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Culture - Beirut Chants

Aux portes du ciel avec Rossini...

Deux chœurs, un orchestre et quatre solistes pour célébrer en grande pompe la « Petite Messe solennelle » de Rossini à l'église Saint-Maron (Gemmayzé). Aux portes du ciel pour une musique sacrée qui ne manque certes pas de ferveur, mais au lyrisme ample parfois teinté d'une certaine théâtralité...

Une vue du concert. Photo Hassan Assal

Vu la folle journée des embouteillages d'hier (bonjour et bonsoir les responsables irresponsables!) pour des automobilistes bloqués durant des heures sur les routes, entorse aux horaires, habituellement d'une régularité et ponctualité de métronome, pour l'avant-dernier soir d'un festival qui aura délicieusement animé le cœur de Beyrouth durant vingt-trois nuits.
Vingt minutes de retard donc pour écouter ce chant céleste d'un musicien qui a demandé pardon au Créateur d'avoir commis, en composant cette œuvre religieuse, «un péché de vieillesse», lui le bon vivant et gastronome du tournedos le plus célèbre au monde, ainsi que l'âme des opéras-bouffes à la veine truculente. D'ailleurs ne s'est-il pas interrogé: «Est-ce bien de la musique sacrée que je viens de faire ou de la sacrée musique?» Bien malin qui le dira! Mais qu'il se rassure le génie de Pesaro, sa musique, un siècle et demi plus tard, nous touche encore au plus profond du cœur et demeure source d'émotion, de paix, d'harmonie et de réconciliation avec la vie et l'au-delà... Et met en échec nos humeurs noires contre un embouteillage monstrueux!
Devant l'autel, en un bloc vêtu de noir, les chœurs de l'Université antonine et de Notre-Dame de Louaizé (sous la férule des révérends pères Toufic Maatouk et Khalil Rahmé) ainsi que l'orchestre du festival de Beirut Chants. Au premier plan, devant la première rangée de l'auditoire, les solistes Artemisa Repa (soprane), Rosa Bove (mezzo soprane), Cristian Ricci (ténor) et Raymond Ghattas (baryton). Au pupitre, la baguette de maestro Stefani Romani.
Ouverture avec un splendide Kyrie choral pour des voix humaines qui s'élancent en un souffle vibrant et unifié jusqu'au chapiteau illuminé de l'église où s'ébat une colombe en or entourée d'un cercle aux étoiles filantes. Deux parties pour cette œuvre, écrite initialement pour être accompagnée par deux pianos et un harmonium, et qu'on retrouve ici dans une version richement orchestrée.
Ondulation et épanchement de la phrase rossinienne dans sa fluidité, son élégance, son ornementation vocale et orchestrale, son brillant, sa sinueuse narration et sa douceur soyeuse.
Du Gloria in Excelsis Déo entamé par le timbre grave et puissant d'un baryton jusqu'à L'Agnus Dei final dominé par les accents chauds et ronds d'un contralto, la Petite Messe solennelle reste un pur moment de bonheur. Dans ses élans, sa ferveur, son orchestration toujours en lames déferlantes, ses éruptions chorales comme une approche céleste, ses solos aussi tendres qu'un frottement d'ailes de séraphin, aussi pieux qu'une prière dans un ensemble de notes, non sans rappeler le faste et l'aspect léger et aérien du compositeur de Guillaume Tell, Le Barbier de Séville, Cendrillon et La Pie voleuse, lui qui affectionnait cavatine, tempo de marche et mouvement majestueux.
Accueil chaleureux et enthousiaste de l'auditoire, avec gerbes de fleurs et salves d'applaudissements. Un auditoire qui a saisi au vol et à l'ouïe le message de cette musique aux caresses et à l'odeur d'encens furtifs. Une musique qui, pour reprendre les mots de Balzac, «donne de l'espérance aux cœurs les plus endormis».

Vu la folle journée des embouteillages d'hier (bonjour et bonsoir les responsables irresponsables!) pour des automobilistes bloqués durant des heures sur les routes, entorse aux horaires, habituellement d'une régularité et ponctualité de métronome, pour l'avant-dernier soir d'un festival qui aura délicieusement animé le cœur de Beyrouth durant vingt-trois nuits.Vingt minutes...

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