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À La Une - L'Orient Littéraire

La théorie du complot

C'est dans un ouvrage tout en nuances que Fouad Khoury-Helou analyse la politique des États-Unis au Moyen-Orient, politique que les peuples arabes aiment craindre ou détester. À tort ou à raison...

D.R.

À tort ou à raison ? D'emblée, l'auteur précise qu'il ne s'agit pas d'un réquisitoire contre les États-Unis. Pour autant, ce n'est pas non plus un plaidoyer en leur faveur. Il s'agit simplement de remettre les choses à leur place ; de faire le constat de l'« hyperpuissance » américaine tout en soulignant que les États-Unis ne sont pas l'État prédateur que l'on imagine. Et ce, même si la politique américaine imprime fortement sa marque, au point de faire l'histoire du Moyen-Orient, « autant voire plus que les peuples de cette région ne la font eux-mêmes ».

L'objectif de la politique américaine se situe en réalité « bien au-delà du Moyen-Orient », lequel n'est qu'un « élément » de sa politique ; une carte dans son jeu.

Dès les premières pages, Khoury-Helou réfute deux théories largement répandues dans le monde arabe. La théorie de l'erreur (miscalculation) qui implique un « comportement erroné et non-intentionnel ». Et bien sûr... la théorie du complot qui accuse les États-Unis et leurs alliés « d'agir implicitement contre l'intérêt des peuples du Moyen-Orient dans le but exclusif de dominer cette région et de s'en approprier les ressources ».

La théorie d'un complot postcolonial visant spécifiquement cette région est ainsi mise à mal par les théories « réaliste et néo-réaliste » des rapports de forces entre États. De plus, l'existence d'un État plus puissant que les autres pousse les moins puissants à se liguer contre lui pour équilibrer un rapport de forces inégal. En ce sens, les États-Unis interviennent au Moyen-Orient parce qu'ils y sont « contraints » ! L'idée peut surprendre... Mais, de ce point de vue-là, ils y sont contraints « par le jeu des rivalités mondiales » ; pour éviter qu'une autre puissance, la Russie ou la Chine par exemple, ne vienne « fatalement y prendre leur place ».

La théorie du complot sioniste est, de même, fragilisée. En effet, la création de l'État d'Israël, avec le soutien américain, « n'est pas à l'origine dirigée contre les Arabes » mais contre la Grande-Bretagne et l'U.R.S.S. Elle représente même « l'un des actes majeurs de la guerre froide ». Les États-Unis favoriseront par ailleurs l'émergence de régimes arabes forts reposant sur une « idéologie anticommuniste comme le nassérisme ou le baathisme ».

Expulser Londres tout en brisant les ambitions soviétiques : l'argument est convaincant. L'auteur relève cependant qu'il est « tout à fait possible que l'Amérique ait vu dans la position géographique de l'État hébreu un moyen de contrôler la région ».

La théorie d'un complot occidental demeure la plus difficile à ébranler. Après la guerre des Six Jours, certains, dont Nasser, accusèrent les États-Unis et la Grande-Bretagne d'y avoir participé directement ; les forces aériennes en action du côté israélien étaient « trois fois supérieures » à la taille de l'aviation de l'État hébreu. Le président Johnson avait d'ailleurs déclaré ouvertement, deux ans plus tôt, que les États-Unis étaient prêts à « armer massivement » Israël. Il est, de plus, établi que le gouvernement israélien avait reçu un « feu vert explicite » l'autorisant à déclencher les combats.

Mais les enjeux de cette guerre perdue d'avance dépassaient largement Israéliens et Arabes, la « cible principale étant Moscou ». De fait, l'Union soviétique y perd sa crédibilité aux yeux des Arabes qu'elle n'a pas pu aider. Le sujet étant controversé, l'auteur observe que « le débat reste ouvert ».

Circonspect et scrupuleux à l'extrême, Khoury-Helou joue sans cesse sur la nuance. À titre d'exemple, il rapporte qu'« il n'existe à ce jour aucune preuve formelle » que les États-Unis aient « délibérément provoqué »la guerre irako-iranienne mais souligne que par leur politique régionale, « ils ont créé de facto les conditions propices à cette guerre, rendant son déclenchement inéluctable ».

