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Culture - Exposition

Malva, l’avant-dernier témoin d’une guerre qui s’éternise

Dans son exposition « The Last Witness », à la SV Gallery*, Omar Hamdi/Malva peint ses impressions (les plus noires, les plus dérangeantes, les plus actuelles) sur toiles géantes. Bouleversant...

Les œuvres de Omar Hamdi/Malva témoignent de son talent à sonder l’âme humaine et à dépeindre les atrocités de la guerre.

Les yeux? Un gouffre. Les prunelles? Un abîme. Qui engloutissent l'observateur dans un maelström, sans fond, de pensées et d'émotions quelque peu anxiogènes. Car ce n'est pas la vie en rose bonbon que dépeint Omar Hamdi, plus connu sous le pseudonyme de Malva. Pour en connaître la raison, il faut aller à la source, aux origines syro-kurdes de l'artiste qui porte aujourd'hui la nationalité autrichienne. Malva, qui s'est rendu célèbre en peignant des toiles impressionnistes tachetées de couleurs joyeuses, est aujourd'hui l'avant-dernier témoin de l'apocalypse syrien. Le dernier témoin? Il figure, justement, sur les œuvres mêmes de l'artiste. Dans le portrait de cet homme octogénaire aux traits torturés par trop de nuits sans sommeil. À travers son regard abimé par les visions d'horreur. Sur sa bouche, sous une moustache en épis blancs, pincée par trop d'amertume, par sa désillusion de l'espèce humaine. Une bouche linéaire qui exprime tout le désenchantement de l'Homo sapiens, capable parfois du meilleur, mais aussi des pires monstruosités.
Malva ne se contente pas de croquer, magistralement, le portrait de ce spectateur tourmenté. Il dépeint, sans doute pour exorciser ses propres démons, les déchirures humaines en temps de catastrophes.
Le peintre rend ainsi compte, sur le vif, de l'effroyable cruauté des combats. Et de tout ce qu'ils occasionnent comme mort, destruction, misère. Comme Fernand Léger, Georges Grosz ou Otto Dix, Malva a compris que la guerre ne pouvait être peinte que de manière moderne. Et que face à la guerre totale, il fallait non pas représenter le combat, mais donner à sentir sa monstruosité. D'où son choix de l'abstrait et de l'expressionnisme pour illustrer les paysages bouleversés, les corps décharnés ou déchiquetés, les visages émaciés, les silhouettes courbées...
Et, surprise, entre un tableau rouge sang et une autre esquisse d'un pied nu sinueux, la beauté conquérante et défiante d'une femme fixant le spectateur droit dans les yeux. Un témoin de plus, cherchant cette fois-ci à ausculter l'âme du visiteur pour en dénicher les remous occasionnés par les toiles voisines ?
Le «dernier témoin» de Omar Hamdi se présente donc comme le cri d'un artiste face aux horreurs de la guerre. Notamment celle de Syrie dont il est originaire, lui qui est né en 1952 à el-Hassaka (extrême nord), dans une famille kurde.
Très tôt, Malva s'est passionné pour le dessin. Voulant poursuivre son ambition artistique, il a quitté le village à 17 ans pour vivre à Damas. Où il a travaillé comme graphiste puis critique d'art. Exilé à Beyrouth pour des raisons politiques, il s'y est installé avec femme et enfants. En 1978, lorsque sa conjointe le quitte, emportant avec elle les gosses, il part s'exiler à Vienne où il bâtit une nouvelle famille. Une nouvelle vie. Une nouvelle carrière. Une vie construite en couches successives, représentée à la galerie SV dans une grande toile biographique éloquemment intitulée My Life.
Membre de la fédération générale des artistes autrichiens et l'Unesco, membre de la Künstlerhaus, il est un fervent adepte de la «Gesamtkunstwerk», ou de l'œuvre d'art totale, ce concept esthétique issu du romantisme allemand qui favorise l'intégration de l'intellectuel, du philosophique, de l'esthétique et des valeurs sociales dans une forme
artistique sensuelle.
Il est également membre du jury des académies de beaux-arts de Salzbourg et de Vienne. Il a exposé en Amérique du Nord et en Amérique du Sud, en Europe, il a participé à des biennales et des foires comme celles de Venise, Budapest, New York, Miami, Nice, Francfort, Le Caire ou encore Charjah. Ainsi que dans les musées de Vienne, de Montréal, de Washington, de Berlin, entre autres.
Il s'agit là de sa seconde exposition à Beyrouth, avec le soutien de Afac et sous le curatoriat de Razan el-Chatti.

*Saifi Village, de 11h à 19h. Jusqu'au 20 décembre. Tél. : 01/975655.

Les yeux? Un gouffre. Les prunelles? Un abîme. Qui engloutissent l'observateur dans un maelström, sans fond, de pensées et d'émotions quelque peu anxiogènes. Car ce n'est pas la vie en rose bonbon que dépeint Omar Hamdi, plus connu sous le pseudonyme de Malva. Pour en connaître la raison, il faut aller à la source, aux origines syro-kurdes de l'artiste qui porte aujourd'hui la...
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