Pendant ce temps, le sang continue de couler au Yémen et en Syrie...

En dépit des informations véhiculées par des médias régionaux sur une rencontre entre les ministres saoudien et iranien des Affaires étrangères en marge de la session ordinaire de l'Assemblée générale de l'Onu, qui serait le signe d'un début de dialogue pour trouver des solutions aux crises régionales, celles-ci semblent s'envenimer. La guerre se poursuit au Yémen et en Syrie et les développements deviennent de plus en plus dramatiques. L'attaque saoudienne contre le Yémen entre dans son cinquième mois et devient de plus en plus violente, notamment pour les forces de la coalition menée par l'Arabie saoudite, qui ont enregistré de grandes pertes il y a une dizaine de jours. De violents combats se déroulent aussi dans la province stratégique de Maareb, qui ouvre la voie vers le nord du pays et vers la capitale Sanaa, fief d'Ansarallah (le nom structurel des houthis). En même temps, les forces yéménites hostiles au président démissionnaire Abed Rabbo Mansour Hadi et à son parrain saoudien se battent désormais en territoire saoudien et sont en train de reprendre des provinces qui étaient yéménites dans le passé... Des négociations de paix sont sans cesse annoncées à Mascat et même on parle d'un dialogue entre des représentants d'Ansarallah et d'autres du royaume saoudien, mais sur le terrain, la bataille continue de faire rage et laisse peu de place à un éventuel accord politique...

Mais c'est surtout vers la Syrie que l'attention internationale et régionale se porte. De nouveaux éléments sont apparus qui augurent de développements importants attendus dans ce pays. D'abord l'appui russe au régime syrien est de plus en plus marqué. Un visiteur libanais de retour de Syrie rapporte que les autorités de ce pays ont reçu récemment un lot d'armes de fabrication russe modernes et sophistiquées dont six avions Mig 31. Ces Mig sont la dernière version des avions militaires russes qui peuvent atteindre leur cible avec une grande précision. L'armée syrienne a aussi reçu le tout dernier modèle des missiles antichars Kornet, ainsi que des canons 130 mm revisités pour être plus modernes et plus mobiles. De plus, il ne se passe pratiquement pas un seul jour sans que les responsables russes réitèrent leur appui au régime syrien qu'ils considèrent le plus efficace dans la guerre contre Daech et incontournable dans toute solution pour la crise syrienne. Les médias proches de l'opposition syrienne et de ses parrains cherchent en vain à interpréter les propos des dirigeants russes et à y déceler un affaiblissement de leur appui au régime syrien. Chaque jour une nouvelle preuve de ce soutien total est donnée. La dernière en date est l'annonce par les Russes de leur volonté d'effectuer des manœuvres militaires navales très importantes au large des côtes syriennes, dans un message clair aux Occidentaux et aux puissances régionales qu'ils n'ont aucunement l'intention de renoncer à leur base navale à Tartous.

En parallèle à ces mesures militaires, le président russe Vladimir Poutine a annoncé récemment que le président syrien Bachar el-Assad est prêt à partager le pouvoir avec les composantes de l'opposition. Par cette phrase, le président russe a donné deux indications, d'abord que la solution politique en Syrie passe par Moscou et ensuite qu'elle se fera avec le président syrien qui est prêt à faire des concessions et donc à trouver une nouvelle formule de pouvoir qui donne plus de poids à la communauté sunnite, puisque malheureusement tous les scénarios de solution sont actuellement basés sur un partage confessionnel du pouvoir, en Irak, en Syrie... et au Liban.

Pour l'instant, il est toutefois clair que la phrase est tombée dans l'oreille de sourds, puisque les combats se poursuivent sur le terrain. Selon des informations en provenance de Syrie, une grande offensive des forces de l'opposition serait en préparation dans le nord du pays, avec l'appui de la Turquie. Le président turc n'aurait pas apprécié le refus syrien d'inclure les Frères musulmans dans une formule de dialogue et plus tard de solution. Il veut donc profiter du temps qui reste avant les prochaines élections législatives turques pour mener une vaste offensive militaire dans le nord du pays qui non seulement permettrait d'instaurer la fameuse zone tampon qu'il réclame depuis le début de la guerre, mais aussi lui assurerait un rôle important dans les futures négociations de sortie de crise. Selon des sources libanaises proches du terrain syrien, le nord du pays est le seul lieu où il est possible à l'opposition appuyée par la Turquie et par les pays du Golfe d'effectuer des percées.

Par contre, selon les mêmes sources, les récents combats dans la zone de la Ghouta orientale, proche de la capitale Damas, ne seraient pas décisifs et seraient destinés à calmer les critiques adressées à Zahrane Allouche qui dirige l'opposition dans la Ghouta orientale et qui est accusé de ne rien entreprendre pour desserrer l'étau sur la région de Zabadani. Selon ces sources, les hommes de Allouche auraient donc pris certaines positions à l'armée syrienne qui n'ont toutefois aucune dimension stratégique ou militaire importante. Ce qui n'est pas le cas de la situation à Zabadani, un des principaux fiefs de l'opposition autour de la capitale qui est en train de tomber entre les mains de l'armée syrienne aidée par le Hezbollah. De même, les tentatives de remonter vers la capitale par Deraa ont échoué, en dépit de l'aide ouverte donnée par les Israéliens aux groupes de l'opposition et malgré les tentatives d'impliquer les druzes dans les combats contre les forces du régime. Mais dans cette guerre qui se prolonge depuis bientôt cinq ans, il n'y a pas de lignes de fronts stables et chaque partie, locale, régionale et internationale, continue à croire qu'elle peut encore vaincre l'adversaire. Réunions de New York ou pas, le sang continue de couler.

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