Un attentat sans précédent perpétré à Paris dans les locaux de l'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo par des hommes cagoulés et lourdement armés a fait au moins douze morts, mercredi en fin de matinée, bilan le plus meurtrier d'un attentat depuis au moins 40 ans en France.
François Hollande, qui s'est rapidement rendu sur place, a déclaré qu'il s'agissait d'"un attentat terroriste, ça ne fait pas de doute". Il s'adressera au pays à 20H depuis l'Elysée. Selon des témoins, les agresseurs ont crié "nous avons vengé le prophète!", a affirmé une source policière.
(Voir : L'attaque contre Charlie Hebdo vue du toit)
Charb, Cabu, Tignous et Wolinski tués
Parmi ces douze morts, figurent deux policiers, a précisé le parquet de Paris. L'un d'entre eux, tué dans les locaux, assurait la protection du dessinateur Charb (le dessinateur et directeur de la publication, NDLR), a précisé une source proche de l'enquête. Figurent aussi parmi les tués les dessinateurs Charb, Cabu, Tignous et Wolinski, a annoncé à l'AFP le parquet. Cette annonce résulte d'une identification faite sur place par un survivant, a précisé le parquet.
Le président de la République a précisé que quatre autres personnes étaient grièvement blessées et "dans une situation d'urgence absolue". Selon le Parquet il y aurait au moins trois autres blessés.
Quelques heures après le drame, le ministre français de l'Intérieur Bernard Cazeneuve a indiqué que "trois criminels" sont à l'origine de l'attaque. Tout est mis en oeuvre pour "neutraliser le plus rapidement possible les trois criminels qui ont été à l'origine de cet acte barbare", a déclaré le ministre, à l'issue d'une réunion de crise à l'Elysée.
François Hollande a dénoncé un "acte d'une exceptionnelle barbarie". Le plan Vigipirate a été relevé à "alerte attentats", le niveau le plus élevé, dans toute l'Ile-de-France, a annoncé Matignon. Une réunion ministérielle était prévue à 14H00 à l'Elysée. Le rectorat a par ailleurs annoncé la suspension jusqu'à nouvel ordre des sorties scolaires à Paris et des activités en dehors des établissements.
Face à face entre des hommes armés et la police, près des bureaux de Charlie hebdo. AFP PHOTO / ANNE GELBARD
"Corps à terre, mares de sang"
"Vers 11h30, deux hommes, armés d'une kalachnikov et d'un lance-roquette, ont fait irruption" au siège du journal satirique dans l'est parisien. Un échange de feu a eu lieu avec les forces de l'ordre", a décrit une source proche de l'enquête. En quittant les lieux, les deux agresseurs ont blessé par balle un policier. Ils ont ensuite pris la fuite en voiture, braqué un automobiliste porte de Pantin et percuté un piéton.
"Je pense qu'il y a des victimes", avait déclaré juste après par téléphone à l'AFP le dessinateur Renaud Luzier, dit Luz, visiblement paniqué.
(Lire aussi : Charlie Hebdo : Les précédentes actions violentes contre des médias en France)
Un journaliste qui travaille dans des locaux en face de Charlie Hebdo a décrit sur iTELE "des corps à terre, des mares de sang, des blessés très graves". "Les gens de Charlie Hebdo sont venus s'asseoir dans nos locaux pour être un peu au calme", a-t-il raconté.
"J'ai entendu des coups de feu, j'ai vu des gars cagoulés qui sont partis en voiture. Ils étaient au moins cinq", a déclaré à l'AFP Michel Goldenberg, qui a son bureau dans la même rue que Charlie Hebdo, la rue Nicolas Appert.
Un autre voisin, Bruno Leveillé, a raconté à l'AFP avoir entendu "à 11h30 pile, une trentaine de coups de feu pendant une dizaine de minutes". Selon un témoin auditif, employé du théâtre situé derrière le siège de l'hebdo, "c'était fort, répété, très impressionnant, on a eu peur".
Dans un atelier voisin, une dizaine d'employés se sont réfugiés dans une pièce. "Il y a eu plusieurs tirs, des échanges avec les policiers", témoigne l'un d'eux, indiquant que les policiers du commissariat à proximité sont arrivés très vite.
(Pour mémoire : Charlie Hebdo publie une BD "halal" sur la vie de Mahomet)
Sans qu'on sache s'il y a un lien avec cette attaque, Charlie Hebdo a fait la Une de son dernier numéro paru ce mercredi avec "les prédictions du mage Houellebecq: en 2015 je perds mes dents... En 2022 je fais Ramadan!". Le livre de l'écrivain controversé paru mercredi, "Soumission", prédit l'arrivée au pouvoir d'un parti musulman en 2022.
L'hebdomadaire satirique a été menacé à de nombreuses reprises depuis la publication de caricatures de Mahomet en 2006. L'avocat de l'hebdomadaire, Richard Malka, a précisé sur iTELE que Charlie Hebdo "faisait l'objet d'une protection policière depuis l'affaire des caricatures de Mahomet et jusqu'à aujourd'hui. Charb était protégé par le service de protection des personnalités. Les menaces étaient constantes. C'est effrayant". En novembre 2011, le siège de Charlie avait été détruit dans un incendie criminel, déjà qualifié d'"attentat" par le gouvernement de l'époque. En 2013, un jeune homme de 24 ans avait été condamné à de la prison avec sursis pour avoir appelé sur internet à décapiter le directeur de Charlie Hebdo après la publication de caricatures de Mahomet.
La brigade criminelle de la police judiciaire parisienne et la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) ont été chargées de l'enquête. Celle-ci est ouverte par la section antiterroriste du parquet de Paris des chefs d'"assassinats en lien avec une entreprise terroriste", "tentatives d'assassinats en lien avec une entreprise terroriste", "association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste", "vol avec arme en relation avec une entreprise terroriste", a précisé le parquet.
Claude Bartolone, président socialiste de l'Assemblée nationale française a dénoncé une "horreur absolue après l'attaque de Charlie Hebdo", une condamnation reprise aussi par des membres de l'opposition de droite.
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commentaires (8)
Voilà comment agissent en particulier, les adeptes hypocrites de la criminalisation du "blasphème" ! Bande de sournois !
ANTOINE-SERGE KARAMAOUN
07 h 42, le 08 janvier 2015