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Liban - Environnement

Décharge de Naamé : l’État jouera les prolongations

Le ministre de l'Environnement, Mohammad Machnouk, a appelé la population des environs de la décharge de Naamé à « coopérer en cette période intermédiaire » et promis que les déchets seront répartis sur plusieurs régions du pays.

Mohammad Machnouk a annoncé que onze nouvelles compagnies ont présenté des offres pour la gestion des déchets dans les six zones du nouveau plan national. Photo Nasser Trabulsi

Le ministre de l'Environnement Mohammad Machnouk a annoncé, en des termes plus ou moins vagues, le report de la fermeture de la décharge de Naamé, estimant que la date du 17 juillet « ne devrait plus demeurer une pression et une obsession ». Il a affirmé à plus d'une reprise que « les déchets seront aussi enfouis dans d'autres régions qui comportent des déchetteries, de manière à les réduire de 3 000 tonnes aujourd'hui à 500 ou 600 tonnes par jour à Naamé ». Le ministre a aussi annoncé les résultats du second appel d'offres pour les sociétés privées devant gérer les régions : seule Beyrouth n'a toujours pas bénéficié d'offres pour le traitement de ses déchets.

Dans le cadre du nouveau plan national de traitement des déchets adopté par le gouvernement en janvier dernier, le Liban doit être divisé en six régions gérées par des sociétés privées. Une décision du Conseil des ministres avait fixé au 17 juillet la date de fermeture de la décharge de Naamé, la principale du pays. Sa fermeture avait déjà été reportée à plusieurs reprises par le passé. En 2014, des sit-in organisés par les habitants avaient fermé la route aux camions de la compagnie qui la gère, provoquant une crise des déchets à Beyrouth et dans les régions. Des rassemblements d'habitants menacent de faire de même aujourd'hui.

Durant une conférence de presse tenue hier en son bureau, à l'issue d'une réunion au Conseil du développement et de la reconstruction (CDR) pour l'ouverture des plis, le ministre Machnouk a donc appelé les habitants, dont il dit comprendre les souffrances, « à coopérer en cette étape intermédiaire ». « J'espère qu'ils accepteront de participer à la mise en place de cette solution avec nous, a-t-il dit, en réponse à des questions sur les menaces de sit-in. Une partie de leurs dus a été versée aux municipalités de ces villages, ce qui est leur droit bien sûr. De plus, l'électricité sera distribuée gratuitement à ces localités durant 13 à 15 ans tant qu'il y aura émanation de gaz. Pour ceux qui ont patienté autant d'années, que sont quelques mois en plus ? » Il a noté « le sérieux et la crédibilité » du gouvernement qui œuvre à fermer cette décharge, d'où la mise en place du nouveau plan.
Le ministre a assuré que des efforts sont fournis pour répartir l'enfouissement des déchets dans plusieurs régions où se trouvent des décharges ou des dépotoirs, et ce pour tenter de réduire le volume des déchets arrivant à Naamé de 3 000 tonnes aujourd'hui à quelque 500 ou 600. À une question de L'Orient-Le Jour sur l'assentiment de ces autres régions, M. Machnouk a assuré que des pourparlers ont été engagés avec les forces politiques et les municipalités de plusieurs localités pour obtenir leur aval et réduire ainsi le tonnage qu'accueille Naamé tous les jours.

(Lire aussi : La déchetterie de Naamé, « une fabrique à cancers » pour ses habitants)

 

Un plan « sur les rails »
Si le ministre appelle les habitants des environs de la décharge de Naamé-Aïn Drafil à la « patience » et à la « compréhension », c'est qu'il se dit confiant que le train du nouveau plan national est sur les rails. Il a annoncé hier que le nouvel appel d'offres (dont le délai expirait hier, d'où l'ouverture des plis) a donné des résultats bien plus positifs que le précédent : ainsi, deux offres ont été faites pour le Metn-Sud, deux pour le Nord, quatre pour le Sud et trois pour la Békaa. Trois offres avaient déjà été faites pour la région du Metn-Kesrouan-Jbeil lors du premier appel d'offres. Seule Beyrouth (avec laquelle on compte les banlieues sud et est) n'a encore bénéficié d'aucune offre à ce jour.
« Onze compagnies, pour la plupart très compétentes dans leur domaine, se sont présentées pour cet appel d'offres, a précisé le ministre. Nous suivons le cas de Beyrouth. Nous transmettrons ce dossier à la commission ministérielle chargée du dossier, présidée par le Premier ministre Tammam Salam, formée des ministres des Finances Ali Hassan Khalil, de l'Intérieur et des Municipalités Nouhad Machnouk, d'État pour la Réforme administrative Nabil de Freige, de moi-même et d'un représentant du CDR. Nous demanderons un expert de plus pour examiner ces dossiers et le lancement d'un troisième appel d'offres pour Beyrouth. »
Interrogé par L'Orient-Le Jour sur l'utilité d'un nouvel appel d'offres pour Beyrouth alors que deux précédents n'ont rien donné, le ministre relève que « même pour les autres régions, le nombre d'offres a considérablement augmenté d'un appel d'offres à l'autre ». « Nous voulons que la capitale bénéficie d'un plan de gestion stable et non temporaire, a-t-il poursuivi. Une décision gouvernementale pour l'introduction d'incinérateurs dans les régions les plus peuplées a déjà été prise, mais sa réalisation prendrait au meilleur des cas trois à quatre ans. »
Il convient d'indiquer que les compagnies qui ont présenté des offres (parfois en groupes de deux ou de trois) sont les suivantes :
- Pour le Metn-Sud : Hera (Espagne) ; Vetalia (Roumanie) et CET.
- Pour le Nord : Batco, Lavajet et Daniko (Italie) ; Jihad et Soriko (Bulgarie) ; Danash, Lavajet et Daniko.
- Pour la Békaa : Ward et la Compagnie nationale pour le nettoyage (Koweït) ; Daniko, Khoury Contracting, Impianti (Espagne) et Lavajet ; Jihad, Soriko et Hammoud for Trading
- Pour le Sud : Satrem (France) et Yamen ; Ward, Compagnie nationale pour le nettoyage, Jihad et Soriko ; Danash, Lavajet et Daniko.

