Dans la revue enfantine du Hezbollah, les héros ne sont pas des princes, des fées ou des sorcières, mais des « résistants tombés contre l'ennemi israélien ». Depuis 11 ans, le puissant parti chiite, avec son magazine illustré Mahdi, inculque aux enfants son idéologie sacro-sainte de « résistance » contre l'État hébreu, sa raison d'être depuis sa création dans les années 1980.
Il leur offre des récits fictifs inspirés de la vie des combattants du Hezbollah, des puzzles représentant ces guérilleros barbus ou encore des dessins enseignant à l'enfant comment éviter les mines, raconte l'AFP dans un reportage de Mohammad Ali Harissi.
L'un de ces récits, poursuit-il, conte l'histoire d'un combattant qui fait détonner une bombe contre une patrouille israélienne au cours de l'occupation du Liban-Sud. Dans un autre, le « héros » Amer confie à sa mère sous le sceau du secret qu'il part mener « une opération pour tomber en martyr ». Il se fait exploser, tuant et blessant 25 militaires israéliens.
Tiré à 30 000 exemplaires, dont 26 000 distribués par les écoles, le mensuel porte le nom de l'imam al-Mahdi (IXe siècle), le dernier des 12 imams vénérés par les chiites.
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« Valeurs de la Résistance »
« Nous voulons inculquer aux enfants les valeurs de la Résistance », explique à l'AFP Abbas Charara, le directeur général du magazine.
Il réfute néanmoins toute propagande belliqueuse. « Nous n'encourageons pas au port d'armes, mais nous leur faisons connaître les exploits de la Résistance. » « On leur dit que comme ces grands ont résisté et vaincu, ils peuvent aussi résister et vaincre, tout d'abord en s'éduquant », explique-t-il.
Jeune lectrice de huit ans, Zahraa, qui est née alors que son père combattait l'armée israélienne, indique « aimer les histoires de résistance et les jeux sympas » de Mahdi.
Bête noire d'Israël depuis sa création en 1982 par les gardiens de la révolution iranienne, le Hezbollah a mené d'innombrables opérations meurtrières contre les troupes de l'État hébreu, les poussant à se retirer du Liban en 2000 après 22 ans d'occupation. Il a déclenché en 2006 une guerre en enlevant deux soldats israéliens, entraînant une riposte dévastatrice d'Israël qui n'a pas réussi à neutraliser ce parti, qui se présentera en vainqueur.
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Khomeyni enseigné aux enfants
Le Hezbollah revendique sa profonde influence iranienne et la revue en fait de même. Sa rubrique « Le meilleur des leaders » familiarise ainsi les enfants avec l'ayatollah Khomeyni, fondateur de la République islamique d'Iran, note encore le journaliste.
Outre le principe de « résistance », le magazine veut graver dans l'esprit de ses lecteurs de 4 à 17 ans leur appartenance au chiisme. Les puzzles représentent la mosquée al-Aqsa à Jérusalem, lieu saint de l'islam, Sayeda Zeinab, important lieu de pèlerinage près de Damas, ou encore des combattants portant la bannière de Hussein, un imam vénéré du chiisme.
Pour Fatima Charafeddine, auteure de littérature pour enfants, l'insistance de la revue « sur l'identité religieuse sans véritable mention de l'identité libanaise pousse l'enfant à privilégier son appartenance communautaire à celle de son pays ». « En outre, le magazine va trop loin en plaçant les armes et la violence dans l'imaginaire des enfants. C'est vraiment dangereux. » Mais, selon M. Charara, la revue va au-delà de la thématique politico-religieuse pour encourager les jeunes à lire et approfondir leurs connaissances.
Mahdi comprend en effet des articles sur des écrivains, des scientifiques et des personnages historiques comme Alexandre le Grand, Victor Hugo, Albert Einstein ou encore Thomas Edison. Mais ses pages « ludiques » encouragent l'enfant à colorier les « objets utilisés par un résistant », telle une grenade ou une arme automatique. Et à dessiner un « chemin pour éviter » les bombes à sous-munitions laissées par les Israéliens dans le sud du Liban.
La revue n'est pas le seul moyen du Hezbollah pour toucher les jeunes. Sur le site Internet « Ilaab wa Qawem » (« Joue et résiste », http ://games.moqawama.org), l'internaute trouve des jeux inspirés de ses opérations. L'un d'eux, le « cimetière des envahisseurs », lui propose de « tirer une balle » sur un soldat israélien. Avec comme slogan : « Israël disparaîtra inévitablement ».
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commentaires (10)
« Nous n'encourageons pas au port d'armes, mais nous leur faisons connaître les exploits de la Résistance. » : nous condamnons l'incivilité mais encourageons la désobéissance à l'Etat. Et sinon par rapport à l'apologie du chiisme, je souhaiterais rappeler que de tous les partis politiques principaux au Liban il n'y en a qu'un seul qui a à sa tête un religieux.
Olivier Georges
14 h 56, le 05 décembre 2014