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Campus - Enquête

L’alimentation des étudiants libanais de plus en plus déséquilibrée

Que mangent les jeunes Libanais ? Pourquoi le fast-food est-il devenu l'une des caractéristiques de leur mode de vie ? Comment les encourager à améliorer leur alimentation ? Éléments de réponses.

Éliane Dagher et Élias Nader, étudiants à l’UL : Adopter de petits gestes quotidiens qui permettent de manger mieux.

« Lorsque j'ai faim, je ne pense pas si ce que je mangerai nuira à ma santé », affirme Anthony Barcha. Pour apaiser sa fringale, l'étudiant en gestion à l'UL, qui passe sa journée entre la fac et le boulot, commande souvent du prêt-à-manger « savoureux et rassasiant ». Le jeune homme est loin d'être un cas exceptionnel.
Bien que les jeunes sachent que certains plats sont néfastes pour leur santé, ils continuent à les consommer pour différentes raisons. Pour Amani Salloum, étudiante en gestion à l'Université La Sagesse (ULS), le fast-food agit comme un stimulateur. « Mon horaire à la fac est surchargé et fatigant. Lorsque j'ai le ventre creux, j'avale tout ce que je trouve devant moi. Et ce sont les plats vite prêts offerts par la cantine de l'université qui me tentent le plus. » Pour Ghinwa Ghattas : « Les cafétérias universitaires ne proposent que du fast-food. Ce qui augmente la probabilité, pour les étudiants, de les consommer. »
Outre leur emploi de temps chargé et leur besoin d'un service rapide, facteurs qui empêchent les jeunes d'avoir toujours une alimentation équilibrée, certains étudiants évoquent leur situation familiale. « À la maison, on commande du fast-food car ma mère travaille et n'a pas toujours le temps de cuisiner », confie Rayanne Sahyoun qui aurait aimé consommer davantage de plats sains. Pour sa part, Christina Matta, diététicienne de 27 ans, précise : « Les choix alimentaires des jeunes sont dictés par leur mode de vie accéléré et par une méconnaissance de la valeur nutritive des aliments en vogue. »

Victimes de régimes dangereux
Certains étudiants optent toutefois pour une alimentation diététique. « Garder une belle silhouette est mon obsession », confie Karine Hobeika. La jeune fille de 20 ans poursuit : « En mangeant sainement, je consommerai moins de calories et j'éviterai de grossir. » Joanna Audi, quant à elle, mange sain pour une autre raison. L'étudiante en psychomotricité à l'USJ explique : « Je suis prédisposée à avoir un taux élevé de mauvais cholestérol dans le sang, une alimentation diététique dépourvue de graisses est cruciale pour moi. »
D'autres jeunes ont appris à manger sain. Khalil Abou Chrouch a été obligé, il y a quelques années, suite à des problèmes de surpoids, de suivre une diète stricte. « Depuis, par crainte de regagner le poids perdu, je contrôle mes choix alimentaires en choisissant des plats sains préparés à la maison au lieu de ceux calorifiques », raconte l'étudiant à l'UL. Khalil a suivi une diète prescrite par un professionnel de santé, mais d'autres jeunes sont tombés victimes de régimes dangereux.
Patricia Nawfal raconte : « Il y a deux ans, suite à l'échec d'une relation amoureuse, j'ai beaucoup grossi. Pour maigrir, j'ai suivi un régime alimentaire découvert sur la Toile. Il comprenait des comprimés dits amaigrissants. » Le résultat était catastrophique. Le régime, non équilibré, a provoqué chez la jeune étudiante en audiovisuel de graves carences en vitamines et minéraux essentiels au bon fonctionnement de l'organisme. Patricia a dû être hospitalisée. La diététicienne Christina Matta avertit : « Attention ! Certains régimes alimentaires qui promettent un beau corps en peu de temps n'apprennent pas à manger correctement et sont totalement déséquilibrés. Ces recettes dites miracles peuvent nuire à la santé, sans oublier la reprise des kilos dès l'arrêt des diètes. » Elle conseille aux jeunes d'opter plutôt pour une diète saine et équilibrée recommandée par une diététicienne.

Conseils pour manger mieux
« Une alimentation saine et équilibrée est essentielle pour rester en bonne santé », rappelle Mlle Matta. La diététicienne propose aux jeunes de varier leurs plats tout en limitant la quantité des aliments-plaisir et en privilégiant les aliments-santé non raffinés, les fruits et les légumes. Et de poursuivre : « Les ragoûts qui contiennent de la viande et des légumes sont une excellente source de fer, et aident à maintenir une bonne efficience intellectuelle et physique. » Ses conseils aux jeunes : « Ne sautez pas de repas et prenez toujours votre petit déjeuner. C'est un excellent moyen pour éviter le gain de poids. Sinon vous risquez de perturber votre corps et de diminuer votre concentration. Buvez au moins 6 à 8 verres d'eau par jour, et bougez. Manger devant la télévision ou l'ordinateur risque d'augmenter la quantité d'aliments que vous ingérez. »
L'avis des jeunes : pour une alimentation saine, « se réveiller un peu plus tôt et préparer des repas pour la fac ou le travail diminuera le risque de consommer du fast-food », assure Élias Nader, étudiant à l'UL. Éliane Dagher, étudiante en gestion, appelle pour sa part les cantines des universités à vendre aux étudiants des salades et des plats sains à des prix abordables. Jennifer Nammour, étudiante à l'ULS, va encore plus loin et propose aux cafétérias universitaires de recruter une experte en alimentation pour concocter des plats du jour sains et équilibrés. « De cette façon, les jeunes qui travaillent et n'ont pas le temps de rentrer chez eux pour déjeuner pourront manger sainement à la fac », conclut-elle.


Trois questions à Nadine Zeeni, docteure en nutrition et coordinatrice du département de nutrition à la LAU

Comment l'émotion peut-elle influencer l'alimentation chez les jeunes ?
La relation entre le stress et l'alimentation est déterminante. Le stress chronique dû aux examens ou aux relations amoureuses fait manger davantage, alors que le stress aigu dû à une dépression engendre une baisse de la prise alimentaire.

Pouvez-vous nous donner quelques chiffres concernant les troubles alimentaires chez les Libanais ?
Selon l'étude que j'ai menée dernièrement, 44,6 % des patients qui souffrent de troubles alimentaires et qui consultent des psychiatres souffrent de boulimie, 30,1 % d'anorexie et 24,3 % d'hyperphagie (Binge Eating). Les patients qui souffrent de boulimie sont essentiellement des filles en âge de puberté ayant un poids normal ou un surpoids léger. Parmi les facteurs de risque de la boulimie : avoir une personnalité faible et perfectionniste, être soumise aux changements de la puberté, avoir subi le traumatisme d'un divorce ou d'un décès. Mais le facteur le plus déterminant reste la pression d'être jolie et mince, et l'image de beauté diffusée par les médias.

Quel message souhaitez-vous transmettre aux jeunes ?
Il faut briser le tabou et traiter ces troubles dès qu'ils apparaissent en n'ayant pas honte de consulter un psychologue ou un psychiatre. Manger n'est pas un soulagement du stress (Stress Relief) ni une récompense. Un message aux parents : ne jamais critiquer le poids de leurs enfants avec des commentaires tels : « tu as trop grossi » ou « tu manges trop ». Par contre, ils doivent discuter avec eux, leur apprendre à ne pas se juger soi-même ni juger les autres selon les apparences, et les diriger vers un professionnel de santé au besoin.

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