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L'expatrié canadien n'est pas canadien pour voter

La question identitaire a de multiples facettes et "les Canadiens sont sensibles à l'image de leur citoyenneté".

Photo AFP

Comme le chanteur Neil Young, l'actrice Pamela Anderson ou l'ancienne gloire du hockey Wayne Gretzky, le Canadien Nicolas Duchastel de Montrouge ne votera pas aux législatives du 19 octobre car il vit à l'étranger depuis trop longtemps. Ce Canadien expatrié aux Etats-Unis depuis 15 ans a décidé de protester à sa manière contre une loi électorale le privant de son droit de vote: il brigue les suffrages à Calgary dans la circonscription du Premier ministre sortant Stephen Harper.

L'ingénieur informatique ne se fait aucune illusion sur ses chances de détrôner le chef du gouvernement conservateur dans une circonscription où ce dernier est élu sans discontinuer depuis 2002. "Je veux juste attirer l'attention sur le fait que chaque Canadien a le droit de voter, peu importe où il vit", dit-il au téléphone depuis Seattle où il réside.

En allant défier à distance Stephen Harper, il veut protester contre ce qu'il qualifie de "perte d'un droit démocratique élémentaire" pour 1,4 million d'expatriés qui se trouvent dans la même situation. "Voter est un devoir de citoyen et on m'empêche de remplir mon devoir", ajoute-t-il, tout en trouvant paradoxal qu'il puisse néanmoins se porter candidat lors du scrutin.

La justice canadienne, dans sa décision cet été, a estimé "que permettre à tous les citoyens non résidents de voter leur permettrait de participer à l'élaboration de lois qui affectent les résidents canadiens dans leur vie quotidienne mais qui n'ont peu, voire aucune conséquence pratique, dans la leur". En clair, un expatrié n'a pas à décider du sort des Canadiens restés au pays car, selon le juge George Strath, "cela éroderait le contrat social et saperait la légitimité des lois".
Cette décision a immédiatement déclenché la controverse. La charge la plus virulente est venue de l'acteur octogénaire Donald Sutherland, qui partage son temps entre sa résidence en Californie et celle au Canada.

(Lire aussi : Le Canada déchoit de sa nationalité un homme ayant projeté des attentats)

"Pas citoyen"?

"Si vous ne vivez pas ici en permanence vous ne pouvez pas voter. Les Américains qui vivent à l'étranger peuvent voter. Ils peuvent voter car ils sont citoyens. Et moi je ne le peux pas. Pour quelle raison? Parce que je ne suis pas citoyen?", a-t-il écrit dans une tribune publiée dans le quotidien canadien Globe and Mail.
Celui qui a interprété au grand écran "The Dirty Dozen" compte bien sur le fait que les Canadiens "voteront pour le retour d'un gouvernement qui représentera à nouveau les valeurs que le reste du monde nous enviait" avant près d'une décennie de pouvoir conservateur.

La question identitaire a de multiples facettes et "les Canadiens sont sensibles à l'image de leur citoyenneté", selon Semra Sevi, chercheuse à l'Université de Toronto. Ce n'est pas le vote des expatriés qui peut cependant influer sur le résultat des législatives car lors du dernier scrutin en 2011, seulement 6.000 expatriés avaient voté, souligne à l'AFP Mme Sevi. Le doute pourrait à la rigueur planer pour le résultat d'une seule circonscription sur les 308 en jeu il y a quatre ans lorsque dans l'Ontario, où 20 expatriés avaient voté, le gagnant l'avait emporté par 18 voix, explique-t-elle.
Avec le règlement électoral, "nous ignorons les expatriés et nous faisons comme s'ils n'existaient pas", commente Mme Sevi. "C'est une erreur de les considérer comme une charge plutôt que comme un atout".

"La voie pour renforcer la démocratie canadienne n'est pas d'interdire à un groupe de voter", estime Mark Kersten, chercheur à la Munk School of Global Affairs de Toronto. Il rejette l'argument de la justice qu'un votant doit décider pour des lois qui régissent son quotidien car, dit-il, "je ne crois pas que les gens votent égoïstement".
"De nombreux Canadiens votent pour les politiques de santé qui touchent leurs parents ou pour soutenir un système de protection sociale fondé sur des principes d'une distribution équitable de la richesse", souligne M. Kersten.


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