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Liban - Commémoration

Hani Fahs, éternel artisan de l’humanisme arabe

Les députés Walid Joumblatt et Bahia Hariri, l'ancien député Samir Frangié, l'uléma Mohammad Hassan al-Amine, l'Irak et la Palestine ont rendu un vibrant hommage à l'uléma chiite Hani Fahs, hier, à l'Unesco.

Une vue de l’assistance. Photo Ani

La porte de l'Unesco est franchie silencieusement par une foule plurielle, où se côtoient, en hommage à l'uléma Hani Fahs, chiites indépendants et intellectuels modérés, Palestiniens et activistes civils, représentants du Parti socialiste progressiste, du Futur et du 14 Mars, dignitaires et prélats, femmes voilées et militantes, journalistes et simples citoyens, originaires du Sud, de Nabatiyé, de Saïda ou de Jebchit, village de l'uléma chiite disparu en septembre dernier...
Tous sont des humbles adhérents à la voie de la modération élaborée dans la pensée et l'action du dignitaire disparu, membre du Conseil supérieur chiite et cofondateur du Congrès permanent du dialogue islamo-chrétien. « La modération est la voie juste, elle est la solution... » Ces mots d'une puissante simplicité étaient ceux de Hani Fahs, extraits de sa dernière apparition télévisée, projetée sur un écran derrière la tribune de l'amphithéâtre. Un portrait géant, où son sourire rayonne de sincérité, insuffle une sérénité à l'audience qui semble recueillie dans une communion de vérité : l'ardeur des hommes de village s'est jointe à la persévérance des penseurs de la modération et du vivre-ensemble. « Le cortège funèbre de Hani Fahs n'était pas composé de foules, mais d'individus », affirme la voix off du minidocumentaire projeté sur la vie du dignitaire, à l'ouverture de la cérémonie.

« Ressentir l'autre »
L'hommage était hier à l'humanisme où convergent libanité et arabisme. Un humanisme dont la complétion porterait la victoire du pacifisme, ainsi que le modèle d'un pluralisme soudé par des échanges identitaires intenses, féconds, multiples, mais non violents.
Pour l'ancien député Samir Frangié, Hani Fahs « est à la tête des nouveaux fondateurs de l'identité libanaise, ouverte à toutes les idées du vivre-ensemble. Cette identité respecte la pluralité des appartenances, celles qui font l'homme, mais sans prétendre les résumer. Par elle, le vivre-ensemble se fraye en chacun de nous, au nom de l'unicité de l'être et de son droit à être maître de lui-même ». Samir Frangié est revenu sur la démarche sincère, réaliste et efficace de Hani Fahs, qui « s'est inculqué à lui-même les préceptes qu'il a ensuite enseignés aux autres, avec grâce et affection, sans distinction aucune, fort de sa science et de son éthique ».
Accumulant expériences et observations, « du Liban-Sud à l'Iran, en passant par la Palestine », Hani Fahs a pu « se réconcilier avec lui-même et avec l'autre », à l'instant où il a compris que « la violence est une destruction de l'autre et de soi ». Il était muni d'une « qualité rare », celle de pouvoir « sentir ce que ressent l'autre, comme s'il devenait lui-même cet autre », a poursuivi Samir Frangié, avant de s'adresser au disparu : « Dans un texte intitulé " Nous attendons Hamid Frangié ", tu m'avais appelé à aller au-delà de la figure du père pour toucher à la leçon qu'il incarnait, et d'être le lien entre la Constitution et le pacte national. » « J'ai répondu à ton appel de travailler pour un Liban nouveau avec un comportement nouveau », a déclaré Samir Frangié, rappelant qu'il avait œuvré avec Hani Fahs pour le vivre-ensemble. Le même engagement persiste et se précise : « Que devons-nous faire pour s'affranchir de la violence qui envahit la région ? »
a-t-il demandé.

« La foi rationnelle »
À cette question, le chef de la Rencontre démocratique, le député Walid Joumblatt, a ébauché une réponse, puisée dans la méthode de la modération léguée par l'uléma Hani Fahs. Qualifiant le sayyed de « phénomène culturel et intellectuel », il a estimé que son discours est « celui de la foi rationnelle, où la confession est un choix culturel ». Profondément ancrée sur la raison, sa méthode est celle du « dialogue et de l'interaction ininterrompue, dont nous avons éminemment besoin en cette période obscure ». C'est dans l'alliance de « la modération, la loyauté et la pensée, dont Hani Fahs était l'incarnation », que doivent être assimilés ensemble « le nationalisme, l'arabisme et l'islam ».

