Rechercher
Rechercher

Culture - Cimaises

John Carswell, de retour à l’AUB, un demi-siècle plus tard

L'art des années soixante à l'honneur dans « Trans-Oriental Monochrome : John Carswell », qui occupe les deux salles d'exposition de l'AUB : la Byblos Bank Art Gallery (sur le campus de l'université) et Rose and Shaheen Saleeby Museum (ex-AUB Art Gallery) sur la rue Sidani, Hamra.

La galerie n’est pas vide, les blocs sont les œuvres d’art.

Des blocs blancs multiformes sortis d'un autre âge. C'est ainsi qu'apparaissent les œuvres monochromes produites par John Carswell. Et cette impression n'est pas totalement fausse puisque l'artiste les a produites durant les années soixante et soixante-dix, à l'époque où il enseignait à l'AUB. Un retour aux sources donc, dans tous les sens du terme pour cet historien de l'art, enseignant, explorateur, curateur et orientaliste passionné des trois Orients : le Proche, le Moyen et l'Extrême.
La plupart de ces objets tout blancs ou en noir et blanc ont été réalisés dans la chaleur fervente et créatrice d'un été dans les studios du Nicely Hall building à l'AUB.
Diplômé du Royal College of Art de Londres, Carswell a tourné le dos à la scène artistique londonienne des années 50 – dominée par le réalisme socialiste – et s'est embarqué sur un navire à vapeur qui l'a porté vers le Moyen-Orient. Première escale : le port de Beyrouth.


Six décennies déjà qu'il sillonne la région à la manière d'un Ibn Battouta. Mais au lieu de tracer les routes vers La Mecque, Carswell s'est intéressé pour sa part à un autre genre de pèlerinage. Celui des idées, des courants culturels qui circulent dans et à travers une région berceau des premières grandes civilisations.
« John Carswell est à tous les points de vue un polymathe : il possède une connaissance approfondie d'une grande variété de sujets », a noté Rico Frances, directeur des galeries à l'AUB lors du venissage. Et d'ajouter : « Sa vie est semblable à celle d'un aventurier pittoresque du XIXe sicèle. »
L'intérêt de Carswell pour les arts, la culture et l'histoire du Croissant fertile l'a mené à divers lieux où il a occupé plusieurs responsabilités. Des excavations archéologiques en Turquie, Jordanie, Syrie et Palestine, à l'enseignement des beaux-arts à l'Université américaine de Beyrouth, en passant par l'Asie centrale où il est allé à la trace des premiers explorateurs occidentaux. Puis aux States, où il a été curateur de l'Oriental Institute puis directeur du Smart Museum à l'Université de Chicago. Et retour à Londres, enfin, pour tenir les rênes du département d'arts islamiques et sud asiatiques à Sotheby's.
Selon Octavian Esanu, curateur des galeries de l'AUB, les œuvres de Carswell constituent une étude précieuse et rare de l'art du monochrome des années 50 et 60, qui est occulté de la plupart des études sur l'art européen et américain.
« L'émergence simultanée de l'art monochrome moderne dans plusieurs parties du Moyen-Orient n'a pas encore été examiné à grande échelle », note l'expert.
Carswell a pourtant vécu près de deux décennies à Beyrouth (1956-1977). Durant cette période, il a produit plusieurs séries d'œuvres monochromes.
« À cette occasion, on se permet de poser les questions suivantes : quelle est la relation qui lie ces œuvres au lieu où elles ont été créées ? Quelle est leur valeur dans les champs des discussions et des analyses (orientalisme, postcolonialisme) qui ont disséqué les interactions entre l'Europe, l'Amérique du Nord et le Moyen-Orient ? »


Selon Esanu, Carswell aurait dit que la coulée intense et riche du ciel méditerranéen rendait fades et quelque peu vulgaires les peintures richement pigmentées. D'où son renoncement total aux couleurs. Dans ce sens, l'œuvre de Carswell se démarque non seulement de ses contemporains modernistes de l'après-Grande Guerre, mais aussi de générations d'artistes qui l'ont précédé et dont l'engagement vers l'Orient (en tant que lieu et concept) a modifié leurs œuvres sur le plan de la forme et de la chromatique.
Dans cette série d'œuvres monochromes, comprenant deux ou trois tridimensionnelles, Carswell défie l'essence de l'orientalisme pictural. Les riches couleurs, la luminosité, la brillance chromatique sont les caractéristiques remarquées dans l'art des artistes européens qui ont rencontré la vive lumière moyen-orientale. Carswell va donc à l'encontre du grain, ou de la palette des romantiques, des réalistes, des naturalistes, des impressionnistes et des orientalistes modernes.
« Le réductionnisme chromatique, l'orientalisme monochrome ou le transoriental monochrome de Carswell, qui est né à Beyrouth puis a voyagé en Occident durant les années 60 et 70, accompagné de son esthétique constructive, est un "statement" artistique de grande valeur. Notamment dans le cadre des discours sur les relations Orient/Occident », conclut Octavian Esanu.


À signaler que quelques écrits de l'artiste historien british sont également exposés.

Des blocs blancs multiformes sortis d'un autre âge. C'est ainsi qu'apparaissent les œuvres monochromes produites par John Carswell. Et cette impression n'est pas totalement fausse puisque l'artiste les a produites durant les années soixante et soixante-dix, à l'époque où il enseignait à l'AUB. Un retour aux sources donc, dans tous les sens du terme pour cet historien de l'art, enseignant,...
commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut