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Liban - Commémoration

Georges Haoui, le précurseur

Il fut l’un des premiers leaders de gauche à effectuer une autocritique et à entreprendre, dès la fin de la guerre, une ouverture fondatrice en direction du camp chrétien. Est-ce pour cette raison que Georges Haoui, ancien dirigeant communiste, fut assassiné à Beyrouth, il y a dix ans jour pour jour (ici dans notre photo Sami Ayad, au début de la révolution du Cèdre en 2005, en compagnie de g. à d. de Marwan Hamadé, Sethrida Geagea et Nayla Moawad) ?

Le récit de l'ancien député Élias Atallah sur sa camaraderie avec Georges Haoui, secrétaire général du Parti communiste libanais, de 1979 à 1993, est l'histoire d'une connexion, jamais rompue, entre la gauche libanaise et le combat pour la souveraineté du pays.
Et cette alliance devait trouver son support dans La gauche démocratique, créée en septembre 2004, dont Élias Atallah, lui-même ancien membre du PCL, est le président. Retiré définitivement en 1999 d'un Parti communiste sclérosé, Georges Haoui avait perçu dans ce mouvement le moyen de « concilier l'appartenance nationale et l'appartenance arabe », la démocratisation du pays et l'autonomisation de la gauche libanaise. Le 21 juin 2005, jour de son assassinat, il avait rendez-vous avec Élias Atallah au restaurant La Gondole à Hazmieh, leur lieu de rencontre quotidien. « Nous devions discuter de son adhésion à la Gauche démocratique, et sa possible prise en charge du mouvement... Une heure plus tôt, il était tué. » Comme l'assassinat du journaliste Samir Kassir, celui de Georges Haoui vise à amputer la gauche de sa capacité à insuffler les soulèvements et à véhiculer une vision progressiste conciliant « libertés fondamentales et justice ».
La pensée moderniste, néomarxiste, a très tôt émergé dans le discours de « la principale figure communiste » qu'était Georges Haoui. Élu en 1964, à 26 ans à peine, membre du comité central du PCL, il diffusait d'ores et déjà son « aura » parmi ses camarades, qui le conduira à s'imposer à la tête d'une hiérarchie partisane rigide : devenu « un modèle pour nous tous », sa marque sera celle de « la libanisation du parti communiste », raconte Élias Atallah. Il ne pourra pas néanmoins « institutionnaliser, au sein du parti, le courant de réforme dont il a été le précurseur ». Kamal Joumblatt, son « père spirituel », a initié Georges Haoui « au dépassement de la lecture dogmatique du communisme », poursuit-il.
Le IIe Congrès du Parti communiste libanais en 1968 sera celui de « son éclosion véritable », où il évoquera « la nécessité d'aboutir à une gouvernance nationale démocratique, fondée sur la justice sociale ».

 


Réunion au domicile de Moustapha Saad, en 1986, où l’on peut voir, à gauche, assis côte à côte, Georges Haoui et Élias Atallah. Photo d’archives

 

La tourmente des paradoxes
Quatre ans plus tard, lors du IIIe congrès, il « appellera à rendre au PCL sa place au cœur du Mouvement national ». Il est en effet une référence première, qui continuera de sous-tendre l'action de Georges Haoui : la pensée nationaliste arabe de Antoun Saadé. C'est muni de ce bagage que « l'étudiant communiste à la constitution forte quittera son village de Bteghrine pour se rendre à Beyrouth, en 1958, où il deviendra très vite responsable des affaires étudiantes, et côtoiera le groupe d'intellectuels à l'intérieur du parti, formé notamment de Georges Batal, Karim Mroué, Nadim Abdel Samad et Khalil Debs ».
Sa volonté « d'éviter la polarisation » l'a conduit très tôt à favoriser l'ouverture à l'étanchéité du parti, en « s'ouvrant à toutes les tranches propices à ce changement, y compris l'intelligentsia bourgeoise ». Georges Haoui « avait une imagination très large », de celles qui saisissent les évolutions sociales et parviennent à les inclure dans une vision unificatrice et souple.
La guerre civile, « si compliquée », ne manquera pas d'entraîner des hommes comme lui dans la tourmente des paradoxes.
« Cet homme, dont l'esprit est constitué pour accepter la différence », sera amené à porter les armes. Mais il laissera mûrir une conviction qui en fera l'initiateur du dialogue, dès 1991, par sa rencontre historique avec le patriarche Nasrallah Sfeir, et avec le chef des Forces libanaises, Samir Geagea. Une ouverture à laquelle il joindra un appel soutenu à l'organisation d'un congrès national libanais pour le dialogue. Et qu'il accompagnera d'un chantier « de rétrospection » que la Gauche aura été le seul courant politique à accomplir.
Un autre paradoxe, né de la guerre, devait dicter ses choix ultérieurs : en chrétien de gauche, il menait un combat transcommunautaire, dans un conflit profondément confessionnel, où la cause palestinienne avait, d'entrée, été désacralisée.