« Un rebelle devenu symbole de la modération »
La députée Bahia Hariri a reconnu pour sa part la difficulté de cette démarche. « Nous aurions tant souhaité être à l'image de ce que tu voyais en nous, toi qui nous faisais présumer ce que nous ne sommes pas », a-t-elle déclaré, avouant « l'échec de notre entreprise de protéger nos sociétés de l'ignorance, de la pauvreté, de la peur et de la maladie ». Cet aveu porte presque un engagement de doubler d'effort, pour honorer « la persévérance d'un homme pour la patrie et l'individu ». Un engagement qui émane surtout des femmes du Liban, celles que Hani Fahs percevait comme « la relique de ce qui reste de la souveraineté du Liban », a rappelé Bahia Hariri.
Pour la secrétaire exécutive de l'Escwa, Rima Khalaf, l'uléma disparu était de ceux qui semblent être « une simulation de l'art, une étoffe de valeurs et d'idées ». Revenant sur sa participation à l'élaboration des rapports sur le développement humain, elle a décrit avec éloquence « cet homme enturbanné, passionné de musique, engagé pour la femme, conscient du passé et croyant dans l'avenir... un rebelle devenu symbole de la modération ».
Cette rébellion n'a pas manqué de déteindre sur la cause palestinienne. Transmettant les salutations du président palestinien Mahmoud Abbas, la militante palestinienne Intissar al-Wazir (Oum Jihad) a énuméré presque exhaustivement les qualités du « frère tolérant, humble et noble, dont la voix fait écho à celle de l'imam Moussa Sadr ». Elle a salué « le visionnaire illuminé qui a lié la révolution palestinienne à la révolution islamique en Iran ». « Nous nous engageons à préserver sa pensée », a-t-elle déclaré solennellement.

« La seule garantie pour les chiites »
Représentant pour sa part le gouvernement irakien, Fakhri Karim, ami de Hani Fahs, n'a pu retenir ses larmes lorsque, s'adressant à l'audience, il a lancé : « Le cèdre du Liban a-t-il donc une communauté ? »
Les larmes ont pesé sur les mots de l'uléma Mohammad Hassan al-Amine, imprégné des vives émotions que laisse le souvenir de cinquante ans d'amitié avec Hani Fahs, « cette personnalité aux multiples aspects ». Il a précisé notamment que le centrisme du sayyed, « évoqué dans tous les hommages qui lui sont rendus », n'est pas l'antonyme du parti pris ou de l'extrémisme. « Il arrive que le centrisme soit un parti pris en bonne et due forme, surtout lorsqu'il s'agit de trancher entre le vrai et le faux », a-t-il souligné, avant de lire, en ultime hommage à l'homme poète, des vers qu'il lui a écrits...
Les larmes ont presque étouffé la voix de Hassan Hani Fahs, qui évoquait la complémentarité entre son père et sa mère, « la première lectrice et seule critique de ses discours »... Il a donné lecture de deux lettres envoyées par Jalal Talbani et Massoud Barzani en hommage à son père. Examinant ensuite l'audience, il a exprimé « l'espoir et la satisfaction de constater que la libanité de Hani Fahs s'est accomplie... et cette libanité, cette citoyenneté, est la seule garantie pour les chiites ».
Des hommages courts et préenregistrés ont rythmé la cérémonie, dont nous retenons, du monde arabe, Bourhan Ghalioun et Amr Moussa.

 

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commentaires (2)

LES SAGES... LES LIBRES... LES MODÉRÉS... LES VRAIS LIBANAIS... LES CONSENSUELS... S'EN VONT ! ET HÉLAS ! QUE RESTE-T-IL ? LE FANATISME ET LE SUIVISME AVEUGLES ! ET CELA... S'APPLIQUE À TOUTES LES COMMUNAUTÉS ET NON PAS À UNE SEULE !

LA LIBRE EXPRESSION

11 h 08, le 15 novembre 2014

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Commentaires (2)

  • LES SAGES... LES LIBRES... LES MODÉRÉS... LES VRAIS LIBANAIS... LES CONSENSUELS... S'EN VONT ! ET HÉLAS ! QUE RESTE-T-IL ? LE FANATISME ET LE SUIVISME AVEUGLES ! ET CELA... S'APPLIQUE À TOUTES LES COMMUNAUTÉS ET NON PAS À UNE SEULE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    11 h 08, le 15 novembre 2014

  • Cet éhhh Libanais et Sain et chïïte veut, lui, être citoyen du monde, compatriote de tous ou plutôt, sûr, étranger à tous. Pour lui, ceux qui se consacrent à l’intelligence, il est de peu d'importance qu'ils puissent appartenir à un pays ou à un autre : Tout homme qui a été initié à la culture est son véritable compatriote. Pour sa part, se considérant et chrétien et musulman, il en conclut qu'il est lamentable de vouloir la disparition de ce pays qui, dans ce qu'il conserve de prérogatives, unit au nom de l’arabisme au lieu de séparer au nom de particularismes sectaires, archaïques et fanatiques. De même, en une conjoncture ou l'on sent bien que les frilosités et les égoïsmes peuvent faire capoter un Mont-Libanais qui poursuit, à l'arraché, sa résistible intégration, il convient de se mobiliser contre les mêmes ethnicismes, les mêmes bornés poseurs de bornes, les mêmes imbécillités pures confessionnalistes ! Imbécillité, oui, dans le sens de débilité voire de crétinisme conFessionnel. Car, à force de maintenir ce Grand-Liban en état de désunion, sorte de patchwork de Cazas d'impuissance grande, ces autres Malsains libanais(h) font irrémédiablement le jeu de ces Äsraéliens dont par ailleurs ils sont si prompts à dénoncer l'arrogance. Cet allâh ou ce dieu, celui-là même qui est à la source de tous ces sales fanatismes, rend vraiment fous ; sous moult pseudos ; ceux qu'il cherche à perdre, à désunir et à anéantir !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    03 h 34, le 15 novembre 2014

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