Rechercher
Rechercher

La marque de Caïn

Planificateur et exécutant d'attentats, c'est chez nous un métier comme un autre et même un savoir-faire, voire un art que nous nous sommes parfois enorgueillis d'exporter. Le tout est de ne pas se faire prendre, la main dans le sac, par un vulgaire « incitateur », et faillir ainsi aux règles de ce noble artisanat qui exige rigueur, sang-froid, silence et intuition. Le ministre qui, en 2012, fut ainsi bêtement piégé purgeait une peine imprécise en attendant son jugement. Lequel tomba hier sous le marteau du tribunal militaire, ce dinosaure dont la spécificité est en principe de juger les crimes commis contre les intérêts de la nation, eux-mêmes indéfinis. Quatre ans et demi de prison dont une grande partie est déjà purgée, c'est peu s'il est coupable, beaucoup s'il est innocent. En l'occurrence, et abstraction faite des méandres des codes et des procédures, cette peine semble finalement trop brève pour ceux qui n'ont pas oublié les images glaçantes de sa voiture chargée d'explosifs. La vague d'attentats qui a suivi l'assassinat de Rafic Hariri, aussi bien que celle qui a touché la banlieue sud, a suffisamment fauché d'innocents et traumatisé les Libanais pour qu'ils acceptent que l'on fasse encore du business sur leurs nerfs, leurs biens, leur avenir, leur droit et celui de leurs enfants à vivre une vie « normale ». Il y a donc scandale. Un scandale qui aura la vertu de remettre en question l'existence même du principe de « tribunal militaire » dans un système juridique déjà corrompu, et qui n'a pas besoin de succursales supplémentaires pour prouver son iniquité.
On peut aussi saisir le cas à rebours. Imaginer que pour un acte aussi monstrueux et aussi médiatisé, la prison est peut-être le seul moyen d'échapper à la vindicte populaire. Le seul moyen, aussi, de se protéger d'un éventuel liquidateur comme il en court pas mal dans la région. Le seul moyen d'envisager l'avenir, sans lumière mais sans peur, sans chaleur mais sans honte, sans éclat mais sans exposition. Ironiquement, il est des situations où la quasi-absence de châtiment est un châtiment plus terrible encore. Un jugement avorté laisse la voie libre au jugement populaire. Sortir de prison est une chose, regagner sa dignité en est une autre. Comment envisager l'avenir, reprendre sa vie là où elle s'est arrêtée, retrouver sa famille et ses proches, soutenir le regard pesant, méprisant, suspicieux, parfois haineux des inconnus que l'on croise ? On songe à la toile cruelle de Fernand Cormon, Caïn fuyant avec sa famille, un Caïn préhistorique, hagard et dont la déchéance retentit sur tous les siens. Partir et errer, frappé d'opprobre ? Rester et subir en essayant de reconstruire ce qui peut l'être ? Mais fuir cet œil, comment ?

Planificateur et exécutant d'attentats, c'est chez nous un métier comme un autre et même un savoir-faire, voire un art que nous nous sommes parfois enorgueillis d'exporter. Le tout est de ne pas se faire prendre, la main dans le sac, par un vulgaire « incitateur », et faillir ainsi aux règles de ce noble artisanat qui exige rigueur, sang-froid, silence et intuition. Le ministre qui, en...

commentaires (5)

Dans le cas, plus qu'un Cain. Un traître qui s'est vendu aux "moukhabarat" frérotes super criminelles qui voulaient faire exploser le Liban. Aucune différence avec les agents vils d'Israel dans ce pays.

Halim Abou Chacra

17 h 18, le 14 mai 2015

Tous les commentaires

Commentaires (5)

  • Dans le cas, plus qu'un Cain. Un traître qui s'est vendu aux "moukhabarat" frérotes super criminelles qui voulaient faire exploser le Liban. Aucune différence avec les agents vils d'Israel dans ce pays.

    Halim Abou Chacra

    17 h 18, le 14 mai 2015

  • Dans un pays ou la justice est absente depuis la guerre civile on ne doit pas s'attendre à des miracles au nom du traffic d'influence , sans oublier enfin la classe politique actuelle la plus corrompue depuis l'indépendance .

    Sabbagha Antoine

    16 h 10, le 14 mai 2015

  • Ou bien, on est coupable ou on l'est pas . Dans le premier cas c'est la perpétuité, dans le second c'est l'acquittement. Pourquoi ces quatre mois et demi ?

    Un Libanais

    14 h 32, le 14 mai 2015

  • Malgré sa faconde mais sans vraie culture, avide mais seulement de ce qui lui plaisait, allant à travers tout, piétinant avec allégresse, dévoré par la passion du saccage qui entraînait le pays au gâchis, polémiste qui se servait de son arrogance comme d’un tremplin et qui allait où le menait l’effronterie de son culot. Il serait ce "barbare" qui brandissait les têtes au bout de ses piques, sous-fifre de bande asservi tantôt à la bassesse tantôt à la frénésie. Au fond, c’était un tempérament nihiliste quand il cessait d’être un séide aplati. Il ramenait tout à soi, simple monarque de kermesse ou de carnaval qui ne se trouvait à l’aise que dans la peau de son "propre" bouffon. Résolu à ne rien respecter, la volonté de puissance qui le hantait c’était celle de sa vanité. Bluffeur indigné patenté, ne quittant sa boutique de farces et attrapes…. qui explosent, que pour monter sur son trépied ou kifkif sa tabblïyéééh. Son nihilisme n'était qu'un simple gag de carabin "ensevelisseur de cadavres", un prétexte à l’affirmation d’une vraie "renommée". Il n’avait pas cherché à élever sa personnalité ; il ne s’était entêté, avec un génie pittoresque au sein d’1 simple simulacre parodique, qu’à faire aduler son "propre" personnage. Il ne mérite, eh oui, qu’un Zéro de conDuite. Même pas un brevet de cancre car il l’aurait comblé et aurait été pour lui, un prix d’excellence.

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    12 h 09, le 14 mai 2015

  • TROP DE CAÏNS CIRCULENT LIBREMENT DANS LE PAYS !!!

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 35, le 14 mai 2015

Retour en haut