 


Georges Haoui (que l’on aperçoit avec un fusil-mitrailleur sur le dos) en compagnie, en mars 1982, de combattants du Parti communiste qui deviendront quelques mois plus tard les précurseurs du Front national de la résistance libanaise, premier mouvement de résistance contre l’occupation israélienne.

 

Ce rire sonore...
En 1982, Georges Hawi choisira de renforcer la lutte contre Israël et de valoriser ainsi la dimension souverainiste – que Kamal Joumblatt avait d'ailleurs soutenue dès 1976, mais contre la Syrie, dont il a refusé l'entrée des troupes au Liban. Naîtra donc la Résistance nationale, active au Liban-Sud et à Beyrouth, dont Élias Atallah, responsable direct des opérations, coordonnera l'action avec Georges Haoui. « La Résistance a transporté le conflit de sa dimension interne et civile, vers une dimension externe. Georges Haoui avait foi que cette résistance produira un éveil national », relève Élias Atallah.
Il revient, non sans nostalgie, à l'organisation des résistants en unités restreintes, hiérarchisées, dont les liens respectifs avec l'unité supérieure étaient impossibles à retracer, le contact se faisant d'un chef d'unité à un autre, qui lui est directement supérieur. « Je veillais à adjoindre au rapport de chaque opération, communiqué à la presse, une carte géographique précise. Le souci des détails visait à discréditer les groupes de la résistance islamique qui germaient alors et qui, très souvent, revendiquaient les opérations que nous avions menées ». Dès 1984, de nombreuses figures chiites de la résistance seront assassinées.
En 1988, Ghazi Kanaan convoque Georges Haoui et Élias Atallah, afin de leur transmettre le message suivant, dont Élias Atallah se souvient à la lettre : « Le président Hafez el-Assad estime que la résistance est une affaire nationale, qui doit être coordonnée avec nous. Nous demandons d'être notifiés de chaque opération préalablement à son exécution. » Élias Atallah lui a alors opposé un refus clair, appuyé par le silence de Georges Haoui. Visiblement indigné, Ghazi Kanaan s'est levé, « a frappé la table de la main avec une intensité telle que les trois tasses de café se sont renversées, avant de nous lancer : Cela va vous coûter cher. » Au sortir de la réunion, Georges Haoui a lancé à son camarade : « Que Dieu nous protège de ce qui nous attend... ».
Dans ses rapports avec le régime syrien, Georges Haoui suivait la stratégie de « maintenir le contact avec Damas, de sorte à pouvoir manœuvrer librement. Il avait peut-être raison... mais c'est ce qui fait qu'il ne s'était point douté de l'éventualité de son assassinat », soupire Élias Atallah.
« L'ironie du sort veut que le fondateur de la résistance soit assassiné par ceux-là mêmes qui prétendent aujourd'hui résister contre Israël »...
Élias Atallah poursuit aujourd'hui, tant bien que mal, un combat que « mes camarades ont rêvé, planifié, visionné ». Ce qu'il lui manque le plus, dit-il, après un long silence, c'est « le rire de Georges Haoui. Ce rire sonore, reflet de sa joie de vivre, qui déteignait jusque dans son optimisme », ajoute-t-il, en riant lui aussi.

