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Nos Lecteurs ont la Parole - Karim NAJJAR

Le pouvoir qui voulait se partager la poubelle

Avec un slogan unanimement repris par les Libanais du Liban et ceux vivant aux 4 coins du monde, l'odeur s'est répandue à une vitesse fulgurante.
Il ne se passe plus un jour sans qu'on voie fleurir çà et là, sur une désormais litanie répétée à l'envi, ce fameux slogan qui a fait le tour du monde et qui exprime au final, et peut être à lui seul, la cerise sur le gâteau de l'exaspération de nos compatriotes.
Car il s'agit bien là d'une exaspération, d'un sentiment général de laissés-pour-compte, ressenti par tous les Libanais où qu'ils soient. Le Libanais lambda se sent orphelin de sa classe politique. Lâchement abandonné par ses représentants sur le bord de la route, il s'époumone par tous les moyens pour crier sa douleur, pour vomir son mal-être.
Il se sent trahi et il le fait savoir de façon concise et joliment imagée. Il le poste partout, sur Facebook, dans la rue, sur les réseaux sociaux, partout où il peut. Deux mots nauséabonds qui expriment à eux seuls le dégoût collectif et la défiance lancée par les Libanais à l'ensemble de leur dirigeants.

« Vous puez ! »
Les Libanais en ont assez de l'irresponsabilité de leurs dirigeants, et cette irresponsabilité frôle la catastrophe olfactive. Ils lancent le slogan avec véhémence, et n'hésitent pas à créer une gigantesque affiche de sacs-poubelle, chaque sac étant surmonté par la tête d'un homme politique très connu. Pour une fois que la plupart des hommes politiques libanais sont à l'affiche ensemble. Et Ils sont presque tous à l'affiche. C'est drôle.
La crise actuelle n'est que l'aboutissement d'un ras-le-bol trop longtemps contenu. Habitués à courber l'échine et à sourire avec optimisme pour rêver d'un meilleur avenir, nos compatriotes ont passé leur vie à conjurer le sort à coup de demain ça ira mieux, et le Liban redeviendra comme avant, et tu verras, patiente, inchallah, etc...
Sauf que je retourne au moins une fois par an au Liban, et tous les ans je suis triste de voir que le Liban se dilue dans un retour en arrière et n'évolue pas comme le rêve qu'on a cru imaginer toute notre vie. Car, comme tout Libanais qui se respecte, vous n'ignorez pas que le Libanais n'émigre pas, il s'absente. Sauf que le retour me rend de plus en plus malheureux à chaque fois que je retourne au Liban, et que je vois ce qu'il devient. Ce n'est plus le rêve de mes grands-parents, ce n'est plus le rêve de mes parents, et ce n'est pas mon rêve non plus qui devient réalité. C'est presque un cauchemar qui se rapproche de jour en jour. Car faire de nos dirigeants notre bouc émissaire est évidemment un leurre. On essaye de sacrifier nos élus sur l'autel de la responsabilité, alors que nous avons nous-mêmes, et ce depuis des décennies, œuvré à la construction, pièce par pièce, de ce maléfique système, et de ce piège morbide qui se referme sur nous aujourd'hui.
Avons-nous réellement voulu séparer le religieux du politique ? Avons-nous seulement une volonté commune et majoritaire de le faire ? Au moins un consensus ? Non, et nous sommes loin du jour où l'on pourra se marier civilement au Liban. Avons-nous trouvé des accords ou des consensus pour régler des problèmes d'infrastructure de base (eau, électricité etc...) qui concernent tous les Libanais, quels que soient leurs bords ? Non, et quand je rentre au Liban, je m'étonne des coupures d'électricité quotidiennes et de la circulation automobile qui nécessite une mise à jour de mon cerveau pendant au moins deux jours, afin de ne pas causer ou subir un accident de la circulation !
Avons-nous réellement travaillé à l'édification d'un État, qui, loin de pouvoir régler tous les problèmes d'une société, demeure à ce jour la meilleure organisation qu'on ait pu trouver ? Dans notre système actuel, une formidable mosaïque clanique, féodale, religieuse, le tout dans un magma de jeux de pouvoir régionaux et mondiaux, impossible d'y voir clair ! Nos dirigeants vont jusqu'à manigancer pour se partager nos poubelles. Oui, c'est fou, mais au Liban, le pouvoir voulait même se partager la poubelle. Nous sommes malheureusement plus occupés à nous moquer des autres peuples pour telle ou telle raison, mais nous ne regardons plus les ténèbres dans lesquels nous plongeons de plus en plus notre destin. Car c'est bien la poubelle qui nous attend si nous continuons sur ce chemin. Et celle-là, sera bien grande, bien plus noire, bien plus puante que nos déchets actuels. Cessons d'incriminer nos dirigeants ; ils agissent dans le prolongement de nos pensées. Changeons notre pensée et ouvrons-nous à la concrétisation de nos rêves jamais réalisés. Modifions notre pensée et essayons de changer notre système féodal daté au carbone 14.
Ouvrons-nous au monde de demain, sinon nous finirons dans une grande poubelle que personne ne cherchera même à se partager !

Avec un slogan unanimement repris par les Libanais du Liban et ceux vivant aux 4 coins du monde, l'odeur s'est répandue à une vitesse fulgurante.Il ne se passe plus un jour sans qu'on voie fleurir çà et là, sur une désormais litanie répétée à l'envi, ce fameux slogan qui a fait le tour du monde et qui exprime au final, et peut être à lui seul, la cerise sur le gâteau de...

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