 

(Lire aussi : Fifi Kallab* sur les contrats de déchets : « Cherche-t-on à nous imposer l'incinération ? »)

 

« Nous fermerons les routes coûte que coûte »
Suite à la conférence de presse du ministre, nous avons interrogé Raghida Halabi, porte-parole de la campagne civile « Kafana nifayat » (« Nous en avons assez des ordures »), qui milite pour la fermeture de la décharge de Naamé dans les délais. « Nous allons fermer les routes aux camions de la compagnie le 17 juillet coûte que coûte, a-t-elle affirmé. Nous n'avons plus confiance dans les responsables, ils n'ont pas tenu parole au sujet des deux derniers reports. »
Raghida Halabi nous apprend que le plan pour réduire le tonnage de déchets qui parvient à Naamé a déjà été discuté par le ministre avec les municipalités de la région. « Ce plan ne serait mis en œuvre que début 2016, dit-elle. Les municipalités le rejettent déjà. » Selon elle, la municipalité de Aramoun projette d'organiser une conférence pour proposer un plan de gestion des déchets à l'échelle municipale afin de permettre aux municipalités de gérer la situation quand la décharge sera fermée.
Interrogé sur la même question, Paul Abi Rached, président du Mouvement écologique libanais (qui compte une soixantaine d'associations), assure appuyer la Campagne civile pour la fermeture de la décharge de Naamé dans son sit-in qui débutera aussi le 17 juillet. « La décharge est sursaturée, l'alternative existe, qu'ils trouvent d'autres solutions que celle-là », dit-il. Selon lui, « les responsables ne se conduisent pas en professionnels capables de régler la crise des déchets ». Il ne croit pas non plus dans la répartition des déchets dans les régions, estimant que la population opposera son refus partout.

 

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commentaires (5)

Le plus beau de l'affaire, c'est que les sociétés roumaines, bulgares et italiennes sont toutes des entreprises mafieuses... on change le drapeau mais on poursuit les affaires. Ca ne saura pas mieux géré. D'ailleurs, ça ne l'a jamais été. MM

Sophie Schoucair

11 h 33, le 14 juillet 2015

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Commentaires (5)

  • Le plus beau de l'affaire, c'est que les sociétés roumaines, bulgares et italiennes sont toutes des entreprises mafieuses... on change le drapeau mais on poursuit les affaires. Ca ne saura pas mieux géré. D'ailleurs, ça ne l'a jamais été. MM

    Sophie Schoucair

    11 h 33, le 14 juillet 2015

  • PROLONGATIONS... EN TOUT ET POUR TOUT ! ET L'ATOLL CONTINUE POURTANT MIRACULEUSEMENT À VIVRE...

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 43, le 14 juillet 2015

  • Suite de mon commentaire Combien de promesses jamais tenues, de prolongations, de tergiversations avant d'avoir le courage de prendre les décisions nécessaires, Messieurs les IRRESPONSABLES ? Décidemment, vous ne connaissez pas le sentiment d'avoir honte !!! Honte à en pleurer pour nous le petit peuple, victime de votre immense lâcheté et de votre incapacité totale à gérer vos dossiers et problèmes Irène Saïd

    Irene Said

    09 h 23, le 14 juillet 2015

  • Les habitants de la région de Naamé, ..."dont il dit comprendre les souffrances..." Quelle indécence de balancer ces paroles à ces habitants ! Monsieur le Ministre de l'Environnement...quel environnement ? Est-ce lui qui vit dans cette région et goûte aux odeurs et nuisances de cette décharge de Naamé ?

    Irene Said

    09 h 16, le 14 juillet 2015

  • comme quoi , mal Naamé les choses c'est ajouter au malheur du monde (Sorry Albert Camus)

    M.V.

    07 h 31, le 14 juillet 2015

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