 

 

Lire aussi

Les quatre questions centrales de Georges Haoui, par Karim MROUÉ, écrivain de gauche

Repartir de zéro, par Wissam SAADÉ, politologue et journaliste

Le récit de l'ancien député Élias Atallah sur sa camaraderie avec Georges Haoui, secrétaire général du Parti communiste libanais, de 1979 à 1993, est l'histoire d'une connexion, jamais rompue, entre la gauche libanaise et le combat pour la souveraineté du pays.Et cette alliance devait trouver son support dans La gauche démocratique, créée en septembre 2004, dont Élias Atallah,...

commentaires (2)

Les événements since, révélèrent la situation tant désespérée du "gauchiste!", qui ne permettait aucun acte décisif. Son action avait pour but d’amener le Malsain vers la Révolution, même Cédraie. D’obtenir, selon, l'exclusion de ses membres les + Malsains, et d'exiger l'anéantissement de ce Système Sécuritaire purulent et nauséabond d’avant la glorieuse Révolution ! Mais la Contre-révolution despotique, représentée par le parti du Walïyoulfakîh Per(s)cé et aSSadique, fit des démonstrations de force hostile au "gauchisme" ; même Cédraie, yâ hassértéééh ; aux cris de : "À bas la révolution, et donc la Trahison." ! Et se mit à investir les villages et les villes. C’est ainsi que le "gauchiste!" fut contraint de crier : "Vivent les Sectaires Institutions." ! Il s’est contraint donc à prendre contre cette Contre-révolution fakîhdisto-bääSSdiotiste, le parti de ces bêtes conFessionnelles "institutions" dont l'existence lui semblait mise en question. Il les consolida au lieu de les soumettre, et tomba dans le piège des "minorisés" ! Ceci tourna au mélodrame, et la Révolution, même Cédraie ; ayant exhibé 1 fois de +, ce jour-là, son corps gigantesque ; la Contre-révolution, au dedans et à côté, n'en fut que + résolue à la briser à cette Impudente Révolution ! Pauvre, crédule et Malsaine Contre-révolution, car ce n’était pour elle qu’une simple, illusoire et sûr minable simili-victoire ; et qu’elle devra balayer dans et devant la porte de sa niche, bien la laver et bien la récurer.

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

21 h 16, le 22 juin 2015

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Commentaires (2)

  • Les événements since, révélèrent la situation tant désespérée du "gauchiste!", qui ne permettait aucun acte décisif. Son action avait pour but d’amener le Malsain vers la Révolution, même Cédraie. D’obtenir, selon, l'exclusion de ses membres les + Malsains, et d'exiger l'anéantissement de ce Système Sécuritaire purulent et nauséabond d’avant la glorieuse Révolution ! Mais la Contre-révolution despotique, représentée par le parti du Walïyoulfakîh Per(s)cé et aSSadique, fit des démonstrations de force hostile au "gauchisme" ; même Cédraie, yâ hassértéééh ; aux cris de : "À bas la révolution, et donc la Trahison." ! Et se mit à investir les villages et les villes. C’est ainsi que le "gauchiste!" fut contraint de crier : "Vivent les Sectaires Institutions." ! Il s’est contraint donc à prendre contre cette Contre-révolution fakîhdisto-bääSSdiotiste, le parti de ces bêtes conFessionnelles "institutions" dont l'existence lui semblait mise en question. Il les consolida au lieu de les soumettre, et tomba dans le piège des "minorisés" ! Ceci tourna au mélodrame, et la Révolution, même Cédraie ; ayant exhibé 1 fois de +, ce jour-là, son corps gigantesque ; la Contre-révolution, au dedans et à côté, n'en fut que + résolue à la briser à cette Impudente Révolution ! Pauvre, crédule et Malsaine Contre-révolution, car ce n’était pour elle qu’une simple, illusoire et sûr minable simili-victoire ; et qu’elle devra balayer dans et devant la porte de sa niche, bien la laver et bien la récurer.

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    21 h 16, le 22 juin 2015

  • Depuis la dissolution de l'Union soviétique le 26 décembre 1991, les partis communistes ont presque tous disparu dans le monde. Il en reste quelques débris dans certains pays comme le Liban. Ils ne tarderont pas à dispaître un jour à leur tour.

    Un Libanais

    15 h 38, le 22 juin 2015

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