié. En attendant son tour, il devient géographe électoral à l'Université de Rouen.

Avant même de devenir universitaire, dès sa jeunesse, la passion de l'écriture lui colle à la peau. « D'aussi loin que je me rappelle, j'ai ce goût pour les histoires. Je me revois à six ans inventer des suites de récits, écrire sur des poésies, de petites nouvelles sur des feuilles volantes », raconte-t-il souriant et humble. « Je savais que c'était ça qui me faisait tenir debout. Alors, lorsque j'ai reçu une réponse négative pour mon premier roman, je me suis dit que c'était la fin du monde », confie le désormais cinquantenaire. Serge Brussolo, qu'il décrit comme « une idole absolue », René Barjavel, Robert Merle, Charles Exbrayat et Daniel Pennac, tous ces auteurs de littérature française populaire des années 70 - 80, l'ont beaucoup inspiré. Il dévorait, sans a priori, chacun de leurs livres.
Michel Bussi ne le cache pas : la route a été longue avant d'atteindre son unique but, écrire des romans. Après l'échec de son premier ouvrage, l'auteur français tente sa chance avec le roman à énigmes Code Lupin (2006). « Ce n'était pas le premier roman que je voulais écrire », confesse-t-il. Un récit qu'il n'hésite pas à qualifier de « blague » aujourd'hui. Pourtant, ce pastiche de Da Vinci Code va lui permettre de se faire un nom dans le polar. L'auteur s'appuie sur sa légitimité de géographe normand et sa connaissance de Lupin afin d'être publié. C'est chose faite en 2005. Sa maison d'édition Presses de la cité attend 500 ventes, l'ouvrage sera réédité une dizaine de fois pour atteindre environ 7 000 exemplaires. Une fois ce premier cap franchi, « chaque marche est moins grande ».

Recette magique
Un début improbable en quelques pages et avoir une idée précise de la manière de terminer le récit : voilà deux des ingrédients impératifs à savoir articuler pour écrire un livre selon Michel Bussi. « Il faut avoir une fin qui est au moins à la hauteur de la promesse de départ », explique l'auteur. Le romancier tient également à dissocier le cheminement de l'intrigue et les personnages. « J'aime travailler la colonne vertébrale dans un premier temps, avant de m'occuper de la psychologie des personnages. Je ne peux donner de la chair à mon roman (que) si j'ai un squelette solide au départ », commente l'écrivain avec un léger cheveu sur la langue.

Humble, le romancier français parle de son succès comme d' « un miracle absolu ». Plusieurs de ses romans pourraient même être adaptés à la télévision ou au cinéma. « Je serai évidemment comme un gamin si les projets vont au bout, mais pour l'instant, je me focalise sur mes prochains livres. » À l'aise avec sa réussite, l'auteur n'a rien à cacher. Il gagne « un peu moins d'un euro par livre ». La somme accumulée ces trois dernières années lui permettrait donc d'arrêter d'enseigner la géographie. Pourtant, il ne le souhaite pas, pour l'instant du moins. Le Normand continue d'écrire durant son temps libre, en week-end, à la nuit tombée ou pendant les vacances. D'ailleurs, s'il a pu se rendre au Salon du livre de Beyrouth, c'est parce que « cette occasion tombait pendant les vacances ». Se disant organisé et craintif, il ne veut pas franchir le pas d'une manière trop brusque.
« C'est tellement improbable. Il y a quelques années, je me disais que si j'arrivais un jour à atteindre les 10 000 livres, cela serait un truc de malade (sic), ajoute l'auteur, comme s'il avait du mal à réaliser ce qui lui arrive. Je me blinde en me disant que cela ne peut pas durer, que les lecteurs ne vont peut-être pas aimer mon prochain livre. C'est un doute qui me permet d'avancer et de ne pas me reposer sur mes lauriers. » Même s'il croit à sa bonne étoile, Michel Bussi continue à se questionner, et c'est peut-être aussi cela la clef de son succès.

 

Lire aussi
Le Femina ne cache pas son amour pour « Bolt' »

L'Orient et l'autofiction sacrés par les Goncourt et Renaudot

Le triangle amoureux pour retrouver Racine

Celui qui pourrait franchir le million d'exemplaires vendus en l'espace d'un an reste encore un inconnu. À l'étranger comme en France. Pas de Goncourt, de Renaudot ou de Femina sur sa cheminée, simplement de modestes prix régionaux, mais l'auteur n'a pas besoin de « trophées » pour vendre ses livres. Près de 500 000 ouvrages écoulés en 2013, 843 000 en 2014... Chaque année, de plus...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut