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Économie - Liban - Éducation

Le baccalauréat électrotechnique, un cas d’école pour rénover la formation des techniciens ?

Résultat d'une initiative privée, ce nouveau diplôme a permis à la majorité des étudiants de ses deux promotions de trouver un emploi en lien avec leurs qualifications. Retour sur une expérience qui pourrait inspirer une refonte d'ensemble de l'enseignement technique.

Les élèves de la filière électrotechnique bénéficient d’un matériel moderne offert par des partenaires privés. Photo Greg Demarque

C'est sans doute avec une certaine fierté, celle des pionniers, que les 73 étudiants de la seconde promotion du baccalauréat technique (BT) en électrotechnique (année 2013-2014) se sont vu remettre leurs « certificats de compétences » de l'académie de Paris par son directeur Claude Michellet, lors d'une cérémonie organisée samedi à l'école hôtelière de Dekwouané. Un certificat reconnu par l'Enseignement supérieur français et qui, au Liban, n'est délivré que dans le cadre du projet Graines d'Espérance créé par l'Institut européen de coopération et de développement (IECD), une ONG française spécialisée dans la coopération entrepreneuriale, et l'entreprise française Schneider Electric.

Parent pauvre
Au-delà des perspectives ouvertes par ce double diplôme à ses bénéficiaires, l'intérêt de ce projet réside surtout dans sa vocation première : repenser l'ensemble de l'enseignement d'une filière électrique porteuse de débouchés mais jusque-là peu attractive pour les étudiants comme leurs employeurs potentiels. Une sorte de condensé de la situation que connaît, depuis son rattachement au ministère de l'Éducation au début des années 1970, un enseignement technique et professionnel souvent vu comme le parent pauvre du système éducatif libanais.
Certes, les inscriptions des étudiants comme les constructions d'établissements n'ont cessé de grimper, en particulier dans le public qui demeure néanmoins minoritaire. Mais cette massification n'a trouvé réponse que dans la construction de nouveaux établissements plutôt que dans l'investissement en matériel et en formation des enseignants. Résultat, le taux de succès des candidats des diplômes techniques était en chute globale de 17 points à 55 % entre 2007 et 2011. Reste que c'est surtout la capacité de cet enseignement à répondre aux attentes des futurs employeurs qui est régulièrement pointée du doigt. « Les filières de gestion informatique et de marketing et ventes absorbent près de la moitié des étudiants alors que d'autres comme l'électronique, les télécoms, l'électricité ou les soins infirmiers sont bien plus qualifiantes et porteuses de débouchés », déplore Kamal Hamdan, directeur du Consultation and Research Institute (CRI) qui a mené une étude exhaustive sur le sujet en 2014. Une situation d'autant plus préoccupante que l'économie libanaise, rentière et faiblement productive, doit créer chaque année cinq à six fois plus d'emplois qu'actuellement pour absorber les nouveaux entrants sur le marché du travail, selon la Banque mondiale. Et que partout dans le monde, le renforcement de l'enseignement technique et professionnel est considéré comme l'un des remèdes privilégiés au chômage des jeunes, que la Banque mondiale estime aux alentours de 34 % au Liban.

Approche par compétences
Partant de ce constat, le responsable de l'IECD au Liban et son homologue de Schneider Electric décident, en 2007, de trouver une réponse à une situation d'autant plus absurde que la plupart des fournisseurs locaux du groupe industriel français peinent à trouver des techniciens qualifiés. Ils décident donc de monter un projet pilote avec trois écoles privées volontaires pour leur permettre de revoir leurs pratiques d'enseignement, bénéficier de l'appui logistique des experts de l'ONG et de dons de matériel moderne par l'entreprise. « L'idée principale était de substituer à une formation jusque-là très théorique une approche par compétences permettant aux élèves à apprendre plutôt que de leur inculquer un savoir pas toujours adapté aux besoins des entreprises. D'autant que les programmes n'avaient pas été mis à jour depuis les années 1990 et qu'on testait par exemple les élèves sur du matériel en bois, très éloigné des tableaux électriques modernes », raconte David Chehab, expert technique de l'IECD. La nouvelle méthode insiste donc sur les travaux pratiques en permettant aux élèves de se former en conditions réelles dans des plateaux techniques réhabilités par le partenaire industriel. Les étudiants sont en outre soumis à deux stages obligatoires de quatre semaines évalués par un tuteur en contact permanent avec l'équipe enseignante de l'établissement. En parallèle, celle-ci est formée aux nouveaux référentiels pédagogiques et bénéficie de mises à jour techniques pour suivre les innovations du secteur.

Tache d'huile
Les succès observés après deux années incitent les promoteurs de l'initiative à dupliquer la méthode à d'autres centres d'éducation technique de la filière en sollicitant notamment le soutien financier de l'Agence française de développement et le quitus de la délégation générale de l'enseignement technique et professionnel du ministère de l'Éducation pour accréditer les innovations pédagogiques entreprises. « Au départ, l'idée était de moderniser la filière électricité, mais il s'est vite avéré plus facile d'en créer une autre en parallèle. Les établissements partenaires délivrent donc un BT en électrotechnique, terme d'une formation de trois ans conçue à partir des nouveaux référentiels », explique Delphine Compain, déléguée de l'IECD au Liban.
Et la méthode fait tache d'huile : depuis 2010, le programme s'est étendu à douze établissements partenaires, équitablement répartis entre privés et publics. De nouvelles passerelles ont par ailleurs été établies avec la trentaine d'entreprises partenaires pour accueillir les élèves et leur offrir davantage de perspectives d'insertion : un an après leur sortie des classes, la moitié des diplômés de la première promotion du BT électrotechnique travaillent dans ce domaine alors que ces taux se situent aux alentours des 5-15 % dans les autres filières. Fort de ce succès libanais, le programme a depuis essaimé au Nigeria, en Égypte et au Maroc. Ses méthodes et principes en feront-ils de même dans les autres filières de l'enseignement technique libanais ?

C'est sans doute avec une certaine fierté, celle des pionniers, que les 73 étudiants de la seconde promotion du baccalauréat technique (BT) en électrotechnique (année 2013-2014) se sont vu remettre leurs « certificats de compétences » de l'académie de Paris par son directeur Claude Michellet, lors d'une cérémonie organisée samedi à l'école hôtelière de Dekwouané. Un certificat...

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ET LES EXPORTER APRÈS DANS D'AUTRES PAYS !

LA LIBRE EXPRESSION

11 h 01, le 11 mai 2015

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Commentaires (2)

  • ET LES EXPORTER APRÈS DANS D'AUTRES PAYS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    11 h 01, le 11 mai 2015

  • C'est génial! Bravo! On en a bien besoin!

    NAUFAL SORAYA

    07 h 17, le 11 mai 2015

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