Il n'existe pas non plus de « preuve accessible et irréfutable » que Washington ait initié et encouragé la révolution iranienne. « L'explication la plus crédible est donc que les États-Unis aient vu venir cette révolution mais qu'ils l'aient laissée se dérouler car elle allait dans le sens de leurs intérêts. »

De la Première Guerre mondiale à nos jours, l'auteur passe au crible la politique américaine au Moyen-Orient, étape par étape, pays par pays, et nous livre un ouvrage extrêmement bien documenté... et d'autant plus méritoire qu'il reconnaît ses limites ; ne mélangeant pas opinions et certitudes.

 


Bibliographie
L'Amérique et le Moyen-Orient de Fouad Khoury-Helou, Hermann, 2015, 292 p.

 

Retrouvez l’intégralité de L'Orient Littéraire ici

À tort ou à raison ? D'emblée, l'auteur précise qu'il ne s'agit pas d'un réquisitoire contre les États-Unis. Pour autant, ce n'est pas non plus un plaidoyer en leur faveur. Il s'agit simplement de remettre les choses à leur place ; de faire le constat de l'« hyperpuissance » américaine tout en soulignant que les États-Unis ne sont pas l'État prédateur que l'on imagine. Et ce,...

commentaires (5)

hahaha c'est l'arroseur arrose, haha bachar et le membre de la resistance (resistance oui mais seulement resistant a tout ce qui est constitutionel)

Bery tus

15 h 01, le 28 septembre 2015

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Commentaires (5)

  • hahaha c'est l'arroseur arrose, haha bachar et le membre de la resistance (resistance oui mais seulement resistant a tout ce qui est constitutionel)

    Bery tus

    15 h 01, le 28 septembre 2015

  • Depuis le début, en 2011, les Russes le cherchent, car il en va de leur sécurité. La Russie est la cible ultime de l’incendie, allumé sur sa périphérie. La Syrie constitue son point d’appui, en Méditerranée, et une rupture de l’alliance Iran-Syrie-Hezbollah serait autant d’avancées de l’OTAN, sur son flanc Sud. S’ajoute, enfin, le facteur bacterie, qui vise la Russie, au premier chef. Après la Syrie, elle est next à déstabiliser. Les bact. d'origine Russe se font la main, en Syrie et en Irak, et l’on dit que la langue de travail, au quartier général du «califat» est autant le russe que l’arabe. La Russie a tout intérêt à anéantir les bact, au Moyen-Orient, afin de ne pas les rencontrer chez elle. Une coalition, pour quoi faire ? Telle n’est pas la politique des États-Unis. La coalition américaine se limite à endiguer le «califat», l’empêchant de se répandre en territoire interdit, mais lui laissant la voie libre, en Syrie. Les colonnes de camions et de pick-up des bacts, qui ont pris Palmyre, le 21 mai, ont circulé à découvert, en plein désert, sans être inquiétées par l’US Air Force. En clair, les États-Unis comptent sur les bact., comme levier et atout, en Syrie, plus tard, en Russie. Purement aérienne, la coalition américaine ressemble, au mieux, à une gesticulation, au pire, à un écran de fumée, pour une future campagne de bombardement contre la Syrie. La guerre, évitée en septembre 2013, serait déclenchée sous un nouveau prétexte.

    FRIK-A-FRAK

    18 h 08, le 27 septembre 2015

  • UNE DES NOMBREUSES ANALYSES QUI PEUVENT ÊTRE FAITES SANS POUR AUTANT QU'ELLE SOIT LA JUSTE... CAR ELLE NAVIGUE DANS LES DÉDALES DES SUPPOSITIONS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    17 h 16, le 27 septembre 2015

  • aha voila qui vas faire mal au prétendant de la moumanaa haha !! je voudrais rajouter une chose c'est que les grande puissances se sont partager le monde apres non la 2 eme guerre mais la 1 ere guerre mondiale, comment en se départageant les ideologies et en essayant d'enroler le plus de monde ou de pays possible ... tjrs SELON UN AGENDA BIEN DETERMINER !!

    Bery tus

    15 h 16, le 27 septembre 2015

  • Bien analysé, Sétt Lamia. Merci.

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    14 h 54, le 27 septembre 2015

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