Jreige demande une levée de la mainmise sur les médias

À l'occasion de la journée de la liberté de la presse, le bureau de l'Unesco de Beyrouth a organisé hier une conférence autour du thème « Laissez le journalisme prospérer vers une meilleure couverture de l'information, l'égalité des genres et la sécurité à l'ère du numérique ». L'événement, placé sous le patronage du ministre de l'Information Ramzi Jreige, a réuni différents responsables des bureaux de l'Unesco et des Nations unies au Liban, ainsi que de nombreuses personnalités libanaises du monde des médias.
Dans l'allocution qu'il a prononcée au cours de l'événement, le ministre Jreige a insisté sur « la nécessité de préserver la liberté de la presse, valeur prioritaire et moteur essentiel de développement », allant jusqu'à exiger « une levée de la mainmise sur les médias qui les dégagerait de leurs contraintes et les ferait prospérer ». Soulignant sur ce point que la prospérité ne saurait être entière sans une bonne situation financière, le ministre Jreige a appelé l'État à présenter au secteur du journalisme « des aides efficaces pour le libérer des autorités occultes de tutelle ». Évoquant la situation économique déplorable que subissent « tant la presse écrite que la presse audiovisuelle et numérique », le ministre a relevé le cas « de nombreux organes de la presse écrite qui ont été forcés d'appliquer une autopolitique d'austérité, procédant à la réduction du nombre de pages de leurs journaux et au licenciement de travailleurs ». Le ministre a également fait allusion à « la crise économique qui touche aussi la presse audiovisuelle, sachant que le marché publicitaire ne suffit même pas à couvrir les coûts de fonctionnement ».
Saluant au début de son allocution la participation massive de femmes à cet événement, la coordinatrice spéciale de l'Onu pour le Liban, Sigrid Kaag, a de son coté rendu hommage aux médias libanais qu'elle a décrits comme bouillonnant « de vie et d'innovation » « En sus de leur rôle d'outils d'information, ces médias revendiquent la réforme politique et traitent de nombreux sujets sensibles tels que les retombées des crises ou aussi le rôle de la femme dans tous les domaines ou encore la violence domestique », a-t-elle précisé. Dépeignant le Liban comme « un havre de liberté de la presse dans la région », la représentante du secrétaire général de l'Onu au Liban a insisté sur « l'importance de la pluralité des moyens d'information et des opinions » tout en recommandant de toujours s'assurer des faits transcrits, de telle sorte que leurs auteurs peuvent être en mesure de rendre des comptes.
Abordant par ailleurs le domaine de la presse numérique, « où s'expriment sans obstacles les opinions » des utilisateurs, Sigrid Kaag a également invité les journalistes du web à assumer leurs responsabilités, leur rappelant que « les informations qu'ils publient peuvent se transmettre comme un virus, et que la viralité n'a pas toujours une connotation positive ». En conclusion, Mme Kaag a appelé les journalistes à œuvrer pour « promouvoir un monde meilleur, un monde de partage, que nous léguerons aux générations futures ».
Rima Karaki a ensuite dirigé la première séance des travaux qui avait pour thème « L'information indépendante et qualitative à l'ère du numérique » et à laquelle ont participé la directrice de l'Agence nationale d'information (Ani), Laure Sleiman Saab, le président du Club de la presse, Bassam Abou Zeid, le rédacteur en chef du journal an-Nahar, Ghassan Hajjar, et le directeur du site web Lebanon Files, Rabih Habre.
Une deuxième séance dirigée par Georges Awad, responsable du programme de la communication et de l'information du bureau régional de l'Unesco, autour des « Défis de la liberté d'expression à l'ère numérique », a clôturé la conférence.
À signaler que l'événement a été marqué par la remise du « Prix de l'Unesco pour la liberté de la presse » à Mazen Darwish, journaliste et activiste syrien, emprisonné depuis plus de trois ans dans les geôles syriennes.