« Premières pluies sérieuses hier. Bien que les averses aient été intermittentes, les rues de Beyrouth ont été submergées. Comme chaque année, la municipalité n'avait pas pris la précaution de déboucher les caniveaux (...). Résultat : en quelques minutes, la corniche du Fleuve et le boulevard de Dora avaient pris leur aspect des jours d'hiver et les voitures s'enlisaient dans leurs énormes flaques d'eau boueuse. »
Ce passage est extrait des archives de L'Orient, en date du 21 octobre 1969. Il y a 46 ans donc. Presque un demi-siècle.
Ce week-end, le Liban avait, comme chaque année à la même saison, rendez-vous avec la pluie. Précieuse pluie dans un pays en mal d'eau. Pluie devenant cauchemar dans un pays dont l'État est en déliquescence. Pluie d'autant plus cauchemardesque que cette année, tombant sur les monceaux d'ordures qui se sont accumulés dans les rues depuis le début de la crise des déchets, elle a transformé certaines rues en torrents d'immondices. Avec tous les risques sanitaires que l'on se refuse à imaginer si l'on n'a pas décidé de prendre un aller simple pour ailleurs.
La crise des déchets était au menu, hier, de la table de dialogue. Elle sera aussi à celui du Conseil des ministres qui pourrait se tenir jeudi. Rien n'est sorti de la table de dialogue. On ne veut plus espérer grand-chose, réflexe de survie, d'un gouvernement qui ne gouverne plus depuis longtemps.
Qui bloque ? Le Hezbollah, disent les uns, certains groupes de la société civile, avancent d'autres, les écologistes, entend-on encore... Le ministre Chehayeb, auteur du plan éponyme produit bien trop tard pour une crise totalement prévisible, s'est donné jusqu'à jeudi pour « tout révéler ».
Qui bloque ? À ce stade, il faut creuser plus profond. Ce qui bloque, ce sont des années de mauvaise gouvernance, de partage du gâteau par toutes les parties. Ce qui bloque, c'est la politisation de tout et n'importe quoi, la corruption et le clientélisme à outrance. Ce qui bloque, aujourd'hui, est ce qui bloquait en 1969.
Évoquant, fin septembre, la crise des réfugiés syriens, le commissaire à l'Élargissement de l'UE, Johannes Hahn, avertissait que la « prochaine grande vague » de migrants syriens en Europe pourrait venir du Liban. Si, face à cette crise des déchets, tout le monde ne commence pas sérieusement à assumer ses responsabilités, à commencer par ceux qui prétendent diriger le Liban, mais aussi au niveau individuel (lors des prochaines élections par exemple), ou au niveau de la société civile, qui doit refuser toute subordination aux partis politiques, cette prochaine vague risque bien d'emporter aussi des Libanais à bout d'espoir.
commentaires (4)
Le summumm du continuum reside dans le momentum des primumm delirumm de ceux qui se raclent la gorgumm ... Ratatouillumm ....
FRIK-A-FRAK
15 h 21, le 27 octobre 2015